Karl
Marx et Friedrich Engels [1843-1850] Le parti de classe Tome
IV. ActivitŽs de classe du parti Introduction
et notes de Roger Dangeville Un document produit en version numŽrique
par Mme Marcelle Bergeron, bŽnŽvole Professeure ˆ la retraite de lÕƒcole
Dominique-Racine de Chicoutimi, QuŽbec Courriel : mabergeron@videotron.ca Dans le cadre de : "Les
classiques des sciences sociales" Une bibliothque numŽrique fondŽe et
dirigŽe par Jean-Marie Tremblay, professeur de sociologie au CŽgep de
Chicoutimi Une collection dŽveloppŽe en
collaboration avec la Bibliothque Paul-ƒmile-Boulet de l'UniversitŽ du
QuŽbec ˆ Chicoutimi Site
web : http ://bibliotheque.uqac.ca/ |
Un document produit en version numŽrique par Mme Marcelle
Bergeron, bŽnŽvole,
professeure ˆ la retraite de lÕƒcole Dominique-Racine de
Chicoutimi, QuŽbec.
Courriel : mailto :mabergeron@videotron.ca
Karl Marx et Friedrich Engels [1843-1850]
Le
parti de classe
Tome
IV : ActivitŽs de classe du parti.
Introduction, traduction et notes de
Roger Dangeville.
Paris : Franois Maspero, 1973, 180
pp. Petite collection Maspero, no 123.
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ƒdition complŽtŽe le 7 mai, 2007 ˆ Chicoutimi, Ville de
Saguenay, QuŽbec.
CHEZ LE MæME ƒDITEUR
Karl marx,
Friedrich engels, Le
syndicalisme, 1. ThŽorie, organisation,
activitŽ. — II. Contenu et portŽe des
revendications syndicales. Traduction et notes de
Roger Dangeville.
Karl Marx, Friedrich engels, Le parti de classe. Traduction et notes de Roger Dangeville.
Tome l. ThŽorie,
activitŽ.
Tome II. ActivitŽ
et organisation.
Tome III. Questions dÕorganisation.
Tome IV. ActivitŽs de classe. Index des noms citŽs
dans les quatre volumes. Index analytique.
1. TACTIQUE ET
PERSPECTIVES DU PARTI
Cadre historique de la politique et de la
tactique des diffŽrents partis
CrŽation de la Ile Internationale
Parti de masse : question agraire et petite bourgeoisie
Perspectives historiques du parti
2. LE PARTI FACE A
L'ƒVOLUTION DU MONDE
Situation politique de l'Europe
Caractre Ç national È du mouvement
Le parti de classe. Tome IV. ActivitŽs de classe du parti
Chapitre 1
Tactique et perspectives
du parti
Je dois suivre le mouvement dans cinq grands pays d'Europe et
quantitŽ de petits, ainsi qu'aux ƒtats-Unis. Pour cela, je reois trois quotidiens
allemands, deux anglais, un italien et, depuis le 1er janvier, le
quotidien de Vienne, soit sept en tout. Quant aux hebdomadaires, j'en reois
deux d'Allemagne, sept d'Autriche, un de France, trois d'AmŽrique (deux en
anglais, un en allemand), deux en italien, quatre autres, respectivement en
polonais, en bulgare, en espagnol et en tchque, trois autres dans des langues
que je suis encore en train d'assimiler peu ˆ peu. Outre cela, des visites de
toutes sortes de gens... et une foule sans cesse grandissante de correspondants
‑ davantage qu'ˆ l'Žpoque de l'Internationale ! Beaucoup d'entre eux
esprent recevoir de longues explications, et tous me prennent du temps [1].
Engels ˆ Laura Lafargue, 17 dŽcembre 1894.
Cadre
historique de la politique
et de la tactique des diffŽrents partis
C'est avec une
grande joie que j'ai constatŽ que les socialistes de Roumanie s'Žtaient donnŽ un programme en accord avec les principes
fondamentaux de la thŽorie qui rŽussit ˆ souder en un seul bloc presque tous
les socialistes d'Europe et d'AmŽrique, je veux dire la thŽorie de mon ami Karl
Marx [2]. La situation politique et sociale existant au moment de la mort de
ce grand penseur et les progrs de notre parti dans tous les pays civilisŽs
firent qu'il ferma les yeux dans la certitude que ses efforts en vue de rassembler
les prolŽtaires des deux mondes en une seule grande armŽe et sous un seul et
mme drapeau seraient couronnŽs de succs. Mais s'il voyait seulement les
immenses progrs que nous avons accomplis depuis lors en AmŽrique et en
Europe !
Ces progrs sont
si considŽrables qu'une politique internationale commune est devenue possible
et nŽcessaire, du moins pour le parti europŽen [3]. Ë ce point de vue aussi, je me rŽjouis de voir que vous concordez
en principe avec nous et avec les socialistes de l'Occident. La traduction de
mon article sur La Situation politique en Europe
ainsi, que votre lettre ˆ la rŽdaction de la Neue Zeit le dŽmontrent suffisamment.
De fait, nous nous
trouvons tous devant le mme grand obstacle qui entrave le libre dŽveloppement
de l'ensemble des peuples et de chaque peuple en particulier ; sans ce
libre dŽveloppement ; nous ne pouvons penser ˆ la rŽvolution sociale dans
les diffŽrents pays, pas plus que nous ne pourrions la mener ˆ son terme en
nous soutenant et en nous entraidant les uns les autres. Cet obstacle est la
vieille Sainte-Alliance des trois assassins de la Pologne [4], qui depuis 1815 est dirigŽe par le tsarisme russe et continue de
subsister jusqu'ˆ nos jours, malgrŽ toutes les dissensions internes possibles.
En l'an 1815, l'Alliance fut fondŽe pour s'opposer ˆ l'esprit rŽvolutionnaire
du peuple franais ; elle fut renforcŽe en 1871 gr‰ce au brigandage de
l'Alsace-Lorraine, effectuŽ aux dŽpens de la France, qui fit de l'Allemagne l'esclave
du tsarisme, et du tsar l'arbitre de l'Europe ; en 1888, l'Alliance
subsista pour anŽantir le mouvement rŽvolutionnaire au sein des trois Empires,
en ce qui concerne aussi bien les aspirations nationales que les mouvements
politiques et sociaux des ouvriers. Comme la Russie dŽtient une position
stratŽgique pratiquement inexpugnable, le tsarisme russe reprŽsente le noyau de
cette alliance, la plus grande rŽserve de la rŽaction europŽenne.
Renverser le
tsarisme et en finir avec ce cauchemar qui pse sur toute l'Europe est, ˆ nos
yeux, la condition premire de l'Žmancipation des nations de l'Europe centrale
et orientale. Ds lors que le tsarisme sera renversŽ, nous assisterons ˆ
l'effondrement de cette puissance funeste, reprŽsentŽe par Bismarck, celle-ci
Žtant alors privŽe de son soutien principal [5]. L'Autriche se dŽsagrŽgera, Žtant donnŽ qu'elle perdra la seule
justification de son existence, ˆ savoir empcher par sa simple existence le
tsarisme de s'incorporer les nations ŽparpillŽes des Carpathes et des
Balkans ; la Pologne sera restaurŽe ; la Petite-Russie pourra choisir
librement ses liens politiques ; les Roumains, les Magyars et les Slaves
du Sud, libres de toute immixtion Žtrangre, pourront rŽgler entre eux leurs
affaires et leurs problmes frontaliers ; enfin, la noble nation des
Grands-Russiens ne fera plus une chasse insensŽe ˆ des conqutes qui ne
profitent qu'au tsarisme, mais accomplira son authentique mission civilisatrice
en Asie et, en liaison avec l'Ouest, ils dŽvelopperont leurs capacitŽs intellectuelles
impressionnantes, au lieu de livrer au travail forcŽ et ˆ l'Žchafaud les
meilleurs d'entre eux.
Au reste, il
faut que les Roumains connaissent bien le tsarisme : ils ont suffisamment
souffert du rglement organique de Kisselev, de la rŽpression du soulvement de 1848, du double
brigandage de la Bessarabie [6], des innombrables invasions de la Roumanie qui, pour la Russie, ne
reprŽsente qu'un dŽp™t d'armes et de munitions sur le chemin vers le Bosphore.
Enfin, ils ne savent que trop bien que l'indŽpendance nationale de la Roumanie
cessera du jour o s'accomplira le rve du tsarisme : la conqute de
Constantinople. Jusque-lˆ, le tsarisme vous tiendra en haleine, en vous
poussant vers la Transylvanie roumaine qui se trouve entre les mains des
Magyars, mais dont prŽcisŽment le tsarisme maintient la sŽparation d'avec la
Roumanie. Si demain le despotisme s'effondrait ˆ PŽtersbourg, aprs-demain il
n'y aurait plus d'Autriche-Hongrie en Europe [7].
Ë l'heure
actuelle, l'Alliance semble dissoute, et la guerre imminente. Cependant, mme
si la guerre Žclatait, ce ne serait que pour remettre au pas la rŽcalcitrante
Autriche et la Prusse. EspŽrons que cette guerre n'aura pas lieu : dans
une telle guerre, on ne pourrait sympathiser avec aucun des belligŽrants ;
au contraire, il faudrait souhaiter que tous
fussent battus, si cela Žtait possible. Ce serait une guerre affreuse. Mais,
quoi qu'il advienne, ce qui est sžr c'est que tout s'achvera en fin de compte
au profit du mouvement socialiste et la conqute du pouvoir par la classe
ouvrire en sera accŽlŽrŽe.
Excusez cette
longue lettre sur des considŽrations aussi vastes, mais il ne m'Žtait pas
possible d'Žcrire ˆ un Roumain sans lui exprimer ma conception sur ces
questions bržlantes. Au reste, elle peut se rŽsumer en deux mots : une
rŽvolution Žclatant en Russie ˆ l'heure actuelle Žpargnerait ˆ l'Europe le
malheur d'une guerre gŽnŽrale, et serait le commencement de la rŽvolution dans
le monde entier.
Au cas o vos
liaisons avec les socialistes allemands, l'Žchange de presse, etc., ne seraient
pas satisfaisants, je pourrais vous tre utile sur ce point.
Recevez mes
salutations fraternelles.
Je vous rŽpte
tout d'abord que je suis fier de savoir qu'au sein de la jeunesse russe il
existe un parti qui revendique ouvertement et sans ambages les grandes thŽories
Žconomiques et historiques de Marx, et a rompu Žnergiquement avec les tendances
anarchistes quelles qu'elles soient, ainsi que les quelques rares traditions slavophiles
qui se sont manifestŽes chez vos prŽdŽcesseurs [8]. Il s'agit lˆ d'un progrs qui sera d'une grande importance pour le
mouvement rŽvolutionnaire de Russie. La thŽorie historique de Marx est, ˆ mes
yeux, la condition essentielle de toute tactique rŽvolutionnaire cohŽrente et
consŽquente. Pour trouver cette tactique, il suffit d'appliquer cette thŽorie
aux conditions Žconomiques et politiques du pays en question.
Mais, pour cela,
il faut conna”tre ces conditions ; et en ce qui me concerne, je connais
trop peu la situation actuelle en Russie pour tre en mesure de fixer, avec
compŽtence, les dŽtails de la tactique qu'il faudra appliquer le moment voulu.
De plus, j'ignore compltement l'histoire interne et secrte du parti
rŽvolutionnaire russe, notamment au cours de ces dernires annŽes. Mes amis
parmi les narodoviks ne m'en ont jamais parlŽ.
Or, c'est une condition indispensable pour se former un jugement.
Ce que je sais
ou crois savoir de la situation en Russie m'incite ˆ penser que ce pays s'approche
de son 1789. La rŽvolution doit Žclater le
moment voulu : elle peut Žclater d'un jour ˆ l'autre. Dans ces conditions,
le pays est comme une poudrire, dont il suffit d'allumer la mche ‑
surtout depuis le 13 mars [9]. C'est l'un des cas exceptionnels o il est possible ˆ une poignŽe
d'hommes de faire une rŽvolution, c'est-ˆ-dire,
gr‰ce ˆ une faible impulsion, de renverser un systme tout entier dont
l'Žquilibre est instable (pour employer la mŽtaphore favorite de PlŽkhanov) et,
gr‰ce ˆ un acte insignifiant, de libŽrer des forces explosives qui ds lors ne
peuvent plus tre ma”trisŽes. Or donc, si jamais le blanquisme ‑ l'idŽe
de rŽvolutionner une sociŽtŽ entire par l'action d'un petit groupe de conjurŽs
‑ a eu une certaine justification, c'est certainement ˆ PŽtersbourg [10]. Une fois que le feu est mis aux poudres, une fois que les forces
sont libŽrŽes et l'Žnergie nationale transformŽe d'Žnergie potentielle en
Žnergie cinŽtique (encore une formule favorite de PlŽkhanov, et une fort bonne)
‑ les hommes qui auront mis le feu ˆ la poudrire seront soufflŽs par
l'explosion qui sera mille fois plus forte qu'eux et se cherchera l'issue
qu'elle pourra, telle que les forces et les rŽsistances Žconomiques en
dŽcideront.
Admettons que
ces gens se figurent qu'ils peuvent s'emparer du pouvoir, en quoi cela peut-il
tre nuisible ? S'ils ne font que percer le trou qui rompra la digue, le
torrent dŽcha”nŽ dissipera lui-mme bient™t leurs illusions. Mais si leurs
illusions avaient par hasard pour effet de surmultiplier leur force de volontŽ,
pourquoi nous en plaindre ? Les gens qui se sont vantŽs d'avoir fait une rŽvolution se sont toujours aperu le lendemain qu'ils ne
savaient pas ce qu'ils faisaient, la rŽvolution faite ne ressemblant absolument
pas ˆ l'image de celle qu'ils voulaient faire. C'est ce que Hegel appelle
l'ironie de l'histoire [11], ˆ laquelle peu de personnalitŽs historiques Žchappent [12]. Il suffit de prendre Bismarck, ce rŽvolutionnaire malgrŽ lui, et
Gladstone, qui finalement est entrŽ en conflit avec son cher tsar.
Ë mon avis,
l'essentiel c'est que l'impulsion soit donnŽe en Russie, que la rŽvolution
Žclate. Que ce soit telle ou telle fraction qui donne le signal, que cela se
passe sous telle ou telle enseigne, peu m'importe [13]. S'il s'agissait d'une rŽvolution de palais [14], ses auteurs seraient balayŽs ds le lendemain. Lˆ o la situation
est si tendue, lˆ o les ŽlŽments rŽvolutionnaires se sont accumulŽs ˆ un tel degrŽ,
lˆ o les conditions Žconomiques de masses Žnormes deviennent de jour en jour
de plus en plus intolŽrables, lˆ o tous les niveaux du dŽveloppement de la
sociŽtŽ se trouvent reprŽsentŽs, depuis les communautŽs primitives jusqu'ˆ la
moderne grande industrie et la haute finance, et lˆ o toutes ces
contradictions sont maintenues ensemble par un despotisme sans pareil, un
despotisme toujours plus insupportable pour une jeunesse qui allie en elle
l'intelligence et la dignitŽ de la nation ‑ si lˆ le 1789 a une fois commencŽ,
il ne faudra pas attendre longtemps pour que se produise un 1793 [15].
Je vous quitte,
chre citoyenne. Il est deux heures et demie du matin, et je n'aurai plus le
temps d'ajouter encore quelque chose avant le dŽpart de la poste demain.
Ecrivez-moi en russe, si vous le prŽfŽrez, mais je vous prie de ne pas oublier
que des lettres russes Žcrites, je n'ai pas l'occasion d'en lire tous les
jours.
J'en arrive
enfin ˆ rŽpondre ˆ votre lettre du 8 novembre [16].
L'une des t‰ches
vŽritables de la rŽvolution de 1848 ‑ et contrairement aux illusoires,
les t‰ches vŽritables d'une rŽvolution furent
toutes rŽsolues ˆ la suite de cette rŽvolution ‑, c'Žtait de restaurer
les nationalitŽs opprimŽes et dŽchirŽes de l'Europe centrale, pour autant bien
sžr qu'elles Žtaient douŽes de vitalitŽ et, ˆ ce moment prŽcis, mžres pour
l'indŽpendance. Cette t‰che fut rŽsolue par les exŽcuteurs testamentaires de la
rŽvolution, selon les circonstances du moment, pour l'Italie, la Hongrie,
l'Allemagne, par les Bonaparte, Cavour et autres Bismarck. Restrent l'Irlande
et la Pologne. On peut laisser de c™tŽ ici l'Irlande qui n'affecte que trs indirectement
les rapports du continent. Mais la Pologne se trouve au milieu du continent, et
le maintien de sa division est prŽcisŽment le lien qui ressoude ˆ chaque fois
entre elles les puissances de la Sainte-Alliance. C'est la raison pour laquelle
la Pologne nous intŽresse au premier chef.
Historiquement,
il est impossible ˆ un grand peuple de discuter avec tant soit peu de sŽrieux
ses questions intŽrieures aussi longtemps que l'indŽpendance nationale fait
dŽfaut. Ce n'est que depuis 1861 que les rŽpublicains ont ŽpuisŽ leur t‰che [en
Allemagne], et ils ont donnŽ ensuite aux socialistes les meilleurs de leurs
ŽlŽments. Ce n'est qu'en l'an 1866 ‑ lorsque l'unitŽ grand-prussienne de
la Petite-Allemagne fut vraiment dŽcidŽe ‑ que le parti dit d'Eisenach et
les lassallŽens ont gagnŽ une importance, et ce n'est que depuis 1870, lorsque
les vellŽitŽs d'immixtion de Bonaparte outre-Rhin furent dŽfinitivement
ŽcartŽes, que notre cause a pris son vŽritable essor. O serait notre parti si
nous avions encore la vieille Dite ! De mme en Hongrie. Ce n'est que depuis
1860 qu'elle est attirŽe dans le mouvement moderne, caractŽrisŽ par les
filouteries en haut, et le socialisme en bas.
Un mouvement
international du prolŽtariat en gŽnŽral n'est possible qu'entre nations
indŽpendantes. Le petit peu d'internationalisme rŽpublicain de 1830-1848 se
regroupa autour de la France qui devait libŽrer l'Europe, et accrut donc le
chauvinisme franais au point que la mission de
libŽration universelle de la France, et donc son droit, de par sa naissance, ˆ
prendre la tte, nous est encore jetŽe ˆ travers les jambes tous les jours
(sous une forme caricaturale chez les blanquistes, et trs marquŽe chez les
Malon et Cie, par exemple).
Dans
l'Internationale Žgalement, c'Žtait une opinion qui allait presque de soi chez
les Franais. Ce n'est que les ŽvŽnements qui firent entrer dans leur tte ‑
ainsi que celle de quelques autres ‑ qu'une action internationale commune
n'est possible qu'entre Žgaux, et qu'un premier
parmi ses pairs l'est tout au plus pour une action immŽdiate. En fait, la
rŽalitŽ de tous les jours est encore nŽcessaire pour ancrer cela dans les
esprits.
Tant que la
Pologne est divisŽe et asservie, il n'est donc pas possible qu'un puissant
parti socialiste se dŽveloppe dans le pays, pas plus qu'il n'est possible de
nouer des rapports vŽritablement internationaux entre les Polonais de
l'Žmigration et les autres partis prolŽtariens d'Allemagne, etc. Tout paysan ou
ouvrier polonais qui, Žmergeant du marais, s'ouvre ˆ l'idŽe de participer aux
problmes d'intŽrt gŽnŽral se heurte aussit™t ˆ la rŽalitŽ de l'oppression
nationale. Celle-ci surgit partout comme premier obstacle sur son chemin. Son
Žlimination est la condition fondamentale de toute Žvolution saine et libre.
Des socialistes polonais qui ne mettraient pas en tte de leur programme la libŽration
de leur pays me feraient la mme impression que des socialistes allemands qui
ne voudraient pas exiger d'abord l'abolition de la loi antisocialiste et la libertŽ
d'association, de presse, etc.
Pour pouvoir
lutter, il faut d'abord disposer d'un terrain, d'air, de lumire et de la
possibilitŽ de se mouvoir. Sinon, tout reste bavardage.
Dans tout cela,
ce qui importe ce n'est pas de savoir si la restauration de la Pologne est
possible avant la prochaine rŽvolution. Notre r™le n'est en, aucun cas de
dŽtourner les Polonais des efforts pour arracher de force les conditions de vie
pour leur dŽveloppement ultŽrieur, ni de les persuader que l'indŽpendance
nationale n'est qu'une cause secondaire du point de vue international, alors
qu'elle est bien plut™t la base de toute action internationale commune.
Au demeurant, la
guerre entre l'Allemagne et la Russie Žtait sur le point d'Žclater en 1873,
pour restaurer sous n'importe quelle forme la Pologne, ce qui ežt constituŽ le noyau d'une vŽritable Pologne ˆ l'avenir.
De mme, si messieurs les Russes ne mettent pas bient™t un terme ˆ leurs
intrigues et ˆ leur propagande panslaviste en HerzŽgovine, ils peuvent
parfaitement voir leur tomber dessus une guerre qui dŽpasserait leur volontŽ
aussi bien que celle de l'Autriche et de Bismarck.
Les seuls qui
aient intŽrt ˆ ce que les choses deviennent sŽrieuses en HerzŽgovine, ce sont
le parti panslaviste russe et le tsar. Il n'y a pas lieu de se prŽoccuper
davantage de la bande de brigands bosniaques que des stupides ministres et
bureaucrates autrichiens qui y poursuivent leurs manigances. En consŽquence,
mme sans soulvement, ˆ la suite de simples
conflits europŽens, il n'est pas exclu que soit restaurŽe une Petite-Pologne
indŽpendante, de la mme manire que la Petite-Allemagne prussienne inventŽe
par les bourgeois n'a pas ŽtŽ rŽalisŽe par la voie rŽvolutionnaire ou
parlementaire dont on rvait, mais par la guerre.
Je suis donc d'avis,
qu'en Europe deux nations ont non seulement le droit mais le devoir d'tre
nationales, avant d'tre internationales. C'est ce que les Polonais ont compris
dans toutes les crises, et ils l'ont prouvŽ sur les champs de bataille de la
rŽvolution. Ds lors qu'on leur enlve la perspective de restaurer la Pologne
ou qu'on leur raconte que la nouvelle Pologne leur tombera bient™t toute seule
dans les bras, c'en est fait de leur intŽrt ˆ la rŽvolution europŽenne.
Nous en
particulier, nous n'avons absolument aucune raison de nous mettre en travers de
la route des Polonais qui sont poussŽs irrŽsistiblement vers l'indŽpendance.
Premirement, ils ont inventŽ et appliquŽ en 1863 le mode de combat que les
Russes imitent maintenant avec tant de succs (cf. Berlin et PŽtersbourg, annexe 2 [17] ) ; deuximement, ils ont donnŽ ˆ la Commune de Paris les
seuls capitaines militaires compŽtents et dignes de confiance.
Tactique
dans les pays dŽveloppŽs
et non dŽveloppŽs
Meilleurs
remerciements pour les trs intŽressantes nouvelles que vous me donnez dans
votre lettre du 8.
Si je dois vous
donner mon opinion sur la dernire action d'Žclat et d'ƒtat de Copenhague [18], dont vous tes la victime, je commencerais par un, point sur
lequel je ne suis pas de votre avis.
Par ,principe,
vous rejetez toute idŽe de faire un bout de chemin, mme momentanŽment, avec
d'autres partis. Je suis assez rŽvolutionnaire pour ne pas admettre que l'on
m'interdise, d'une manire absolue, ce moyen si, dans certaines circonstances,
cela est avantageux ou est le biais le moins nuisible [19].
Mais nous sommes
d'accord sur le fait que le prolŽtariat ne peut conquŽrir sans rŽvolution
violente le pouvoir politique, seule porte donnant sur la sociŽtŽ nouvelle.
Pour qu'au jour de la dŽcision le prolŽtariat soit assez fort pour vaincre ‑
et cela, Marx et moi nous l'avons dŽfendu depuis 1847 ‑, il est
nŽcessaire qu'il se forme un parti autonome, sŽparŽ de tous les autres et
opposŽ ˆ eux tous, un parti de classe conscient.
Cela n'exclut
pas, cependant, que ce parti puisse momentanŽment utiliser ˆ ses fins d'autres
partis. Cela n'exclut pas davantage qu'il puisse soutenir momentanŽment
d'autres partis pour des mesures qui reprŽsentent ou bien un avantage immŽdiat
pour le prolŽtariat, ou bien un progrs dans le sens du dŽveloppement
Žconomique ou de la libertŽ politique. Pour ma part, je soutiendrais quiconque
lutte vŽritablement en Allemagne pour l'Žlimination de la succession par ordre
de primogŽniture et d'autres survivances fŽodales, de la bureaucratie, des droits
de douane, des lois de rŽpression contre les socialistes, des restrictions au
droit de rŽunion et d'association. Si notre parti allemand du progrs [20] ou votre Venstre danois [21] Žtaient de vŽritables partis bourgeois radicaux, et non de simples
regroupements de misŽrables bavards qui, ˆ la premire menace de Bismarck ou
d'Estrup, se mettent ˆ ramper, je ne serais absolument pas inconditionnellement contre tout cheminement momentanŽ avec eux pour certains buts
prŽcis. Si nos parlementaires votent pour un projet qui Žmane de l'autre c™tŽ ‑
et c'est ce qu'ils sont obligŽs de faire assez souvent ‑, n'est-ce pas
dŽjˆ un pas ensemble ? Mais je n'y suis favorable que lorsque l'avantage
est direct pour nous, ou indubitable pour le dŽveloppement historique du pays en
direction de la rŽvolution Žconomique et politique, c'est-ˆ-dire en vaut la
peine, et ˆ la condition prŽalable que le caractre prolŽtarien de classe du
parti n'en soit pas affectŽ. C'est ce qui est pour moi la limite absolue. Cette
politique, vous la trouverez dŽveloppŽe ds 1847 dans le Manifeste
communiste, et nous l'avons suivie partout, en
1848, dans l'Internationale.
Abstraction
faite de la question de la moralitŽ ‑ il ne s'agit pas de ce point ici,
et je le laisse donc de c™tŽ ‑, en tant que rŽvolutionnaire, tout moyen
m'est bon pour atteindre au but, le plus violent, mais aussi le plus douillet
en apparence.
Une telle
politique rŽclame une vision aigu‘ des choses et une fermetŽ de caractre, mais
peut-il y avoir une autre politique ? Elle nous menace du danger de
corruption, prŽtendent les anarchistes et l'ami Morris. Cela est vrai, si la
classe ouvrire est une sociŽtŽ de dŽbiles, d'idiots et de fripouilles qui se
laissent acheter en un tour de main ; mais alors il ne nous reste plus
qu'ˆ tout remballer sans attendre, et le prolŽtariat et nous, nous n'avons rien
ˆ faire sur la scne politique. En fait, 1e parti du prolŽtariat, comme tous
les autres partis, deviendra d'autant plus clairvoyant qu'il saura tirer les
leons de ses propres erreurs, et nul ne peut lui Žpargner entirement ces
erreurs.
Ë mon avis, vous
avez donc tort si vous commencez par Žlever une question purement tactique au
niveau des principes. Et, pour moi, il s'agit ˆ l'origine d'une pure question
de tactique. Mais, dans certaines circonstances, une erreur de tactique peut
aussi aboutir ˆ une violation des principes.
Et, sur ce plan,
pour autant que je puisse en juger, vous avez raison contre la tactique du
comitŽ directeur. Au Danemark, la Gauche petite-bourgeoise joue depuis des
annŽes une indigne parodie d'opposition, et ne cesse d'Žtaler aux yeux du monde
sa propre impuissance. L'occasion ‑ si elle s'est jamais prŽsentŽe ‑
d'affronter la violation de la constitution [22] les armes ˆ la main, elle l'a manquŽe depuis longtemps, et ‑
comme cela en a tout ˆ fait l'air ‑ une fraction toujours croissante de
cette Gauche aspire ˆ une rŽconciliation avec Estrup. Il me semble qu'il soit
impossible qu'un vŽritable parti prolŽtarien puisse marcher ensemble avec un
tel parti sans perdre ˆ la longue son propre caractre de classe comme parti
ouvrier. Dans la mesure o vous soulignez le caractre de classe du mouvement
en opposition ˆ cette politique, je ne peux qu'tre d'accord avec vous.
En ce qui
concerne la faon de procŽder du comitŽ directeur vis-ˆ-vis de vous et de vos
amis, il faut remonter aux sociŽtŽs secrtes de 1840-1851 pour trouver des
exclusions aussi sommaires de l'opposition dans un parti : l'organisation
secrte les rend inŽvitables. En outre, il y en eut ‑ et assez frŽquemment
‑ chez les chartistes anglais partisans de la violence physique sous la
dictature de O'Connor [23]. Cependant, les chartistes formaient un parti directement en vue
d'un coup de force, comme l'indiquait leur nom, et Žtaient soumis de ce fait ˆ
une dictature, de sorte que l'exclusion y Žtait une mesure d'ordre militaire.
En temps de paix, en revanche, je n'ai connaissance d'aucune faon de procŽder
aussi arbitraire, si ce n'est celle de Ç lÕorganisation ferme et
rigoureuse È des lassallŽens de von Schweitzer : celui-ci en avait besoin,
ˆ cause de ses frŽquentations douteuses avec la police de Berlin pour accŽlŽrer
la dŽsorganisation de son Association gŽnŽrale des ouvriers allemands. Parmi
les partis socialistes ouvriers actuels, il n'en est probablement pas un seul
qui aurait l'idŽe de traiter d'aprs le modle danois une opposition qui se
dŽvelopperait dans son sein, ˆ prŽsent que Monsieur Rosenberg vient de se
liquider heureusement lui-mme en AmŽrique [24].
La vie et la
croissance de tout parti impliquent le dŽveloppement en son sein de tendances
plus modŽrŽes et plus extrmes qui se combattent, et , quiconque exclut
purement et simplement la plus extrme ne fait qu'accŽlŽrer le dŽveloppement de
celle-ci. Le mouvement ouvrier se fonde sur la critique la plus radicale de la
sociŽtŽ existante. Cette critique est son ŽlŽment vital : comment
pourrait-il, dans ces conditions, s'abstraire lui-mme de la critique et
chercher ˆ interdire la discussion ? Demandons-nous donc simplement aux
autres la libertŽ de parole ˆ notre profit... pour l'abolir de nouveau dans nos
propres rangs ?
DŽveloppement du parti en AmŽrique
Votre grand
obstacle en AmŽrique rŽside, me semble-t-il, dans la position exceptionnelle
des ouvriers nŽs dans le pays. Jusqu'en 1848, on ne pouvait parler d'une classe
ouvrire, indigne et permanente, qu'ˆ titre exceptionnel : les quelques
ŽlŽments de ce genre dans l'Est, les villes, pouvaient toujours encore espŽrer
devenir paysans ou bourgeois [25]. Une telle classe s'est dŽsormais formŽe et s'est aussi, en grande
partie, organisŽe sur le plan syndical. Mais elle occupe toujours une position
d'aristocratie et abandonne, autant qu'elle le peut, les emplois ordinaires et
mal payŽs aux ŽmigrŽs, dont une faible partie seulement adhre aux syndicats.
Mais ces ŽmigrŽs
sont divisŽs en une multitude de nationalitŽs ; ils ne se comprennent pas
entre eux, et souvent ne parlent mme pas la langue de leur pays. Il se trouve,
en outre, que votre bourgeoisie sait ‑ beaucoup mieux mme que le
gouvernement autrichien ‑jouer une nationalitŽ contre l'autre :
Juifs, Italiens, Bohmes, etc., contre Allemands et Irlandais, et chacun d'eux
contre les autres, au point qu'ˆ New York il y a des diffŽrences de niveau de
vie qui partout ailleurs para”traient invraisemblables.
Ë cela vient
s'ajouter l'indiffŽrence totale d'une sociŽtŽ nŽe sur une base purement
capitaliste et ne connaissant donc pas un arrire-plan fŽodal de savoir-vivre
paisible et confortable, n'Žtant rŽgie que par la lutte pour la concurrence qui
Žtouffe toute vie humaine : il y en a tant et plus de ces maudits
dutchmen, Irlandais, Italiens, Juifs et Hongrois, sans parler de John Chinaman
qui se profile ˆ l'horizon et les dŽpasse tous de loin pour ce qui est de sa
capacitŽ de vivre de trois fois rien.
Dans un tel pays,
il est inŽvitable que le mouvement procde par Žlans successifs, suivis de
revers tout aussi certains. Seulement les Žlans deviennent nŽanmoins toujours
plus gigantesques, et les rŽactions toujours moins paralysantes. En gros, la
cause avance donc malgrŽ tout.
Mais je tiens
une chose pour assurŽe : la base purement bourgeoise, dŽpourvue de tous
les leurres prŽ-bourgeois, la colossale Žnergie correspondante de l'Žvolution
qui se manifeste mme dans les abus insensŽs de l'actuel systme de
protectionnisme douanier, tout cela suscitera un jour un tournant qui
provoquera la stupŽfaction du monde entier. Le jour o les AmŽricains se
mettront en branle, ce sera avec une Žnergie et une violence par rapport
auxquelles nous ne serons que des enfants en Europe.
Avec mes
meilleures salutations.
Ton F. E.
Quelles que
soient les gaffes et l'Žtroitesse d'esprit des chefs du mouvement et mme, en
partie aussi, des masses qui viennent de s'Žveiller, une chose est
certaine : la classe ouvrire amŽricaine est indubitablement entrŽe en
mouvement [26]. Le fait que la lutte de classe ait ŽclatŽ en AmŽrique signifie
pour les bourgeois du monde entier exactement ce que signifierait
l'effondrement du tsarisme russe pour les grandes monarchies militaires
d'Europe : l'Žbranlement de la base sur laquelle ils Žvoluent. En effet,
l'AmŽrique a, de tout temps, ŽtŽ l'idŽal de tous les bourgeois : un pays
grand, riche et toujours en essor, avec des traditions purement bourgeoises,
aux institutions vierges de tous vestiges fŽodaux ou de traditions monarchistes
et sans un prolŽtariat permanent, de pre en fils. Ici, tout le monde pouvait
devenir, sinon capitaliste, du moins, en tout cas, un homme indŽpendant qui produit
ou trafique pour son propre compte avec ses moyens propres. Et comme, jusqu'ˆ
prŽsent, il n'y a pas eu de classes aux intŽrts
opposŽs, notre ‑ et votre ‑ bourgeois pensait que l'AmŽrique se
trouvait au-dessus des antagonismes et luttes de
classes.
Or, cette
illusion est ˆ prŽsent dŽtruite. Le paradis bourgeois sur terre se transforme ˆ
vue d'Ïil en un purgatoire et, comme en Europe, il ne peut tre prŽservŽ de sa
transformation en un enfer que par un dŽveloppement tumultueux du prolŽtariat
amŽricain dont les ailes viennent tout juste de pousser.
La manire dont
il est apparu sur la scne est tout ˆ fait extraordinaire : il y a six
mois. ˆ peine, personne ne s'en doutait le moins du monde, et le voilˆ qui
appara”t aujourd'hui en des masses si organisŽes que toute la classe des
capitalistes est saisie de terreur. J'eusse aimŽ que Marx vive encore cet
ŽvŽnement !
Les btises que
font les anarchistes en AmŽrique peuvent nous tre utiles [27]. II n'est pas souhaitable qu'ˆ leur actuel niveau de pensŽe, encore
tout ˆ fait bourgeois, les ouvriers amŽricains obtiennent de trop rapides
succs avec leurs revendications de hauts salaires et de temps de travail
moindre. Cela pourrait renforcer plus qu'il ne faut l'esprit syndicaliste
unilatŽral.
Je ne puis
comprendre pourquoi Decazeville s'est effondrŽ si brusquement, d'autant plus
que Paul (Lafargue), tel NapolŽon aprs l'incendie de Moscou, a cessŽ
subitement de m'envoyer Le Cri du peuple juste
au moment critique [28]. L'esprit parisien est-il donc absolument incapable d'enregistrer
les choses dŽsagrŽables qu'on ne peut empcher d'arriver ? Une victoire ˆ
Decazeville ežt ŽtŽ une trs belle chose, mais une dŽfaite, aprs tout, ne
pourrait-elle pas tre en dŽfinitive encore plus utile au mouvement ?
Ainsi, je crois que les btises anarchistes de Chicago seront utiles en fin de
compte. Si l'actuel mouvement amŽricain (qui, dans la mesure o il n'est pas
allemand, se trouve toujours encore au niveau syndicaliste) avait remportŽ une
grande victoire sur le problme des huit heures, le syndicalisme y serait
devenu un dogme rigide et dŽfinitif, tandis qu'un rŽsultat mitigŽ contribuera ˆ dŽmontrer qu'il faut aller au-delˆ du mot
d'ordre : Ç Des salaires ŽlevŽs et une journŽe de travail plus
courte [29]. È
Le parti en
Angleterre
Le mouvement
anglais ressemble toujours ˆ l'amŽricain, ˆ cela prs qu'il le devance un
peu [30]. L'instinct de la masse des ouvriers, selon lequel ils doivent
constituer un parti autonome vis-ˆ-vis des deux partis officiels, devient de
plus en plus fort et s'est manifestŽ une fois de plus lors des Žlections
municipales du 1er novembre. Mais il se trouve que les vieilles
rŽminiscences et traditions, ainsi que le manque d'hommes capables de
transformer cet instinct en action consciente et d'organiser ces forces ˆ
l'Žchelle de tout le pays, contribuent ˆ les maintenir dans ce stade prŽalable
de l'indŽcision de la pensŽe et de l'isolement local de l'action. Le sectarisme
anglo-saxon rgne aussi dans le mouvement ouvrier. La FŽdŽration
social-dŽmocrate, de mme que votre parti socialiste ouvrier allemand
[d'AmŽrique] [31], a rŽussi le tour de force de transformer notre thŽorie en un dogme
rigide d'une secte orthodoxe. Elle est mesquinement hermŽtique et a, en outre,
gr‰ce ˆ Hyndman, une prŽsence sur la scne politique internationale, o elle
cultive toutes les traditions pourries que l'on parvient de temps ˆ autre ˆ
Žbranler, mais que l'on n'a pas encore extirpŽes jusqu'ici.
Ici [en
Angleterre], la pagaille et le laisser-aller parmi les diffŽrentes petites
fractions se poursuivent encore pour l'heure [32]. Il y a moins de chaleur dans les chamailleries, mais les intrigues
dans les coulisses sont d'autant plus actives. En revanche, la poussŽe instinctive
des masses vers le socialisme devient activitŽ de plus en plus vive, consciente,
unitaire. Les masses, bien que moins conscientes que certains chefs, sont
cependant meilleures que tous les chefs rŽunis ; seulement le procs de la
prise de conscience est plus lent que partout ailleurs, parce que tous les
vieux chefs ont plus ou moins intŽrt ˆ dŽvier la conscience qui est en train
de lever, dans telle ou telle direction particulire, voire de la fausser. Eh
bien, il faut encore avoir de la patience.
Tentative de formation du parti
Je vous ai
renvoyŽ hier votre programme avec mes remarques qui vous seront peut-tre
utiles [33].
Ce que vous
dites ˆ propos des dirigeants des syndicats est tout ˆ fait juste. Depuis la
crŽation de l'Internationale, nous avons dž les combattre. C'est d'eux que
proviennent les Macdonald, Burts, Cremer et Howell, et leur succs sur le plan
parlementaire encourage les petits chefs ˆ imiter leur exemple. Si vous pouviez
parvenir ˆ ce que les syndicalistes du Nord considrent leur syndicat comme un
moyen prŽcieux pour organiser les ouvriers et arracher de petites conqutes, mais cessent de faire de la formule Ç un salaire Žquitable
pour une journŽe de travail Žquitable È leur but final, alors on aura
coupŽ court aux menŽes des chefs [34].
Je tiens votre
plan d'organisation pour prŽmaturŽ : il faudrait d'abord que la province
se mette sŽrieusement en branle, et cela n'est pas encore le cas, et de loin.
Tant qu'il n'existe pas en province une force puissante, qui pse sur Londres,
les trublions londoniens ne seront pas rŽduits au silence ‑ ce qui ne
peut s'opŽrer que par un vŽritable mouvement des masses londoniennes. Ë mon
avis, on a manifestŽ trop d'impatience au sein de ce que l'on appelle poliment
le mouvement socialiste : tenter de nouvelles expŽriences socialistes sera
plus que vain tant qu'il n'y aura rien ˆ organiser. Et lorsque les masses se
mettront une :bonne fois en mouvement, elles Žprouveront elles-mmes le
besoin de s'organiser.
En ce qui
concerne la League ‑ si elle maintient la
rŽsolution de sa dernire confŽrence ‑, je ne vois pas comment quelqu'un
pourrait en rester membre s'il veut utiliser comme moyen de propagande et d'action
la machine politique existante.
En attendant, il
faut naturellement continuer ˆ faire de la propagande, et je suis tout ˆ fait
disposŽ ˆ y contribuer pour ma part. Mais les moyens ˆ cet effet doivent tre
rassemblŽs et rŽpartis par un comitŽ anglais, voire un comitŽ londonien dans la mesure o cela se fait ˆ Londres.
Je ne connais
pas d'ouvrages qui pourraient vous donner des informations sur le mouvement des
luddites : ce sera un travail trs complexe que de trouver des sources
dignes de foi ˆ partir des livres d'histoire et d'Žcrits datant de cette
pŽriode.
Votre dŽvouŽ
Signature
Votre lettre ne
peut avoir qu'une seule signification, ˆ savoir, pour autant que cela est dans
vos possibilitŽs, chasser Aveling du mouvement [35]. Si vous refusez de continuer ˆ collaborer avec Aveling pour des
raisons politiques, vous avez le devoir de les
exhiber ouvertement, ou bien pour donner ˆ Aveling la possibilitŽ de se
justifier, ou bien, en revanche, pour dŽbarrasser le mouvement d'un
collaborateur indigne et dangereux. S'il n'en est pas ainsi, vous avez le devoir,
ˆ mon avis, de rŽprimer vos sentiments personnels dans l'intŽrt du mouvement.
De tous les
diffŽrents groupes socialistes d'Angleterre, le seul avec lequel je pouvais
sympathiser vraiment jusqu'ici Žtait l'actuelle Ç opposition È dans
la League. Mais, si l'on admet que ce groupe se
dŽsagrge simplement pour des lubies et chamailleries personnelles, ou pour des
racontars ou suspicions internes que l'on Žvite soigneusement de porter ˆ la
lumire du jour, il Žclatera immanquablement en une multitude de petites
cliques qui ne tiennent ensemble que pour des motifs personnels, mais qui, en
tout cas, sont totalement inadaptŽes ˆ un r™le dirigeant dans un mouvement ˆ un
niveau national. Et je ne vois pas de raisons pour sympathiser davantage avec
telle de ces cliques plut™t qu'avec telle autre, avec la FŽdŽration
social-dŽmocrate ou un quelconque autre organisme.
Je n'ai pas le
droit de vous demander pourquoi vous refusez de collaborer avec Aveling. Mais,
comme vous avez travaillŽ ensemble durant des annŽes, il en a le droit, et je
considre qu'il est de mon devoir de vous en informer par cette lettre.
Obstacles ˆ la formation du parti
Une chose est
solidement assurŽe dans notre faon de procŽder pour tous les pays et temps
modernes : amener les ouvriers ˆ constituer leur propre parti indŽpendant
et opposŽ ˆ tous les partis bourgeois [36]. Pour la premire fois depuis longtemps, lors des dernires Žlections,
les ouvriers anglais ‑ mme si ce n'est qu'instinctivement ‑
avaient fait un premier pas dŽcisif dans cette direction sous la pression des
faits. Ce pas a eu un succs surprenant et a plus contribuŽ au dŽveloppement
des consciences ouvrires qu'un quelconque ŽvŽnement de ces vingt, dernires
annŽes.
Or, quelle a ŽtŽ
l'attitude des Fabians ‑ non pas de tel ou tel d'entre eux, mais de la
SociŽtŽ fabienne dans son ensemble ? Ils prchrent et pratiqurent le
ralliement des ouvriers aux LibŽraux, et il arriva
ce qui devait arriver : les LibŽraux attriburent aux Fabians quatre
siges absolument impossibles ˆ conquŽrir, et les candidats fabians furent battus
avec Žclat. Le littŽrateur des paradoxes, Shaw ‑ Žcrivain au reste plein
de talent et d'humour, mais absolument incapable en Žconomie et en politique,
mme s'il est parfaitement honnte et dŽpourvu d'ambition ‑, Žcrivit ˆ
Bebel : s'ils n'avaient pas suivi cette politique, ˆ savoir d'imposer
leurs candidats aux LibŽraux, ils n'eussent rŽcoltŽ que la dŽfaite et la honte
(comme si la dŽfaite n'Žtait pas, bien souvent, plus honorable que la victoire)
‑ et maintenant ils ont suivi leur politique et ont rŽcoltŽ les deux.
Tel est le noyau
de toute la question. Au moment o, pour la premire fois depuis longtemps, les
ouvriers manifestent leur indŽpendance, la SociŽtŽ fabienne leur prche de
continuer ˆ former la queue des LibŽraux. Et c'est ce qu'il faut dire
ouvertement aux socialistes du continent : travestir cette vŽritŽ
reviendrait ˆ partager sa responsabilitŽ. Et c'est pourquoi j'ai ŽtŽ peinŽ de
constater que l'article postŽrieur aux Žlections des Aveling n'ait pas ŽtŽ
publiŽ [37]. Il ne s'agissait pas de rŽflexions faites aprs coup, ni d'un
article b‰clŽ ˆ toute vitesse au dernier moment. L'article n'est pas complet
s'il n'explique pas l'attitude de ces deux organisations socialistes au cours
des Žlections ‑ et les lecteurs de la Neue Zeit Žtaient en droit de l'apprendre.
Je crois t'avoir
dit dans ma dernire lettre que, dans la FŽdŽration social-dŽmocrate aussi bien
que dans la SociŽtŽ fabienne, les membrŽs de la province Žtaient meilleurs que
ceux des organisations centrales. Mais cela ne sert de rien, tant que la
position des organismes centraux dŽtermine celle de la SociŽtŽ. De tous les
autres fameux membres ‑ hormis Banner ‑, aucun ne m'est connu. Comme
par hasard, Banner n'est plus venu me voir une seule fois depuis qu'il est
entrŽ dans la SociŽtŽ fabienne. Je suppose que ce lui l'a poussŽ ˆ y adhŽrer,
c'est qu'il a ŽtŽ dŽgožtŽ de la FŽdŽration social-dŽmocrate et Žprouvait le
besoin d'une autre organisation, tout cela s'accompagnant de pas mal
d'illusions. Mais cette hirondelle ne fait pas le printemps.
Il y a, ˆ bien
la considŽrer, quelque chose d'inachevŽ dans la SociŽtŽ fabienne ; en
revanche, ses adhŽrents sont compltement achevŽs : une clique de Ç socialistes È bourgeois de tous
les calibres, depuis l'ambitieux au socialiste par instinct et philanthrope,
soudŽs uniquement par leur peur de la menace croissante d'une domination
ouvrire et unissant tous leurs forces ,pour briser la pointe ˆ cette menace en
prenant sa direction, une direction de gens Ç cultivŽs È. Mme s'ils
admettent ensuite une paire d'ouvriers dans leur Conseil central pour y jouer
le r™le de l'ouvrier Albert de 1848, en Žtant constamment en minoritŽ dans les
votes, cela ne devrait tromper personne.
Les moyens
qu'emploie la SociŽtŽ fabienne sont tout ˆ fait ceux de la politique
parlementariste pourrie : vŽnalitŽ, nŽpotisme, arrivisme, c'est-ˆ-dire des
moyens anglais, d'aprs lesquels il va de soi que tout parti politique (ce n'est
que chez les ouvriers qu'il doit en tre autrement) rŽmunre ses agents de
telle ou telle faon ou les paie en leur offrant des postes. Ces gens sont
enfoncŽs jusqu'au cou dans les combines avec les LibŽraux ou ont des fonctions
dans le parti libŽral, comme par exemple Sidney Webb qui, en tous points, est
un authentique politicien britannique. Tout ce contre quoi il faut prŽvenir les
ouvriers, ces gens le pratiquent.
Cela Žtant, je
ne te demanderais pas forcŽment de traiter ces gens en ennemis. Mais, ˆ mon
avis, tu ne dois pas t'abstenir davantage de les critiquer, fais donc pour eux
ce que tu ferais pour n'importe quel autre. Or, c'est le contraire que
suggŽrait l'Žlimination des passages, dont je t'ai envoyŽ la copie, de
l'article des Aveling [38]. Si tu dŽsires que les Aveling t'envoient un article sur l'histoire
et les positions des diverses organisations socialistes d'Angleterre, il suffit
que tu le dises, et je leur proposerai.
Ton article sur
Vollmar m'a beaucoup plu. Il lui fera plus d'effet que toutes les chamailleries
dans le VorwŠrts. De mme, l'Žternelle menace de
le ficher dehors ne devrait pas rester plus longtemps sans effets. II s'agit lˆ
de rŽminiscences ‑ aujourd'hui dŽpassŽes ‑ de l'Žpoque de dictature
de la loi antisocialiste. On peut, aujourd'hui, laisser le temps aux ŽlŽments
corrompus de pourrir jusqu'au point o ils tombent d'eux-mmes. Un parti
groupant des millions de personnes a une tout autre discipline qu'une secte de
centaines de membres. Ce que tu aurais pu expliciter davantage dans ton
article, c'est comment Ç le socialisme d'ƒtat en soi È se transforme nŽcessairement
dans la pratique en fiscalitŽ [39], surtout dans le seul pays o il soit pratiquement possible, en
Prusse (ce que tu as fort bien dŽveloppŽ).
De mme, la
critique que Bernstein a faite de Proudhon Žtait excellente, je me rŽjouis
surtout de voir qu'il est redevenu ce qu'il Žtait [40].
Corruption
des chefs ouvriers
Ce qu'Aveling
vient de me communiquer oralement me confirme dans le soupon que j'avais
depuis longtemps, ˆ savoir que Keir Hardie aspire en silence ˆ diriger le
nouveau parti de manire dictatoriale, ˆ la manire de Parnell vis-ˆ-vis des
Irlandais, tandis que ses sympathies s'orientent plut™t vers le parti
conservateur que le parti libŽral [41]. N'affirme-t-il pas publiquement qu'ˆ l'occasion des prochaines Žlections
il faut renouveler l'expŽrience de Parnell, afin d'amener Gladstone ˆ se plier
ˆ une nouvelle politique, et qu'ˆ chaque fois qu'on ne peut prŽsenter une
candidature ouvrire, il faut voter pour les Conservateurs, afin de .montrer sa
force aux LibŽraux [42]. Or, c'est lˆ une politique que, dans certaines circonstances, j'ai
demandŽ moi-mme aux Anglais de pratiquer, mais si, d'emblŽe, on ne considre
pas cela comme un coup tactique possible, et on proclame ˆ l'avance que c'est
une tactique ˆ suivre dans tous les cas, on y
flaire un fort relent ˆ la Champion [43].
On le sent
notamment lorsqu'en mme temps K. Hardie parle avec mŽpris de l'extension du
suffrage universel et d'autres rŽformes, gr‰ce auxquelles seulement les votes
ouvriers auront une rŽalitŽ, comme s'il s'agissait de simples choses politiques
qui viennent bien aprs les revendications sociales, les huit heures, la
protection ouvrire, etc. En disant cela, il laisse dŽlibŽrŽment de c™tŽ la
question de savoir comment il veut obtenir ces revendications sociales,
puisqu'il renonce ˆ les obtenir par la force que
reprŽsentent les dŽputŽs ouvriers, et ne compte plus que sur la gr‰ce des
bourgeois, voire sur la pression indirecte des voix ouvrires dŽcisives dans
les Žlections. J'attire ton attention sur ce point obscur, afin que tu en
tiennes compte ˆ l'occasion. Pour l'heure, je n'attribue pas une importance
exagŽrŽe ˆ cette affaire, Žtant donnŽ que Keir Hardie, dans le pire des cas,
fait une grossire erreur de calcul, car les ouvriers des districts industriels
du nord de l'Angleterre ne sont pas des moutons que lÕon amne aux urnes pour
voter en bloc sans parler de ce qu'il se heurtera ˆ une rŽsistance suffisante
au comitŽ exŽcutif. Mais il ne faut pas ignorer une telle tendance.
Keir Hardie
vient ici d'intervenir au Parlement en faveur des ch™meurs, en prŽsentant un
amendement ˆ l'Adresse (rŽponse au discours du tr™ne) [44]. En soi, c'Žtait tout ˆ fait bien, mais il a fait deux gaffes
Žnormes : 1. Si l'amendement Žtait conu comme vote direct de mŽfiance, il Žtait tout ˆ fait vain, puisque son adoption aurait forcŽ le
gouvernement ˆ se retirer, et toute lÕaffaire aurait profitŽ aux Conservateurs ;
2. Il se fit seconder par le conservateur de tendance protectionniste Howard
Vincent, au lieu de choisir un reprŽsentant ouvrier, ce qui en faisait
compltement une manÏuvre conservatrice et le prŽsentait mme comme une
marionnette entre les mains des Conservateurs. De fait aussi, 102 conservateurs
et seulement 2 radicaux-libŽraux [45] ont votŽ pour lui, et pas un seul reprŽsentant ouvrier. Pour sa
part, Burns faisait de l'agitation dans le Yorkshire.
Comme je te l'ai
dŽjˆ Žcrit, depuis la ConfŽrence de Bradford, il a dŽjˆ fait plusieurs
manÏuvres et dŽclarations o perce l'influence de Champion : maintenant,
cela devient encore plus suspect. On ne sait d'o il tire ses moyens
d'existence, et il a dŽpensŽ beaucoup d'argent ces deux dernires annŽes :
quelle en est l'origine ? Au reste, les ouvriers anglais exigent de leurs
dŽputŽs ou dirigeants qu'ils sacrifient tout leur temps au mouvement, mais ils
ne veulent pas les payer, de sorte qu'ils sont eux-mmes responsables
lorsqu'ils tirent d'autres partis l'argent qu'il leur faut pour vivre ou pour
prŽparer les Žlections. Tant que cela durera, il y aura des trafics parmi les
dirigeant ouvriers de ce pays.
Le Parti
travailliste indŽpendant est tout ˆ fait indŽcis dans le choix de sa tactique,
et son dirigeant, Keir Hardie, un ƒcossais, un super-malin, utilise des
artifices dŽmagogiques auxquels on ne peut absolument pas faire confiance [46]. Bien que ce soit un pauvre diable de mineur Žcossais, il vient de
crŽer un grand hebdomadaire, The Labour Leader,
pour lequel il a eu besoin de pas mal d'argent. Or, cet argent lui est venu des
milieux conservateurs, voire des libŽraux-unionistes, soit de ceux qui
s'opposent ˆ Gladstone et ˆ sa loi sur le Home Rule. Cela ne fait absolument aucun doute, et ses liaisons littŽraires
notoires de Londres, les informations directes qu'il publie, ainsi que ses positions
politiques, le confirment. En consŽquence, si les Žlecteurs irlandais et
radicaux le laissent tomber, il se peut fort bien qu'il perde son sige au
Parlement lors des Žlections gŽnŽrales de 1895 [47], et ce serait une bonne chose, car cet homme est actuellement un
trs grand obstacle. Il n'appara”t que dans les occasions dŽmagogiques au
Parlement : pour faire l'important avec des discours sur les ch™meurs,
sans obtenir le moindre rŽsultat, ou pour dire des sottises ˆ l'occasion de la
naissance d'un prince, ce qui est un truc tout ˆ fait usŽ et bon marchŽ dans ce
pays, etc.
CrŽation
de la IIe Internationale
Nous avons
rŽflŽchi ˆ ta proposition, et nous pensons que le moment n'est pas encore venu
de la mettre en exŽcution, mais qu'il approche [48].
Premirement,
une nouvelle Internationale, formellement rŽorganisŽe, ne ferait que susciter
de nouvelles persŽcutions en Allemagne, Autriche, Hongrie, Italie et Espagne,
et ne nous laisserait finalement que le choix entre laisser tomber l'affaire
bient™t ou l'entreprendre secrtement. Ce dernier procŽdŽ serait un malheur ˆ
cause des inŽvitables vellŽitŽs de conspiration ou de putsch, ainsi que les
inŽvitables mouchards qui s'infiltreraient dans nos rangs. Mme en France, il
n'est pas impossible que la loi contre l'Internationale, qui n'a nullement ŽtŽ
abolie, entre de nouveau en application.
Deuximement,
Žtant donnŽ les actuelles chamailleries entre L'ƒgalitŽ et Le ProlŽtaire, il n'est pas
possible de compter sur les Franais. Il faudrait, en effet, se dŽclarer pour
l'un des partis, ce qui a aussi ses mŽchants c™tŽs. En ce qui nous concerne
personnellement, nous sommes du c™tŽ de L'ƒgalitŽ, mais nous nous gardons bien d'intervenir publiquement en ce
moment, ne serait-ce que, malgrŽ nos avertissements
exprs, parce qu'elle fait gaffe sur gaffe sur le plan tactique.
Troisimement,
moins que jamais on ne saurait actuellement entreprendre quelque chose avec les
Anglais. Durant cinq mois, j'ai tentŽ, par le truchement du Labour Standard, dans lequel j'ai Žcrit une sŽrie d'Žditoriaux, de renouer avec le
vieux mouvement chartiste et de diffuser nos idŽes, afin de voir s'il y a
quelque Žcho. Absolument rien ! Cependant, comme le directeur [49] ‑ plein de bonne volontŽ, mais faible, une vŽritable
savate ! ‑finit tout de mme par prendre peur des doctrines
Ç hŽrŽtiques È provenant du continent que j'Žcrivais dans sa feuille,
je dus renoncer.
Il ne resterait
donc plus qu'une Internationale qui ‑ en dehors de la Belgique ‑ se
limiterait ˆ la seule Žmigration, puisqu'ˆ l'exception
de Genve et de ses environs on ne pourrait pas compter non plus sur les
Suisses ‑ vois la Arbeiterstimme et BŸrckli.
Au demeurant,
l'Internationale continue effectivement de subsister. La liaison entre les ouvriers rŽvolutionnaires de tous les pays,
pour autant qu'elle puisse tre efficace, est lˆ. Chaque journal socialiste est
un centre socialiste ; de Genve, Zurich, Londres, Paris, Bruxelles,
Milan, les fils courent et se croisent dans toutes les directions, et je ne
vois vraiment pas en quoi le regroupement de tous ces petits centres autour
d'un grand centre principal pourrait donner une force nouvelle au mouvement,
cela ne ferait qu'augmenter les frictions. NŽanmoins, lorsque le moment sera
venu o il importera de rassembler les forces, pour toutes ces raisons, il ne
faudra pas une longue prŽparation.
Les noms de tous
ceux qui forment l'avant-garde militante d'un pays sont connus de tous les
autres, et un manifeste dans lequel tous seraient reprŽsentŽs et que tous
signeraient ferait une impression colossale, toute diffŽrente de celle que fit
celui o figuraient les noms, pour la plupart inconnus, de l'ancien Conseil
gŽnŽral. Mais, prŽcisŽment pour toutes ces raisons, il faut ne pas galvauder
une telle manifestation tant qu'elle ne peut avoir un effet percutant,
autrement dit tant que des ŽvŽnements europŽens ne la provoqueront pas. Sinon,
on g‰che l'effet pour l'avenir et on ne donne qu'un coup d'ŽpŽe dans l'eau.
Or, de tels ŽvŽnements
se prŽparent en Russie, o l'avant-garde de la rŽvolution trouvera ˆ frapper un
grand coup. Cela et son contre-coup inŽvitable en Allemagne, il faut savoir
l'attendre, et ‑ ˆ notre avis ‑le moment sera venu alors aussi pour
une grande manifestation et la reconstitution d'une Internationale formelle,
officielle, qui justement ne saurait plus tre une simple sociŽtŽ de
propagande, mais un parti pour l'action. C'est pourquoi nous sommes dŽcidŽment
de l'avis qu'il ne faut pas affaiblir un organe de lutte aussi remarquable, en
en usant (et en abusant) ˆ une Žpoque encore relativement tranquille, mais ˆ la
veille de la rŽvolution.
Je pense que si
tu rŽflŽchis une nouvelle fois ˆ la chose, tu te rangeras ˆ notre avis.
Jusque-lˆ, je vous souhaite ˆ tous deux un bon rŽtablissement, et j'espre
avoir bient™t des nouvelles de toi m'annonant que tu es ˆ nouveau tout ˆ fait
en forme.
Ton fidle F. E.
L'essentiel
[dans la crŽation de la IIe Internationale], et cela a ŽtŽ pour moi
le motif pour entrer dans le jeu, c'est que rŽappara”t la vieille coupure de
l'Internationale, la vieille bataille de La Haye [50]. Les adversaires sont les mmes, sauf que l'enseigne anarchiste est
changŽe pour l'enseigne possibiliste : commerce des principes avec la bourgeoisie
contre des concessions de dŽtail, et surtout contre des postes bien payŽs pour
les chefs (conseillers municipaux, bourses du travail, etc.). La tactique est
tout ˆ fait la mme. Le manifeste de la Social Democratic Federation, Žvidemment Žcrit par Brousse, est une rŽŽdition de la circulaire
de Sonviliers. Brousse le sait fort bien : il attaque le marxisme
autoritaire, toujours avec les mmes mensonges et calomnies,
et Hyndman l'imite ‑ ses sources principales concernant l'Internationale
et l'action politique de Marx, ce sont les mŽcontents de l'ancien Conseil
gŽnŽral, Eccarius, Jung et Cie...
Il m'a cožtŽ des
peines infinies pour faire comprendre mme ˆ Bebel de quoi il s'agit
vŽritablement, alors que les possibilistes le savent trs bien et le proclament
tous les jours. Au milieu de toute cette agitation, j'avais peu d'espoir de
voir les choses prendre une bonne tournure, que la raison immanente qui se
dŽveloppe peu ˆ peu en conscience puisse vaincre maintenant.
Je me rŽjouis
d'autant plus d'avoir la preuve que, tout de mme, des choses comme celles qui
sont arrivŽes en 1873 et 1874 ne sont plus possibles. Les intrigants sont
d'ores et dŽjˆ battus, et l'importance du congrs ‑ qu'il attire l'autre
ˆ lui ou non ‑ rŽside en ce que l'unanimitŽ des partis socialistes
d'Europe est manifeste aux yeux du monde entier et que quelques brouillons qui
ne se soumettent pas resteront ˆ la porte, au frais.
Au demeurant, le
congrs ne doit gure avoir d'importance. Je n'y assisterai pas
naturellement ; je ne puis continuellement me relancer dans l'agitation.
Mais les gens veulent maintenant recommencer ˆ jouer aux congrs et alors il
vaut mieux qu'ils ne soient pas dirigŽs par Brousse et Hyndman. Il Žtait tout
juste encore temps de leur mettre des b‰tons dans les roues...
Parti de
masse :
question agraire et petite bourgeoisie
Aprs dix-sept
ans d'absence, j'ai retrouvŽ l'Allemagne totalement rŽvolutionnŽe, l'industrie
a crž immensŽment par rapport ˆ ce qu'elle Žtait alors, et l'agriculture ‑
petite comme grande ‑ s'est considŽrablement amŽliorŽe [51]. Et en consŽquence de tout cela, notre mouvement est
remarquablement en train. Nos gens ont dž conquŽrir eux-mmes le peu de libertŽ
dont ils disposent : ils l'ont conquis notamment contre la police et
l'administration de district, aprs que les lois
correspondantes Žtaient dŽjˆ proclamŽes sur le papier. C'est pourquoi tu y trouves
une assurance et une confiance en soi que l'on ne rencontre jamais chez les
bourgeois allemands. En ce qui concerne les dŽtails, il reste, bien sžr, encore
beaucoup ˆ critiquer ‑ par exemple, la presse du parti n'est pas ˆ la
hauteur du parti, notamment ˆ Berlin. Mais les masses sont remarquables, et le
plus souvent meilleures que les chefs ou, du moins, que bon nombre d'entre ceux
qui sont parvenus ˆ une fonction dirigeante. Avec elles, tout peut tre
fait ; elles ne se sentent heureuses que dans la lutte, elles ne vivent
que pour la lutte et se languissent lorsque l'adversaire ne leur procure pas de
travail. C'est un fait rŽel que la plupart des ouvriers salueraient une
nouvelle loi antisocialiste avec un Žnorme rire de mŽpris, si ce n'est avec une
joie rŽelle, car ils auraient alors ˆ faire chaque jour quelque chose de
nouveau.
Pour
rŽjouissants que soient pour moi les signes de la rŽvolution qui a transformŽ
la ville de Barmen du temps de ma jeunesse, ce petit nid de philistins, en une
grande citŽ industrielle, ce qui me touche le plus cependant, c'est le fait que
les hommes aussi se soient considŽrablement transformŽs ˆ leur avantage. En
effet, si ce n'Žtait pas le cas, Barmen serait, aujourd'hui encore, reprŽsentŽe
au Reichstag par un ultra-conservateur, il n'y serait pas question d'une
association social-dŽmocrate, et il serait encore moins venu ˆ l'idŽe des
ouvriers de Barmen de m'honorer comme ils l'ont fait. Mais, heureusement, la
rŽvolution matŽrielle dans la ville correspond aussi ˆ la rŽvolution dans la
tte des ouvriers, et celle-ci recle une rŽvolution encore plus immense et
radicale dans tout l'ordre social.
Il est
remarquable combien toutes ces Ç couches cultivŽes È sont enfermŽes
dans leur cercle social [52]. Ces bavards du centre et de la libre pensŽe. qui restent encore
maintenant dans l'opposition, reprŽsentent les paysans, les petits-bourgeois,
voire parfois les ouvriers. Et chez ceux-ci, la colre contre les charges
fiscales croissantes ainsi que la presse vŽnale existe indubitablement. Mais
cette colre populaire est transmise ˆ messieurs les reprŽsentants du peuple
par le truchement des couches cultivŽes ‑ avocats, curŽs, commerants,
professeurs, docteurs, etc. ‑, c'est-ˆ-dire des gens qui, en raison de
leur instruction plus universelle, voient un tout petit peu plus loin que les
masses du parti, ont appris suffisamment pour savoir qu'un grand conflit entre
le gouvernement et nous broiera tout ce monde, ce qui explique qu'ils veulent
transmettre aux gens du Reichstag une colre populaire attŽnuŽe ‑ sous
forme uniquement de compromis.
Naturellement,
ils ne voient pas que cette faon de renvoyer ˆ
plus tard les conflits pousse les masses vers nous, et nous donne donc la force
de mener le conflit jusqu'au bout, lorsqu'il viendra.
Assimilation de couches
non prolŽtariennes dans le parti
Les
chamailleries dans le parti ne m'affligent gure il vaut mieux que ces choses
arrivent de temps en temps et Žclatent carrŽment une bonne fois, plut™t que de
voir les gens s'endormir [53]. C'est prŽcisŽment l'extension toujours croissante et irrŽsistible
du parti qui fait que les derniers venus sont plus difficiles ˆ digŽrer que les
prŽcŽdents. N'avons-nous pas dŽjˆ dans nos rangs les ouvriers des grandes
villes, qui sont les plus intelligents et les plus Žveilles ? En
consŽquence, ceux qui arrivent maintenant sont ou bien les ouvriers des petites
villes et des districts ruraux ou bien des Žtudiants, petits employŽs, etc., ou
enfin des petits-bourgeois et artisans campagnards qui luttent contre le dŽclin
et possdent en propre ou en bail un petit bout de terre et, ˆ prŽsent,
par-dessus le marchŽ encore, de vŽritables petits paysans.
Il se trouve que
notre parti est le seul qui soit encore authentiquement de progrs et, en mme
temps, soit assez puissant pour imposer de force le progrs, de sorte que les
gros et moyens paysans endettŽs et en rŽbellion sont tentŽs de t‰ter un peu du
socialisme, notamment dans des rŽgions o ils prŽdominent ˆ la campagne.
Ce faisant,
notre parti dŽpasse sans doute largement les limites de ce que permettent les
principes, et cela suscite polŽmiques, mais notre parti a une constitution
assez saine pour qu'elles ne lui soient pas nŽfastes.
Nul n'est assez
bte pour vouloir sŽrieusement se sŽparer de la grande masse du parti, et nul
n'est prŽtentieux au point de croire qu'il pourrait constituer encore un petit
parti privŽ, semblable ˆ celui du Parti populaire souabe [54] qui, avec beaucoup de chance, avait rŽussi ˆ rassembler sept
Souabes sur onze. Toutes ces chamailleries ne feront que causer des dŽceptions
aux bourgeois qui escomptent une scission depuis vingt ans dŽjˆ, mais font en
mme temps tout ce qu'il faut pour nous l'Žviter. De mme, ˆ prŽsent, pour le
projet de loi rŽprimant la presse socialiste, o Liebknecht a l'occasion de
dŽfendre les droits du Reichstag et de la Constitution face aux menaces de
coups d'ƒtat et de violation des droits. Nous faisons certainement aussi pas
mal de btises, mais pour permettre ˆ de tels adversaires de nous vaincre, il
faudrait vraiment que nous fassions des gaffes grosses comme des montagnes,
gaffes que tout lÕor du monde ne serait pas en mesure d'acheter.
Au reste, ton
plan de cŽder ˆ l'occasion la direction du parti ˆ la jeune gŽnŽration afin
qu'elle s'aguerrisse n'est pas si mauvais. Mais elle arrivera aussi ˆ acquŽrir
de l'expŽrience et ˆ dŽvelopper sa conscience sans cela.
Cher Liebknecht,
J'ai Žcrit ˆ
Bebel, et je lui fais comprendre que, dans les dŽbats politiques, il fallait
rŽflŽchir posŽment ˆ toutes les incidences possibles des questions et ne rien
faire dans la h‰te, dans le premier Žlan ; il m'est ainsi arrivŽ ˆ
moi-mme de me bržler les doigts ˆ plusieurs reprises [55]. En revanche, j'ai ˆ te faire ˆ ce propos une petite observation.
Que Bebel ait
agi maladroitement au cours de la rŽunion, cela
se discute, mais en substance il a tout ˆ fait raison [56]. AssurŽment, comme responsable politique de l'organe central de la
presse, tu es tenu ˆ arrondir les angles, voire ˆ nier les divergences rŽelles
qui peuvent survenir [57], ˆ rendre les choses acceptables pour tous les c™tŽs, ˆ agir pour
l'unitŽ au sein du parti, jusqu'au jour de la scission. Du point de vue du
journaliste, la manire de procŽder de Bebel peut te heurter. Mais ce qui peut
tre dŽsagrŽable au rŽdacteur devrait combler d'aise le dirigeant de
parti : ˆ savoir qu'il y ait des camarades ne portant pas toujours sur le
nez les lunettes de service que doit absolument porter le rŽdacteur, pour
rappeler au journaliste qu'en sa qualitŽ de dirigeant de parti, c'est une
excellente chose qu'il enlve de temps en temps ses lunettes qui lui font voir
l'harmonie pour considŽrer l'univers avec ses yeux, tout simplement.
Les Bavarois ont
constituŽ formellement une ligue ˆ part ˆ Nuremberg [58], et se sont prŽsentŽs en tant que corps sŽparŽ devant le Congrs de
Francfort. Ils y sont arrivŽs avec un ultimatum
et nul ne pouvait s'y tromper. Pour complŽter le tout, Vollmar parle de
marcher sŽparŽment, Grillo [59] dit : dŽcidez ce que vous voulez, nous n'obŽirons pas. Ils proclament que les Bavarois
ont des droits particuliers, rŽservŽs, et dans le parti traitent leurs
adversaires de Ç Prussiens È, de Ç Berlinois È [60]. Ils rŽclament que nous votions le budget et une politique paysanne
allant bien au-delˆ de la droite, en direction petite-bourgeoise. Le congrs,
au lieu de brandir Žnergiquement le b‰ton, comme il l'a toujours fait
jusqu'ici, n'a pas osŽ prendre la moindre sanction. Si dans ces conditions, et
comme l'a fait Bebel, le moment n'est pas venu de parler de pŽnŽtration
d'ŽlŽments petits-bourgeois dans le parti, je me demande quand il viendra
jamais.
Or, que fais-tu
dans le VorwŠrts ? Tu t'accroches ˆ la
forme de l'attaque de Bebel pour affirmer que tout cela n'est pas bien grave.
NŽanmoins, tu te places, face ˆ lui, en une Ç opposition diamŽtrale È
si forte que tu es contraint par les Ç malentendus È, suscitŽs
inŽvitablement par cette situation chez les adversaires de Bebel, ˆ faire une dŽclaration
selon laquelle ton Ç opposition diamŽtrale È ne porte que sur la forme
donnŽe par Bebel ˆ sa polŽmique, et que sur le fond
‑ l'histoire du budget et la question paysanne ‑ il a raison et que
tu te ranges ˆ ses c™tŽs. Je veux croire que le simple fait que tu aies ŽtŽ
contraint postŽrieurement ˆ cette dŽclaration prouve
ˆ tes yeux aussi que tu as fautŽ plus ˆ droite que Bebel n'a fautŽ ˆ
gauche [61].
Dans toute la
polŽmique, il ne s'agit en fin de compte que de l'action des Bavarois qui
culmine dans les deux points suivants : l'opportunisme de la propagande de
Vollmar en faveur de la ratification du budget afin d'attraper les
petits-bourgeois, et la propagande de Vollmar ˆ la Dite en faveur de la
propriŽtŽ paysanne afin d'attraper les gros et moyens paysans. Cela et la prise
de position des Bavarois pour une ligue sŽparatiste reprŽsentent, en fait, les
seules questions du litige, et si Bebel lance son attaque lˆ o le congrs a
l‰chŽ le parti, vous devriez lui en tre reconnaissant [62]. S'il dŽcrit la situation intolŽrable crŽŽe par le congrs comme
Žtant la consŽquence d'une mainmise croissante de la petite bourgeoisie sur le
parti, il ne fait qu'expliquer cette question particulire par le juste point
de vue gŽnŽral, et cela est encore mŽritoire et vaut d'tre saluŽ. Mme si le
ton des dŽbats sur toutes ces questions a ŽtŽ forcŽ il n'a fait que son strict
devoir, en Žtant prŽoccupŽ de ce que le prochain congrs juge en pleine
connaissance de cause en une matire si essentielle, aprs qu'ˆ Francfort il se
fut comportŽ ˆ ce, sujet comme une bourrique.
La menace d'une
scission n'est pas du c™tŽ de Bebel qui appelle les choses par leur vŽritable
nom. Elle est du c™tŽ des Bavarois qui se sont permis d'agir d'une faon
inconcevable jusqu'ici dans le parti, au point que la Frankfurter Zeitung de la dŽmocratie vulgaire n'a pu dissimuler sa joie en
reconnaissant les siens en Vollmar et ses
partisans.
Tu prŽtends que
Vollmar n'est pas un tra”tre. Cela se peut. Je ne pense pas non plus qu'il se
considre comme tel. Mais comment appeler un homme qui se figure qu'un parti
prolŽtarien garantit ˆ perpŽtuitŽ aux gros et moyens paysans de Bavire,
possŽdant de 10 ˆ 30 hectares, leur condition actuelle qui reprŽsente la base
de l'exploitation des domestiques de ferme et des journaliers agricoles. Un
parti prolŽtarien, fondŽ spŽcialement pour perpŽtuer l'esclavage
salarial ! Que cet homme soit un antisŽmite un dŽmocrate bourgeois, un
particulariste bavarois ou Dieu sait quoi encore, c'est possible, mais un
social-dŽmocrate, non ! Au reste, l'accroissement de l'ŽlŽment
petit-bourgeois est inŽvitable dans un parti ouvrier en expansion, et cela
n'est pas vraiment nuisible. Il en va de mme pour les Ç universitaires È,
les Žtudiants ayant ratŽ leurs examens, etc. Tout ce monde reprŽsentait une
menace il y a quelques annŽes. Maintenant, nous pouvons les digŽrer. Mais
encore faut-il laisser ce procs de digestion suivre son cours. Il faut pour
cela des sucs digestifs. S'il n'y en a pas assez (comme on l'a constatŽ ˆ
Francfort), il faut remercier Bebel s'il les y ajoute, afin que nous puissions
digŽrer comme il faut les ŽlŽments non prolŽtariens.
C'est
prŽcisŽment de la sorte qu'on rŽalise la vŽritable harmonie dans le parti, et
non pas en niant ou en tuant par le silence toute controverse rŽelle qui surgit
dans son sein.
Tu affirmes
qu'il s'agit de Ç susciter l'action efficace È. Cela me fait trs
plaisir, mais dis-moi quand donc l'action sera-t-elle dŽclenchŽe [63] ?
Tu trouveras
ci-inclus le discours de Bebel ˆ Berlin et ses quatre articles contre
Grillenberger et Vollmar [64]. Ce dernier Žpisode est des plus intŽressants. Les Bavarois (ou
mieux la plupart des dirigeants et une grande partie des effectifs rŽcents),
qui sont devenus trs, trs opportunistes, et constituent pratiquement dŽjˆ un parti populaire ordinaire, ont approuvŽ l'ensemble du
budget ˆ la Dite bavaroise, et Vollmar notamment a lancŽ une agitation auprs
des paysans pour attraper non pas les journalistes et ouvriers agricoles, mais
les gros paysans possŽdant de 25 ˆ 80 acres de terre (10 ˆ 30 hectares) qui
ne peuvent donc s'en tirer sans travailleurs salariŽs. Comme ils n'attendaient rien de bon du Congrs social-dŽmocrate de
Francfort, ils organisrent huit jours avant sa tenue
une rŽunion spŽciale du parti bavarois [65], et s'y constiturent littŽralement en ligue sŽparatiste, en dŽcidant
que les dŽlŽguŽs bavarois voteraient en bloc
d'aprs les rŽsolutions bavaroises, prises ˆ l'avance, sur toutes les questions
concernant la Bavire. Ils arrivrent donc en dŽclarant qu'ils Žtaient tenus d'approuver l'ensemble du budget de Bavire, car il n'y avait pas
autre chose ˆ faire, que c'Žtait lˆ, en outre, une question purement bavaroise,
dans laquelle personne d'autre n'avait ˆ s'immiscer. En d'autres termes :
si vous dŽcidez quelque chose de dŽsagrŽable pour la Bavire, vous rejetez
notre ultimatum, et s'il devait alors en rŽsulter une scission, ce serait de
votre faute !
C'est avec cette
prŽtention insolite jusqu'ici dans notre parti qu'ils se sont prŽsentŽs devant
les autres dŽlŽguŽs qui n'Žtaient pas prŽparŽs ˆ cette situation. Or, comme au
cours de ces dernires annŽes on a poussŽ jusqu'ˆ l'extrme les criailleries
pour l'unitŽ, il ne faut pas s'Žtonner que, face aux nombreux ŽlŽments qui sont
venus grossir nos rangs ces derniers temps et ne sont pas encore tout ˆ fait
formŽs, cette attitude inadmissible pour le parti ait pu passer sans recevoir
le refus clair et net qu'elle mŽritait, et qu'il n'y ait eu aucune rŽsolution
sur la question du budget.
Imagine-toi
maintenant que les Prussiens, qui forment la majoritŽ au congrs, veuillent
Žgalement tenir leur prŽ-congrs pour y dŽbattre de leur position vis-ˆ-vis des
Bavarois ou pour prendre ‑quel‑que autre rŽsolution liant les
dŽlŽguŽs prussiens, de sorte que tous ‑ majoritŽ aussi bien que minoritŽ ‑
votent en bloc pour ces rŽsolutions au Congrs gŽnŽral du parti : ˆ quoi
servirait ds lors encore les congrs gŽnŽraux ?
Bref, l'affaire
ne pouvait en rester lˆ, et Bebel a foncŽ dans le tas. Il a remis tout
simplement la question ˆ l'ordre du jour, et on est en train d'en dŽbattre en
ce moment. Bebel est de loin le plus clairvoyant et le plus profond de tous.
Voilˆ quelque quinze ans que je corresponds rŽgulirement avec lui, et nous tombons
presque toujours d'accord. Liebknecht, en revanche, est trs dessŽchŽ et peu
permŽable aux idŽes : le vieux dŽmocrate particulariste et fŽdŽraliste du
sud de l'Allemagne perce toujours encore chez lui, et ce qu'il y a de pire il
ne peut supporter que Bebel ‑ qui le dŽpasse depuis longtemps ‑
l'admette volontiers ˆ ses c™tŽs, certes, mais ne veuille plus se laisser
diriger par lui. En outre, il a si mal organisŽ l'organe central du VorwŠrts ‑
surtout parce qu'il est jaloux de son leadership,
ce qui l'amne ˆ vouloir tout diriger et, ne dirigeant rien en rŽalitŽ, ne fait
que causer du dŽsordre ‑ que ce journal, qui pourrait tre le premier ˆ
Berlin, est tout juste bon ˆ procurer 50 000 marks d'excŽdents au parti, mais
ne fait gagner aucune influence politique. Liebknecht veut naturellement ˆ
toute force jouer ˆ l'arbitre maintenant, et s'en prend ˆ Bebel, qui pour moi
finira par avoir raison. Ë Berlin, la direction ainsi que les ŽlŽments les meilleurs
sont dŽjˆ de son c™tŽ, et je suis persuadŽ que s'il en appelle ˆ la masse du
parti, il obtiendra la grande majoritŽ. Je voudrais aussi t'envoyer les
Žlucubrations de Vollmar, etc., mais je ne dispose que d'un exemplaire pour mon
usage propre.
Bebel a triomphŽ [66]. Vollmar a
commencŽ par rompre la discussion aprs les articles de Bebel, puis son appel ˆ
la direction a ŽtŽ repoussŽ avec Žnergie, enfin, lorsqu'il en a appelŽ ˆ la
fraction (parlementaire), celle-ci, que Bebel avait dŽclarŽ incompŽtente, a
reconnu son incompŽtence, de sorte que l'affaire sera inscrite ˆ l'ordre du
jour du prochain congrs, o Bebel est assurŽ d'avoir
une majoritŽ des deux tiers, voire les trois quarts.
C'est la
troisime campagne de Vollmar pour conquŽrir un poste dirigeant dans le parti
hors de Bavire. La premire fois, il avait demandŽ que nous apportions un
soutien actif ˆ Caprivi, en devenant des socialistes de gouvernement [67]. La seconde fois, il voulait nous transformer en socialistes
d'ƒtat, en secondant des expŽriences socialistes au sein de l'actuel Empire
allemand [68]. Les deux fois, il fut remis ˆ sa place, comme maintenant.
Ai-je besoin de
te dire que je me suis rŽjoui de l'intervention Žnergique de Bebel aprs le
morne Congrs de Francfort et, de mme, que Vollmar m'ait forcŽ indirectement ˆ
dire aussi mon petit mot dans l'affaire [69]. Nous avons effectivement triomphŽ sur toute la ligne. D'abord,
Vollmar a arrtŽ la polŽmique aprs les quatre articles de Bebel, ce qui reprŽsente
dŽjˆ un net recul ; puis il y eut le rejet, par la direction du parti et
de la fraction, de sa demande pour qu'elles tranchent ˆ la place du congrs.
Bref, Vollmar essuya une dŽfaite aprs l'autre dans sa malheureuse troisime
campagne. Cela suffirait ˆ dŽcourager mme un ancien zouave du pape. Dans cette
affaire, j'ai Žcrit deux lettres ˆ Liebknecht qui ne lui ont pas fait
plaisir [70]. L'homme devient de plus en plus une gne. Il prŽtend qu'il a les
nerfs les plus solides dans le parti : ils ne le sont que trop, mme son
discours d'avant-hier au Reichstag a ŽtŽ mauvais [71]. On semble d'ailleurs s'en tre aperu au gouvernement : on
veut manifestement le remettre en selle en le poursuivant a posteriori pour avoir insultŽ Sa MajestŽ.
Je n'ai jamais
dit que la masse de vos gens ne dŽsire pas de
science vŽritable. J'ai parlŽ du parti, et, ˆ mes yeux, celui-ci est ce pour
quoi il se donne dans la presse et les congrs [72]. Et lˆ, ce qui y domine, c'est maintenant la demi-science et
l'ancien ouvrier qui se gonfle d'tre littŽrateur. Si, comme tu l'affirmes, ces
gens ne forment qu'une infime minoritŽ, vous prenez alors tant d'Žgards
vis-ˆ-vis d'eux parce que chacun d'eux vous pla”t.
Le dŽclin
thŽorique et moral du parti date de la fusion [avec les lassallŽens], et on
aurait pu l'Žviter si l'on avait fait preuve ˆ ce moment d'un peu plus de
retenue et de raison. Un parti sain est capable d'exsuder pas mal de choses
avec le temps, mais c'est un processus long et difficile, et ce n'est pas parce
que les masses sont en bonne santŽ qu'il faut leur inoculer sans nŽcessitŽ une
maladie...
Bref, j'en ai
assez de cette confusion qu'entra”ne le lancement continuel d'affaires
irrŽflŽchies et prŽcipitŽes. Je ne peux accepter la moindre offre de
collaboration, ne serait-ce que parce qu'il faut que je termine une fois pour
toutes les travaux les plus importants. J'achve encore l'Anti-DŸhring, et ensuite je n'Žcrirai plus que des articles que je tiendrai
moi-mme pour urgents, et s'il y a une revue qui n'est pas un organe du parti,
je les lui donnerai afin de n'tre pas l'objet des dŽbats d'un congrs [73]. Il faut bien admettre qu'il n'y a pas de forum dŽmocratique pour
des travaux scientifiques. Cette expŽrience m'a suffi.
Je n'ai
Ç pas de ressentiment È – pour employer l'expression de Heine ‑,
et Engels pas davantage [74]. Tous deux nous n'attachons pas la moindre importance ˆ la
popularitŽ. La preuve en est, par exemple, que, par aversion pour le culte de
la personnalitŽ, du temps de l'Internationale, j'ai dŽjouŽ les nombreuses
manÏuvres entreprises dans les diffŽrents pays pour me faire tomber dans les
rets de la publicitŽ en m'importunant avec des Žloges, auxquels je n'ai jamais
rŽpondu, sauf lorsque c'Žtait inŽvitable, par un savon. Quand nous sommes
entrŽs pour la premire fois dans une sociŽtŽ secrte communiste [75], Engels et moi, nous ne l'avons fait qu'ˆ la condition que les
statuts Žcartent tout ce qui pouvait encourager la foi superstitieuse en
l'autoritŽ. Lassalle a agi plus tard en sens exactement inverse.
Or, les faits
qui se sont dŽroulŽs au dernier congrs du parti [76] sont vivement exploitŽs par les ennemis du parti ˆ
l'Žtranger ; en tout cas, ils nous ont obligŽs ˆ la prudence dans nos
rapports avec les Ç camarades de parti È en Allemagne.
Au reste, mon
Žtat de santŽ m'oblige ˆ utiliser le temps de travail autorisŽ mŽdicalement ˆ
l'achvement de mon ouvrage. [Le Capital] ;
et Engels, qui travaille ˆ divers ouvrages importants, continue d'envoyer des
contributions au VorwŠrts.
Presse thŽorique
Il serait
effectivement trs agrŽable de disposer d'une revue socialiste vŽritablement
scientifique [77]. Elle fournirait l'occasion de critiques et d'anticritiques ;
nous pourrions y dŽvelopper certains points thŽoriques, Žtaler l'ignorance
absolue des professeurs et assistants, et de la sorte nous pourrions en mme
temps Žclairer les esprits du public en gŽnŽral ouvriers aussi bien que
bourgeois.
Mais la revue de
Wiede [78] ne peut tre autre chose que pseudo-scientifique ; les bougres
ˆ demi cultivŽs et les littŽrateurs ˆ demi savants qui hantent la Neue Welt et le VorwŠrts, etc., constituent
nŽcessairement le gros de ses collaborateurs. L'absence de mŽnagements ‑
condition premire de toute critique ‑ est impossible en pareille compagnie.
En outre, faire sans cesse attention ˆ ce que ce soit toujours facile ˆ
comprendre, c'est Žcrire pour des ignorants. Peut-on s'imaginer une revue de
chimie dont la prŽmisse fondamentale serait l'ignorance du lecteur en
chimie ? Et, en faisant abstraction de tout cela, l'attitude des
collaborateurs de Wiede dans l'affaire DŸhring nous incite ˆ tre prudents et ˆ
nous tenir autant ˆ l'Žcart de ces messieurs que le permettent les conditions
politiques du parti. Leur devise semble tre la suivante : quiconque
critique son adversaire en l'engueulant a un bon tempŽrament ; quiconque
engueule l'adversaire en lui faisant une vŽritable critique est une personne
indigne.
Le malheur,
c'est tout bonnement que les n™tres ont un si pitre adversaire en
Allemagne [79]. S'il y avait simplement du c™tŽ bourgeois un seul esprit capable
et formŽ en Žconomie, il aurait t™t fait de leur rŽgler leur compte et d'amener
un peu de clartŽ dans leur propre confusion. Mais que peut-on attendre d'un
combat o, de part et d'autre, les seules armes sont les lieux communs et les
salades philistines ? Face aux Ç grands esprits È bourgeois en
Allemagne se dresse et se dŽveloppe un nouveau socialisme vulgaire allemand qui
se range dignement aux c™tŽs de l'ancien Ç socialisme vrai È de
1845 [80].
Je pense que je
rŽpondrai, premirement, qu'il m'est impossible de collaborer ˆ une revue
scientifique dont la rŽdaction est anonyme et dont les collaborateurs Žgalement
ne sont pas nommŽs. Les rŽsolutions de congrs [81], si respectables soient-elles sur le terrain de l'agitation
pratique, sont Žgales ˆ zŽro en science, et ne suffisent pas ˆ Žtablir le
caractre scientifique d'une revue, caractre qui ne s'instaure pas par dŽcret.
Une revue socialiste scientifique sans aucune orientation scientifique tout ˆ
fait dŽterminŽe est une absurditŽ, et face ˆ la grande diversitŽ, voire ˆ
l'indŽtermination des tendances qui fleurissent en Allemagne, il manque
jusqu'ici toute garantie pour que cette orientation nous convienne.
Je te remercie
vivement pour les nouvelles que tu me donnes ˆ propos de l'affaire
Sorge-Dietz [82]. Comme Sorge ne m'a pas Žcrit o en sont les tractations que tu as
menŽes, et qu'il faut que je le sache avant de pouvoir y intervenir moi-mme,
elles m'Žtaient prŽcieuses. L'Žditeur Dietz s'oriente trop exclusivement vers
les tirages de masse. S'il veut tre l'Žditeur des socialistes scientifiques,
il doit prŽvoir une section o trouveront place aussi des ouvrages qui
s'Žcoulent plus lentement. Sinon, il faut chercher un autre Žditeur. La
littŽrature vŽritablement scientifique ne peut se vendre par tirages de dix mille,
et l'Žditeur doit prendre les dispositions correspondantes...
Votre congrs
n'a pas ŽtŽ, cette fois-ci, aussi brillant que les prŽcŽdents [83]. Les dŽbats sur la question des traitements ont pris un tour peu
rŽjouissant, bien que je sois d'avis que Franais et Anglais n'eussent pas fait
mieux sur ce point, ce que Louise [Kautsky] ne
veut absolument pas admettre. J'en suis venu depuis longtemps ˆ la conviction
que l'on se heurte ici ˆ l'une des limites qu'assignent les conditions de vie
actuelles au champ de vision des ouvriers. Ceux-lˆ mmes qui ont trouvŽ tout
normal que leur idole Lassalle vive de ses propres moyens comme un sybarite
accusent Liebknecht qui, en tant que rŽdacteur rŽmunŽrŽ, se contente du tiers
de cet argent, bien que le journal rapporte cinq ˆ six fois plus [84]. ætre dŽpendant, mme d'un parti ouvrier, est un sort pŽnible.
Mme en faisant
abstraction de la question d'argent, pour quiconque a de l'initiative, c'est un
poste stŽrile que d'tre rŽdacteur d'un journal appartenant ˆ un parti. Marx et
moi, nous avons toujours ŽtŽ d'accord pour ne jamais accepter un tel emploi et
pour n'avoir qu'un journal pŽcuniairement indŽpendant, mme vis-ˆ-vis du
parti [85].
Votre
Ç Žtatisation È de la presse a les plus grands inconvŽnients,
lorsqu'elle est poussŽe trop loin. Dans le parti, il vous faut absolument une
presse qui ne soit pas directement dŽpendante de la centrale, voire du congrs,
autrement dit une presse qui soit en Žtat, sans tre brimŽe, de faire
opposition, au sein du programme et de la tactique adoptŽe, ˆ certaines
dŽmarches du parti, et mme qui, dans les limites des convenances de parti,
puisse soumettre librement le programme et la tactique ˆ la critique.
En tant que
direction du parti, vous devriez favoriser, voire susciter, une telle presse :
dans ce cas, vous gardez toujours plus d'influence morale sur elle que si elle
na”t ˆ moitiŽ contre votre volontŽ. Le parti
vient de grandir dans la ferme discipline qu'il s'est imposŽ jusqu'ici :
avec deux, trois millions et l'afflux d'ŽlŽments Ç cultivŽs È [86], il est nŽcessaire de laisser une marge de jeu plus grande que
celle qu'il convenait de lui donner jusqu'ici et qu'il Žtait mme utile de
tenir dans des limites trs Žtroites. Plus vite, vous et le parti, vous
prendrez vos dispositions pour modifier la situation en ce sens, mieux cela vaudra.
Et la premire mesure est une presse de parti formellement indŽpendante. Elle
na”tra certainement, mais il vaut mieux que vous la fassiez na”tre, et qu'elle
demeure, ds le dŽbut, sous votre influence morale, et ne surgisse pas en
opposition ˆ vous [87].
Ce Quarck fait
partie de cette demi-douzaine de jeune intellectuels qui gravitent dans le no
man's land entre notre parti et le socialisme de
chaire, en prenant bien soin d'Žviter tout risque qui les engagerait ˆ une
obligation vis-ˆ-vis de notre parti, tout en comptant bien rŽcolter tous les
avantages qui puissent se tirer d'une telle situation [88]. Ils font une intense propagande pour le socialisme impŽrial des
Hohenzollern (que Quarck a cŽlŽbrŽ en termes dithyrambiques),
pour Rodbertus contre Marx (Quarck a eu le front de m'Žcrire qu'il honorait Le
Capital en le plaant ˆ c™tŽ des Ïuvres du grand
Rodbertus dans sa bibliothque !), et surtout
l'un pour l'autre.
Bernstein
m'Žcrit qu'il a reu une lettre de Mehring, qui se plaint de ce que ni la Neue
Zeit ni le VorwŠrts ne
fassent la moindre mention de son article dirigŽ contre Richter, et qu'il en
Žtait de mme pour le reste de la presse du parti, et d'ajouter que c'Žtait impardonnable
et qu'il avait envie de se retirer de toute politique, etc. [89]. Je comprends que ces faons de procŽder social-dŽmocrates doivent
avoir un effet fatal sur un auteur qui s'adonne ˆ l'art littŽraire ‑ il
ne s'agit pas lˆ d'un reproche, car c'est non seulement la rgle, mais encore la
condition d'existence de la presse bourgeoise, mme littŽraire ‑, bref un
homme qui a grandi dans la presse qui n'est pas social-dŽmocrate.
Mais, sur ce
point, nous pourrions tous Žlever des plaintes, car cela est dŽjˆ arrivŽ ˆ toi,
ˆ moi, ˆ nous tous. Et nŽanmoins, si dŽsagrŽable que cela nous paraisse
parfois, j'estime que cette superbe indiffŽrence de notre presse est cependant
la marque de sa supŽrioritŽ et prŽsente les plus grands avantages. De toute
faon, les travaux de Mehring seront achetŽs et lus, mme si le VorwŠrts ne leur donne pas un coup de pouce, et il vaut mieux ne faire de la
publicitŽ pour rien du tout plut™t que pour toute la camelote des membres du
parti qui est tout de mme envoyŽe aux quatre coins du monde. Or, si l'on
mettait l'une en vedette, les fameuses convenances dŽmocratiques exigeraient
ensuite pour tous les autres Ç le mme droit pour tous È. Dans ces
conditions, je prŽfre encore l'ŽgalitŽ de droit dans l'absence de mention qui
me frappe moi aussi.
Mais ce que vous
pouvez faire, c'est de conclure un accord ˆ bas prix avec l'Žditeur de Mehring,
afin de passer rŽgulirement et souvent des annonces. Mais lˆ on se heurte de
nouveau ˆ cette incapacitŽ criante dans les affaires qui frappe les gens de
notre presse.
Ces jours-ci, je
suis tombŽ sur l'ouvrage de Mehring, La Social-dŽmocratie allemande (3e Ždition), et j'en ai relu la partie historique. Dans
son Capital et Presse, il s'en est tirŽ en tout
cas commodŽment en glissant sur l'Ç incident [90] È. Mais cela peut nous laisser
froids ; nous n'avons pas ˆ lui faire aprs coup de reproches qu'il
devrait toujours tra”ner derrire lui : c'est son affaire, et cela ne nous
regarde pas. Personnellement, j'aurais reconnu en toute franchise le tournant,
car, en soi, il n'y a lˆ absolument rien de bl‰mable, et l'on s'Žpargne
beaucoup de chamailleries, de mauvais sang et de temps.
Au reste, il
serait absurde qu'il envisage sŽrieusement de se retirer de la politique :
il ferait simplement plaisir ˆ ceux qui sont au pouvoir et aux bourgeois. En
effet, ses Žditoriaux dans la Neue Zeit sont
tout ˆ fait remarquables, et nous les guettons ˆ chaque fois avec aviditŽ. Il
ne faut pas laisser se rouiller un tel tranchant ou utiliser des littŽrateurs
miteux...
Passage ˆ la presse quotidienne
Vous aurez, avec
le temps, votre quotidien, mais l'essentiel c'est que vous le crŽiez
vous-mmes [91]. Du fait de votre lŽgislation de presse, il me semble que c'est un
grand pas de passer d'un hebdomadaire ˆ un quotidien ; celui-ci exige que
l'on ait les reins solides, car il vous met beaucoup plus ˆ la merci du
gouvernement que votre presse hebdomadaire, puisqu'il cherchera ˆ vous ruiner
financirement, avec les amendes et autres charges financires. C'est une fois
de plus la preuve de l'intelligence ‑ toujours trs grande lorsqu'il
s'agit de points de dŽtail ‑ de votre gouvernement. Les Prussiens sont
trop btes pour cela et ne font confiance qu'ˆ la force brutale. Quant ˆ vos
hommes d'ƒtat, ils ne sont btes que lorsqu'ils doivent entreprendre quelque
chose de grand. Je me demande si votre quotidien pourra tenir six mois envers
et contre les amendes, car s'il devait cesser de para”tre, la dŽfaite serait
difficile ˆ surmonter.
Mais, afin que
j'apporte aussi ma contribution aux Autrichiens, j'ai pensŽ qu'Žtant donnŽ que
mes piges pour les articles paraissant aux Žditions VorwŠrts aboutissent de toute faon immanquablement dans la caisse du parti allemand, tous les droits sur mes Žcrits publiŽs chez Dietz vous
reviendront, et j'ai donnŽ mes instructions en ce sens ˆ Dietz [92].
Bernstein Žtait
de passage ici et portait toutes sortes de lettres de K. Kautsky. Ë propos de
la Neue Zeit, celui-ci ci m'a Žgalement Žcrit
que je devais y mettre mon grain de sel [93]. Ë mon avis, si vous acceptez la modification proposŽe par Dietz [94], vous devez y rŽflŽchir et vous prŽparer sŽrieusement, afin de
mettre les choses en train pour janvier, sinon ce serait trop prŽcipitŽ. D'un
point de vue gŽnŽral, il me semble que la Neue Zeit, depuis qu'elle para”t hebdomadairement, a perdu partiellement son
ancien caractre pour en prendre un nouveau qu'elle n'a pas su adopter
vŽritablement. Elle est maintenant Žcrite pour un public double et ne peut
satisfaire entirement ni l'un ni l'autre.
Si elle doit
devenir une revue, en partie politique, en partie littŽraire et artistique, en
partie scientifique, dans le genre de la Nation, alors vous devez la
transfŽrer ˆ Berlin. En effet, la politique d'un hebdomadaire
doit tre faite au centre, la veille de l'impression, sinon elle arrivera toujours trop tard. Et ceux qui collaborent ˆ
la partie politique doivent tous tre dans la mme localitŽ, ˆ l'exception des correspondants. Il me semble donc que le plan
d'une revue qui serait rŽdigŽe ˆ Berlin et ˆ Londres, et imprimŽe ˆ Stuttgart,
est impossible. De toute faon, il y aurait une diffŽrence d'abonnements de 20
ˆ 30 %, selon que la revue serait faite ˆ Berlin ou ˆ Stuttgart. Je juge
uniquement du point de vue de la diffusion, puisque je ne connais les autres
points d'interfŽrence que d'une manire superficielle ou pas du tout, et je
vous laisse donc le soin d'en tenir compte.
Mais si la Neue
Zeit est transformŽe en ce sens, elle ne
s'adressera plus qu'ˆ une partie de son public actuel, et devra donc s'y
adapter compltement. Alors, elle ne pourra plus recevoir les articles qui lui
ont donnŽ jusqu'ici sa valeur la plus grande et la plus durable, ˆ savoir ceux
qui ont un caractre scientifique et sont trs longs, allant de trois ˆ six
numŽros. Dans ce cas, il faudrait lui substituer une revue. mensuelle ‑
en cas de nŽcessitŽ, trimestrielle ‑ de caractre essentiellement
scientifique, qui aurait alors un cercle de lecteurs restreint en consŽquence,
ce qu'il faudrait compenser par un prix plus ŽlevŽ, afin qu'elle puisse tout de
mme tenir.
D'un point de
vue gŽnŽral, il me para”t nŽcessaire ‑ pour le cas o les Žditeurs du
parti veuillent concentrer toujours davantage entre leurs mains toute la presse
du parti, mme la scientifique ‑ de ne pas calculer tout en fonction
d'une diffusion de masse, que cela s'y prte ou non. Les vŽritables Žtudes
Žconomiques sont avant tout des recherches de dŽtail, et ne serait-ce que pour
cette raison, ne peuvent avoir une diffusion de masse. Il en va de mme pour de
vŽritables travaux historiques qui sont le rŽsultat de recherches personnelles
et ne sont pas adaptŽs aux Žditions par livraisons successives. J'estime, en
somme, qu'il faut introduire une division en deux dŽpartements, l'une pour une
diffusion de masse, l'autre pour une distribution ordinaire en librairie, plus
lente, en tirages moindres et ˆ un prix en consŽquence plus ŽlevŽ. Voici un
exemple personnel qui montre ce qui arrive lorsqu'on veut forcer les limites de
ce qu'impose la nature mme de la publication. Mon Anti-DŸhring est aussi populaire que possible, mais n'est pas pour autant un
livre ˆ la portŽe de n'importe quel ouvrier. Or, voilˆ que Dietz extrait une
partie de l'Ždition de Zurich et cherche par ce moyen ˆ forcer la vente pour
vendre le truc en un clin d'Ïil au ban et ˆ l'arrire-ban ˆ des prix rŽduits.
Cela ne m'est absolument pas agrŽable, et je prendrai garde ˆ l'avenir. C'est
le seul grand ouvrage que j'aie Žcrit depuis 1845, et c'est, en toute
occurrence, le dŽgrader que de le traiter de la sorte. N'en parle cependant pas
ˆ Dietz, la chose est faite et on ne peut plus la changer ; je ne t'en ai
parlŽ que pour te citer un exemple frappant d'erreur en matire de diffusion en
librairie.
Relations avec la presse syndicale
Aprs avoir
quelque peu revu la traduction assez scolaire, je l'ai envoyŽe ˆ Shipton pour
servir d'Žditorial [95]. Or, ce brave Shipton a mal compris le texte, et le temps de me
rŽclamer des explications, il Žtait de nouveau trop tard pour le faire
para”tre, comme cela se passe d'habitude. Ce bougre s'est imaginŽ Dieu sait
quoi par l'Ç immixtion de l'ƒtat È en faveur des travailleurs, sauf
ce qui Žtait Žcrit dans l'article, alors que cette immixtion de l'ƒtat existe
depuis longtemps dans la lŽgislation de fabriques
en Angleterre. Pire encore, dans les mots : Ç Nous demandons une
convention de Genve pour la classe ouvrire È, il a lu que vous rŽclamiez
la rŽunion d'une confŽrence des dŽlŽguŽs ˆ Genve pour rŽgler l'affaire !
Il n'y a rien ˆ faire avec un tel ‰ne. J'ai saisi l'occasion pour mettre ˆ
exŽcution ma dŽcision et rompre avec le Labour Standard, Žtant donnŽ que le journal empire plut™t qu'il ne s'amŽliore.
Je vous envoie
les Žpreuves avec les modifications que vous dŽsirez [96]. Il me semble que vous avez mal compris le premier passage, et la
seconde modification est toute formelle. Quoi qu'il en soit, je ne comprends
pas quel sens peuvent bien avoir ces modifications, si vous me les demandez
mardi, qu'elles me parviennent mercredi, et vous reviennent ˆ Londres jeudi...
aprs la parution du journal.
Mais il y a
encore quelque chose d'autre. Si les choses aussi modŽrŽes et inoffensives que
celles de l'article de Kautsky commencent ˆ vous sembler trop fortes, je suis
obligŽ d'admettre que ce sera encore plus le cas avec mes propres articles qui,
en gŽnŽral, sont plus violents. Je suis donc obligŽ d'interprŽter vos remarques
comme un sympt™me, et en conclure qu'il vaut mieux pour nous deux que je cesse
de vous envoyer des Žditoriaux, et ne serait-ce que pour cette raison, j'en
Žtais venu ˆ cette dŽcision qui devait tre mise en acte aprs le congrs des
syndicats. Mais plus t™t je cesserai, mieux cela vaudra sans doute pour votre
position vis-ˆ-vis de ce congrs [97].
Voici encore un
autre point : je suis d'avis que vous auriez dž m'envoyer, avant la
publication, une copie ou les Žpreuves de l'article sur les syndicats de Max
Hirsch en Allemagne [98], Žtant donnŽ que, parmi vos collaborateurs, j'Žtais le seul qui
soit au courant de cette question et qui aurait pu y faire les remarques
indispensables. En tout cas, il m'est impossible de continuer ˆ faire partie du
corps des collaborateurs d'un journal donnant la vedette ˆ des syndicats qui ne
peuvent tre comparŽs qu'aux pires syndicats anglais, et admettant qu'ils se
vendent carrŽment ˆ la bourgeoisie ou du moins se laissent diriger par des gens
payŽs par elle.
Je n'ai pas
besoin d'ajouter que, pour le reste, je souhaite beaucoup de succs au Labour
Standard, et je vous fournirai de temps en temps
des informations concernant le continent.
Perspectives historiques du parti
Dans cette
guerre, la neutralitŽ de la Belgique et de la Suisse sera la premire chose qui
volera en Žclats, et si la guerre prend un tour sŽrieux, notre seule chance
sera que les Russes soient battus et fassent la rŽvolution [99]. Les Franais ne pourront pas la faire tant qu'ils sont les alliŽs
du tsar : ce serait une haute trahison [100] ! Cependant, si aucune rŽvolution n'interrompt la guerre, si
on la laisse suivre son cours, dans ce cas, la victoire ira au camp qui se sera
assurŽ le concours de l'Angleterre, ˆ condition que celle-ci entre en guerre.
En effet, on pourra alors, avec l'aide de l'Angleterre, rŽduire l'autre camp ˆ
la famine, en coupant l'approvisionnement en blŽs Žtrangers dont toute l'Europe
occidentale a besoin dŽsormais...
Le parti de classe. Tome IV. ActivitŽs de classe du parti
Chapitre 2
Le parti face
ˆ l'Žvolution du monde
Quiconque n'est pas
compltement abruti par les criailleries du moment ou n'a pas intŽrt ˆ duper
le peuple allemand, doit reconna”tre que la guerre de 1870 porte tout aussi
nŽcessairement dans son sein une guerre entre l'Allemagne et la Russie (alliŽe
ˆ la France) que la guerre de 1870 elle-mme est nŽe de celle de 1866.
Je dis fatalement, sauf le cas peu
probable o une rŽvolution Žclaterait auparavant en Russie.
MARX, Lettre au ComitŽ
social-dŽmocrate de Brunswick, fin aožt-dŽbut septembre 1870 [101].
F. Engels,
dans une lettre adressŽe ˆ l'un de nous [102], a fait un exposŽ si clair et si juste de la situation qui nous
est faite par les Žlections du 4 octobre, que malgrŽ son caractre privŽ nous
croyons devoir la porter ˆ la connaissance de nos lecteurs.
Londres, le 12
octobre 1885
Je ne vois pas
que le 4 octobre soit une dŽfaite, ˆ moins que vous ne vous soyez livrŽs ˆ
toutes sortes d'illusions. Il s'agissait d'Žcraser les opportunistes ; ils
ont ŽtŽ ŽcrasŽs. Pour les Žcraser, il fallait une pression des deux c™tŽs
opposŽs, de droite et de gauche. Que la pression de droite ait ŽtŽ plus forte
que l'on n'aurait cru, c'est Žvident. Mais cela rend la situation beaucoup plus
rŽvolutionnaire.
Le bourgeois,
grand et petit, a prŽfŽrŽ aux OrlŽanistes et Bonapartistes dŽguisŽs les
OrlŽanistes et Bonapartistes francs, aux hommes qui veulent s'enrichir aux
frais de la nation ceux qui se sont dŽjˆ enrichis en la volant, aux
conservateurs de demain les conservateurs de la veille. Voilˆ tout.
La monarchie est
impossible en France, ne fžt-ce que par la multiplicitŽ des prŽtendants.
Serait-elle possible, ce serait un signe que les Bismarckiens ont raison de
parler de la dŽgŽnŽrescence de la France. Mais cette dŽgŽnŽrescence n'atteint
que la bourgeoisie, en Allemagne et en Angleterre aussi bien qu'en France.
La RŽpublique
demeure toujours le gouvernement qui divise le moins les trois sectes
monarchistes, qui leur permet de s'unir en parti conservateur [103]. Si la possibilitŽ d'une restauration monarchique rŽappara”t, le
parti conservateur se divise dans lÕinstant en trois sectes ; tandis que
les rŽpublicains sont forcŽs .de se grouper autour du seul gouvernement
possible ; et, en ce moment, c'est probablement le ministre Clemenceau.
Clemenceau est
toujours un progrs sur Ferry et Wilson. Il est trs important qu'il arrive au
pouvoir, non comme bouclier de la propriŽtŽ contre les communistes, mais comme
sauveur de la RŽpublique contre la monarchie. En ce cas, il sera plus ou moins forcŽ de tenir ce qu'il a promis ; autrement, il se conduirait comme
les autres. qui se sont crus, ainsi que Louis-Philippe, Ç la meilleure des
rŽpubliques È : ‑ nous sommes au pouvoir, la RŽpublique peut
dormir tranquille ; notre prise de possession des ministres suffit, ne
nous parlez donc plus des rŽformes promises.
Je crois que les
hommes qui, le 4, ont votŽ pour les monarchistes sont dŽjˆ effrayŽs de leur
propre succs et que le 18 donnera des rŽsultats plus ou moins
clemenceautistes, avec un certain succs, non d'estime, mais de mŽpris pour les
opportunistes [104]. Le philistin se dira : aprs tout, avec tant de royalistes et
de bonapartistes, il me faut quelques opportunistes. Du reste, le 18 dŽcidera
de la situation ; la France est le pays de l'imprŽvu, et je me garderai
bien d'exprimer une opinion dŽfinitive.
Mais, dans tous
les cas, il y aura en prŽsence radicaux et monarchistes. La RŽpublique courra
juste le danger nŽcessaire pour forcer le petit-bourgeois ˆ se pencher un peu
plus vers l'extrme-gauche, ce qu'il n'aurait fait autrement. C'est prŽcisŽment
la situation qu'il nous faut, ˆ nous communistes. Jusqu'ˆ
prŽsent, je ne vois pas de raisons pour croire que la marche si
exceptionnellement logique du dŽveloppement politique de la France ait
dŽviŽ : c'est toujours la logique de 1792‑94 ; seulement le
danger que causait alors la coalition est aujourd'hui causŽ par la coalition
des partis monarchiques ˆ l'intŽrieur. Ë la regarder de prs, elle est moins
dangereuse que ne l'Žtait l'autre...
F. Engels
Au
comitŽ de rŽdaction du Socialiste
Citoyens,
Dans votre
numŽro du 17, vous publiez l'extrait d'une lettre privŽe que j'avais adressŽe ˆ
l'un de vous. Cette lettre Žtait Žcrite ˆ la h‰te, tellement que pour ne pas
manquer le courrier, je n'avais mme pas eu le temps de la relire [105]. Permettez-moi donc de qualifier [106] un passage qui n'exprime pas clairement ma pensŽe.
En parlant de M.
Clemenceau comme porte-drapeau du radicalisme franais, je dis : Ç
Il est trs important qu'il arrive au pouvoir, non comme bouclier de la
propriŽtŽ contre les communistes, mais comme sauveur de la RŽpublique contre la
monarchie. En ce cas, il sera plus ou moins forcŽ de tenir ce qu'il a
promis ; autrement, il se conduirait (ici il faut insŽrer : peut-tre) comme les autres qui se sont crus, ainsi que Louis-Philippe, la
meilleure des rŽpubliques : nous sommes au pouvoir, la RŽpublique peut
dormir tranquille ; notre prise de possession des ministres suffit, ne
nous .parlez donc plus des rŽformes promises. È
D'abord je n'ai
aucun droit d'affirmer que M. Clemenceau, s'il arrivait au pouvoir par la voie
routinire des gouvernements parlementaires, agirait infailliblement
Ç comme les autres È. Puis, je ne suis pas de ceux qui expliquent les
actions des gouvernements par leur simple volontŽ, bonne ou mauvaise ;
cette volontŽ elle-mme est dŽterminŽe par des causes indŽpendantes, par la
situation gŽnŽrale. Ce n'est donc pas la volontŽ, bonne ou mauvaise, de M.
Clemenceau dont il s'agit ici. Ce dont il s'agit, dans l'intŽrt du parti
ouvrier, c'est que les radicaux arrivent au pouvoir dans une situation telle
que la mise en pratique de leur programme leur soit imposŽe comme seul moyen de
se maintenir. Cette situation, espŽrons que les 200 monarchistes de la Chambre
suffiront ˆ la crŽer.
Londres, le 21
octobre 1885.
F. Engels
Situation
politique de l'Europe
(L'affaire
orientale est un peu longue [107], il me faut entrer dans un tas de dŽtails, vu les btises absurdes
que la presse franaise, y compris Le Cri, a
rŽpandues sur ce sujet, sous l'influence russo-patriotique.) [108]
Au mois de mars
1879, Disraeli envoya quatre vaisseaux cuirassŽs dans le Bosphore ; leur
seule prŽsence suffit pour arrter la marche triomphale des Russes sur
Constantinople, et pour dŽchirer le traitŽ de San Stefano. La paix de Berlin
rŽgla, pour quelque temps, la situation en Orient [109]. Bismarck rŽussit ˆ Žtablir un accord entre le gouvernement russe
et le gouvernement autrichien. L'Autriche dominerait en sous-main la
Serbie ; tandis que la Bulgarie et la RoumŽlie seraient abandonnŽes ˆ
l'influence prŽpondŽrante de la Russie. Cela laissait deviner que si plus tard
Bismarck permettait aux Russes de prendre Constantinople, il rŽservait ˆ
l'Autriche Salonique et la MacŽdoine.
Mais, en outre,
on donna la Bosnie ˆ l'Autriche, comme, en 1794, la Russie avait abandonnŽ,
pour la reprendre en 1814, la plus grande partie de la Pologne proprement dite
aux Prussiens et aux Autrichiens. La Bosnie Žtait la cause d'une saignŽe
perpŽtuelle pour l'Autriche, une pomme de discorde entre la Hongrie et
l'Autriche occidentale, et surtout la preuve pour la Turquie que les Autrichiens,
ainsi que les Russes [110], lui prŽparaient le sort de la Pologne. DŽsormais la Turquie ne
pouvait avoir confiance en l'Autriche : victoire importante de la politique
du gouvernement russe.
La Serbie avait
des tendances slavophiles, partant russophiles, mais depuis son Žmancipation
elle puise tous ses moyens de dŽveloppement bourgeois en Autriche. Les jeunes
gens vont Žtudier dans les universitŽs autrichiennes ; le systme
bureaucratique, le code, la procŽdure des tribunaux, les Žcoles, tout a ŽtŽ
copiŽ des modles autrichiens. C'Žtait naturel. Mais la Russie devait empcher
cette imitation en Bulgarie ; elle ne voulait pas tirer les marrons du feu
pour l'Autriche. Donc la Bulgarie fut organisŽe en satrapie russe.
L'administration, les officiers et les sous-officiers, le personnel, tout le
systme enfin furent russes : le Battemberg qui lui fut octroyŽ Žtait
cousin d'Alexandre III.
La domination,
d'abord directe ; puis indirecte du gouvernement russe suffit pour
Žtouffer en moins de quatre ans toutes les sympathies bulgares pour la
Russie ; elles avaient pourtant ŽtŽ grandes et enthousiastes. La
population regimbait de plus en plus contre l'insolence des
Ç libŽrateurs È ; et mme le Battemberg, homme sans idŽes
politiques, d'un caractre mou et qui ne demandait pas mieux que de servir le
tsar, mais qui rŽclamait des Žgards, devint de plus en plus indocile.
Pendant ce
temps, les choses marchaient en Russie. Le gouvernement, ˆ force de sŽvŽritŽs,
rŽussit ˆ disperser et ˆ dŽsorganiser les nihilistes pour quelque temps. Mais
cela n'Žtait pas suffisant, il lui fallait un appui dans l'opinion publique. Il
lui fallait dŽtourner les esprits de la contemplation des misres sociales et
politiques toujours croissantes de l'intŽrieur ; enfin il lui fallait un
peu de fantasmagorie patriotique [111]. Sous NapolŽon III, la rive gauche du Rhin avait servi ˆ dŽtourner
vers l'extŽrieur les passions rŽvolutionnaires ; de mme le gouvernement
russe montra au peuple inquiet et remuant la conqute de Constantinople, la
Ç dŽlivrance È des Slaves opprimŽs par les Turcs et leur rŽunion en
une grande fŽdŽration sous la prŽsidence de la Russie. Mais il ne suffisait pas
d'Žvoquer cette fantasmagorie, il fallait faire quelque chose pour la rŽaliser.
Les
circonstances Žtaient favorables. L'annexion de l'Alsace-Lorraine avait semŽ
entre la France et l'Allemagne des ferments de discorde, qui semblaient devoir
neutraliser ces deux puissances. L'Autriche, ˆ elle seule, ne pouvait lutter
contre la Russie, puisque son arme offensive la plus efficace, l'appel aux
Polonais, serait toujours retenue dans le fourreau de la Prusse. Et
l'occupation ‑ le vol ‑ de la Bosnie Žtait une Alsace entre
l'Autriche et la Turquie [112]. L'Italie Žtait au plus offrant, c'est-ˆ-dire ˆ la Russie, qui lui
offrait le Tretin et l'Istrie, avec la Dalmatie et Tripoli [113]. Et l'Angleterre ? Le pacifique russophile Gladstone avait
ŽcoutŽ les paroles tentantes de la Russie : il avait occupŽ l'ƒgypte, en pleine paix, ce qui assurait non seulement ˆ l'Angleterre une
querelle perpŽtuelle avec la France, mais bien plus : l'impossibilitŽ
d'une alliance des Turcs avec les Anglais, qui venaient de les spolier en s'appropriant un fief turc, l'ƒgypte. En outre, les prŽparatifs
russes en Asie Žtaient assez avancŽs pour donner aux Anglais bien de la besogne
aux Indes en cas de guerre. Jamais autant de chances ne s'Žtaient prŽsentŽes
aux Russes : leur diplomatie triomphait sur toute la ligne.
La rŽbellion des
Bulgares contre le despotisme russe fournit l'occasion d'entrer en campagne. Ë
l'ŽtŽ 1885, on fit miroiter devant les yeux des Bulgares et des
RoumŽliotes [114] la possibilitŽ .de cette union promise par la paix de San Stefano
et dŽtruite par le traitŽ de Berlin. On leur dit que s'ils se jetaient de nouveau
dans les bras de la Russie libŽratrice, le gouvernement russe remplirait sa mission
en accomplissant cette union ; mais que pour cela les Bulgares devaient
commencer par chasser le Battemberg. Celui-ci fut prŽvenu ˆ temps ; contre
son habitude, il agit avec promptitude et Žnergie : il accomplit, mais
pour lui [115], cette union que la Russie voulait faire contre lui. Ds ce moment,
guerre implacable entre lui et le tsar.
Cette guerre fut
menŽe d'abord sournoisement et indirectement. On rŽŽdita, pour les petits ƒtats
des Balkans, la belle doctrine de Louis Bonaparte, suivant laquelle ;
quand un peuple jusque-lˆ Žpars, disons l'Italie ou l'Allemagne, se rŽunit et
se constitue en nation, les autres ƒtats, disons la France, ont droit ˆ des
compensations territoriales. La Serbie avala l'amorce, et dŽclara la guerre aux
Bulgares ; la Russie remporta ce triomphe que cette guerre, dŽclenchŽe
dans son intŽrt, se fit aux yeux du monde sous les auspices de l'Autriche, qui
n'osa l'empcher de peur de voir le parti russe arriver au pouvoir en Serbie.
De son c™tŽ, la Russie dŽsorganisa l'armŽe bulgare en rappelant tous les
officiers russes, c'est-ˆ-dire tout l'Žtat-major et tous les officiers supŽrieurs,
y compris les chefs de bataillon de l'armŽe bulgare.
Mais, contre
toute attente, les Bulgares, sans officiers russes et ˆ deux contre trois,
battent les Serbes ˆ plate couture et conquirent le respect et l'admiration de
l'Europe ŽtonnŽe. Ces victoires ont deux causes. D'abord Alexandre de
Battemberg, bien que faible comme homme politique, est bon soldat ; il fit
la guerre telle qu'il l'avait apprise ‑ˆ l'Žcole prussienne, tandis que
les Serbes suivaient la stratŽgie et la tactique de leurs modles autrichiens.
Ce fut donc une deuxime Ždition de la campagne de 1866 en Bohme. Et puis les
Serbes avaient vŽcu depuis soixante ans sous ce rŽgime bureaucratique
autrichien qui, sans leur donner une puissante bourgeoisie et une paysannerie
indŽpendante (les paysans ont dŽjˆ tous des hypothques), avait ruinŽ et
dŽsorganisŽ les restes du collectivisme gentilice qui avait ŽtŽ leur force dans leurs luttes contre les Turcs :
ce qui explique leur bravoure supŽrieure.
Donc, nouvel
Žchec pour la Russie ; c'Žtait ˆ recommencer. Le chauvinisme slavophile,
chauffŽ comme contrepoids de l'ŽlŽment rŽvolutionnaire, grandissait de jour en
jour et devenait dŽjˆ menaant pour le gouvernement. Le tsar se rend en CrimŽe,
et les journaux russes annoncent qu'il fera quelque chose de grand ; il
cherche ˆ attirer dans ses filets le sultan pour l'engager ˆ une alliance en
lui montrant ses anciens alliŽs ‑ l'Autriche et l'Angleterre ‑ le
trahissant et le spoliant, et la France ˆ la remorque et ˆ la merci de la
Russie. Mais le sultan fait la sourde oreille et les Žnormes armements de la
Russie occidentale et mŽridionale restent, pour le moment, sans emploi.
Le tsar revient
de CrimŽe (juin dernier). Mais en attendant, la marŽe chauvine monte et le
gouvernement, incapable de rŽprimer ce mouvement envahissant, est de plus en
plus entra”nŽ par lui ; si bien qu'il faut permettre au maire de Moscou de
parler hautement, dans son allocution au tsar, de la conqute de
Constantinople. La presse, sous l'influence et la protection des gŽnŽraux, dit
ouvertement qu'elle attend du tsar une action Žnergique contre l'Autriche et
l'Allemagne, qui l'entravent, et le gouvernement n'a pas le courage de lui
imposer silence. Le chauvinisme slavophile est plus puissant que le tsar, il
faut qu'il cde de peur d'une rŽvolution, les slavophiles s'allieraient aux
constitutionnels, aux nihilistes, enfin ˆ tous les mŽcontents [116].
La dŽtresse
financire complique la situation. Personne ne veut prter ˆ ce gouvernement
qui, de 1870 ˆ 1875, a empruntŽ 1 milliard 750 000 francs ˆ Londres et qui
menace la paix europŽenne. Il y a deux ou trois ans, Bismarck lui facilita, en
Allemagne, un emprunt de 375 millions de francs, mais il est mangŽ depuis
longtemps, et sans la signature de Bismarck, les Allemands ne donneront pas un
sou. Cependant cette signature ne s'obtient plus sans des conditions humiliantes.
La fabrique des assignats de l'intŽrieur en a trop produit, le rouble argent
vaut 4 F, et le rouble papier 2,20 F. Les armements cožtent un argent
fou.
Enfin, il faut
agir. Un succs du c™tŽ de Constantinople ou la rŽvolution ‑
l'ambassadeur russe, Giers, alla trouver Bismarck, et lui exposa la situation,
qu'il comprit fort bien. Il aurait bien voulu, par Žgard pour l'Autriche,
retenir le gouvernement du tsar, dont l'instabilitŽ l'inquite. Mais la
rŽvolution en Russie signifie la chute du rŽgime bismarckien. Sans la Russie ‑ la grande armŽe de rŽserve de la rŽaction ‑
la domination des hobereaux en Prusse ne durerait pas un jour. La rŽvolution en
Russie changerait immŽdiatement la situation en Allemagne ; elle
dŽtruirait d'un coup cette foi aveugle en la toute-puissance de Bismarck, qui
lui assure le concours des classes rŽgnantes ; elle mžrirait la rŽvolution
en Allemagne.
Bismarck,
sachant fort bien que l'existence du tsarisme est la base de tout son systme,
se rendit en toute h‰te ˆ Vienne, pour informer ses amis que, en prŽsence d'un
tel danger, il n'est plus temps de s'arrter aux questions
d'amour-propre ; qu'il faut permettre au tsar quelque semblant de
triomphe, et que, dans leur intŽrt bien entendu, l'Autriche et l'Allemagne
doivent s'incliner devant la Russie. D'ailleurs, si messieurs les Autrichiens
insistent pour se mler des affaires de Bulgarie, il s'en lavera les
mains : ils verront ce qui arrivera. Kalnoky cde, Alexandre Battemberg
est sacrifiŽ, et Bismarck court porter en personne la nouvelle ˆ Giers.
Par malheur, les
Bulgares dŽployrent une capacitŽ politique et une Žnergie inattendues et
intolŽrables chez une nation slave Ç dŽlivrŽe par la sainte Russie È.
Le Battemberg fut arrtŽ nuitamment, mais les Bulgares arrtent les
conspirateurs, nomment un gouvernement capable, Žnergique et incorruptible,
qualitŽs parfaitement intolŽrables chez une nation ˆ peine ŽmancipŽe ; ils
rappellent le Battemberg ; celui-ci Žtale toute sa mollesse et prend la
fuite. Mais les Bulgares sont incorrigibles. Avec ou sans Battemberg, ils
rŽsistent aux ordres souverains du tsar et obligent l'hŽro•que Kaulbars ˆ se rendre
ridicule devant toute l'Europe.
Imaginez la
fureur du tsar. Aprs avoir courbŽ Bismarck, brisŽ la rŽsistance autrichienne,
se voir arrtŽ par ce petit peuple qui date d'hier, qui doit ˆ lui ou ˆ son
pre son Ç indŽpendance È, et qui ne veut pas comprendre que cette
indŽpendance ne signifie qu'obŽissance aveugle aux ordres du
Ç libŽrateur È. Les Grecs et les Serbes ont ŽtŽ (pas mal [117] ) ingrats, mais les Bulgares dŽpassent la limite !
Prendre leur indŽpendance au sŽrieux ! Quel crime !
Pour se sauver
de la rŽvolution, le pauvre tsar est obligŽ de faire un nouveau pas en avant.
Mais chaque pas devient plus dangereux ; car il ne se fait qu'au risque
d'une guerre europŽenne, ce que la diplomatie russe a toujours cherchŽ ˆ
Žviter. Il est certain que s'il y a intervention directe du gouvernement russe
en Bulgarie et qu'elle amne des complications ultŽrieures, il arrivera un
moment o l'hostilitŽ des intŽrts russes et autrichiens Žclatera ouvertement.
Il sera alors impossible de localiser la guerre, elle deviendra gŽnŽrale. ƒtant
donnŽ l'honntetŽ des fripons qui gouvernent l'Europe, il est impossible de
prŽvoir comment se grouperont les deux camps. Bismarck est capable de se ranger
du c™tŽ des Russes contre l'Autriche, s'il ne peut retarder autrement la
rŽvolution en Russie. Mais il est plus probable que si la guerre Žclate entre
la Russie et l'Autriche, l'Allemagne viendra au secours de cette dernire pour
empcher son complet Žcrasement.
En attendant le
printemps, car avant avril les Russes ne pourront s'engager dans une grande
campagne d'hiver sur le Danube, le tsar travaille ˆ attirer les Turcs dans ses
filets, et la trahison de l'Autriche et de l'Angleterre envers la Turquie lui
facilite la t‰che. Son but est d'occuper les Dardanelles et de transformer
ainsi la mer Noire en lac russe, d'en faire un abri inabordable pour l'organisation
de flottes puissantes qui en sortiraient pour dominer ce que NapolŽon appelait
un Ç lac franais È ‑ la MŽditerranŽe. Mais il n'y est pas
encore parvenu, bien que ses partisans de Sofia aient trahi sa secrte pensŽe.
Voilˆ la
situation. Afin d'Žchapper ˆ une rŽvolution en Russie, il faut au tsar
Constantinople ; Bismarck hŽsite, il voudrait le moyen d'Žviter l'une et
l'autre ŽventualitŽ.
Et la
France ?
Les Franais
patriotes, qui depuis seize ans rvent de revanche, croient qu'il n'y a rien de
plus naturel que de saisir l'occasion qui peut-tre s'offrira. Mais, pour notre
parti, la question n'est pas aussi simple ; elle ne l'est pas mme [118] pour messieurs les chauvins. Une guerre de revanche, faite avec
l'alliance et sous l'Žgide de la Russie, pourrait amener une rŽvolution ou une
contre-rŽvolution en France.
Au cas o une
rŽvolution porterait les socialistes au pouvoir, l'alliance russe croulerait.
D'abord les Russes feraient immŽdiatement la paix avec Bismarck pour se ruer
avec les Allemands sur la France rŽvolutionnaire.
Ensuite, la France ne porterait pas les socialistes au pouvoir en vue
d'empcher par une guerre une rŽvolution en Russie. Mais cette ŽventualitŽ
n'est gure probable.
La
contre-rŽvolution monarchique l'est davantage. Le tsar dŽsire la restauration
des OrlŽans, ses amis intimes, le seul gouvernement qui lui offre les
conditions d'une bonne et solide alliance. Une fois la guerre commencŽe, on
fera bon usage des officiers monarchistes pour la prŽparer. Ë la moindre
dŽfaite partielle ‑ et il y en aura ‑, on criera que c'est la faute
de la RŽpublique, que pour avoir des victoires et obtenir la coopŽration sans
arrire-pensŽe de la Russie, il faut un gouvernement stable, monarchique,
Philippe VII enfin. Les gŽnŽraux monarchistes agiront mollement afin de pouvoir
mettre leur manque de succs sur le compte du gouvernement rŽpublicain ‑
et vlan, voici la monarchie rŽtablie. Philippe VII restaurŽ, ces rois et
empereurs s'entendront immŽdiatement et, au lieu de s'entredŽvorer, ils se
partageront l'Europe en avalant les petits ƒtats. La RŽpublique franaise tuŽe,
on tiendra un nouveau Congrs de Vienne o, peut-tre, on prendra les pŽchŽs
rŽpublicains et socialistes de la France comme prŽtexte pour lui refuser l'Alsace-Lorraine
en totalitŽ ou en partie ; et les princes se moqueront des rŽpublicains
assez na•fs pour avoir cru ˆ la possibilitŽ d'une alliance sincre entre le
tsarisme et l'anarchie [119].
Du reste, est-il
vrai que le gŽnŽral Boulanger dit ˆ qui veut l'Žcouter : Ç Il faut
une guerre pour empcher la rŽvolution sociale È ?
Si c'est vrai, que cela serve d'avis au parti socialiste. Ce bon Boulanger a
des allures fanfaronnes que l'on peut pardonner ˆ un militaire, mais qui
donnent une mince idŽe de son esprit politique. Ce n'est pas lui qui sauverait
la RŽpublique. Entre les socialistes et les OrlŽans, il est possible qu'il
s'arrange avec ces derniers, s'ils lui assurent l'alliance russe. Dans tous les
cas, les rŽpublicains bourgeois de France sont dans la mme situation que le
tsar : ils voient se dresser devant eux le spectre de la rŽvolution sociale
et ils ne connaissent qu'un moyen de salut : la guerre.
En France, en
Russie et en Allemagne, les ŽvŽnements tournent si bien ˆ notre profit que,
pour le moment, nous ne pouvons dŽsirer que la continuation du statu quo. Si la rŽvolution Žclatait en Russie, elle crŽerait un ensemble de
conditions des plus favorables. Une guerre gŽnŽrale, au contraire, nous
rejetterait dans le domaine de l'imprŽvu (et des ŽvŽnements incalculables). La
rŽvolution en Russie et en France serait retardŽe ; notre parti subirait
le sort de la Commune de 1871. Sans doute, les ŽvŽnements finiront par tourner
en notre faveur ; mais quelle perte de temps, quels sacrifices, quels
nouveaux obstacles ˆ surmonter !
La force qui, en
Europe, pousse ˆ une guerre est grande. Le systme militaire prussien, adoptŽ
partout, demande douze ˆ seize ans pour son dŽveloppement complet ; aprs
ce laps de temps, les cadres de rŽserve sont remplis d'hommes rompus au
maniement des armes. Ces douze ˆ seize ans sont partout ŽcoulŽs ; partout on
a douze ˆ seize classes annuelles qui ont passŽ par l'armŽe. On est donc prt
partout, et les Allemands n'ont pas d'avantage spŽcial de ce c™tŽ. C'est dire
que cette guerre qui nous menace jetterait dix millions de soldats sur le champ
de bataille [120]. Et puis le vieux Guillaume va probablement mourir [121]. Bismarck verra sa situation plus ou moins ŽbranlŽe et peut-tre poussera-t-il ˆ la guerre comme moyen de se maintenir [122]. En effet, la Bourse croit partout ˆ la guerre, ds que le vieux
[l'empereur d'Allemagne] fermera les yeux.
Si guerre il
y a, elle ne se fera que dans le but d'empcher la rŽvolution [123] : en Russie, pour prŽvenir l'action commune de tous les mŽcontents,
slavophiles, constitutionnels, nihilistes, paysans ; en Allemagne, pour
maintenir Bismarck ; en France, pour refouler le mouvement victorieux des
socialistes et pour rŽtablir la monarchie.
Entre
socialistes franais et socialistes allemands, il n'existe pas de question
alsacienne. Les socialistes allemands ne savent que trop que les annexions de
1871, contre lesquelles ils ont toujours protestŽ, ont ŽtŽ le point d'appui de
la politique rŽactionnaire de Bismarck, tant ˆ l'intŽrieur qu'ˆ l'extŽrieur.
Les socialistes des deux pays sont Žgalement intŽressŽs au maintien de la
paix ; c'est eux qui paieraient les frais de la guerre.
Caractre
Ç national È
du mouvement
Votre
proclamation fera son effet en France, je l'espre, et j'espre tout autant
qu'elle passera inaperue en Allemagne. Voici pourquoi : ce ne sont pas
des choses sŽrieuses, mais je crois devoir y appeler votre attention, pour vous
engager ˆ les Žviter la prochaine fois [124].
Je ne veux pas
parler de l'usage du mot patriote. Ce mot a un
sens Žtroit ‑ ou bien si indŽterminŽ, c'est selon ‑ que moi je n'oserai
jamais m'appliquer cette qualification. J'ai parlŽ aux non-Allemands comme
Allemand, de mme que je parle aux Allemands comme simple international [125] ; je crois que vous auriez pu atteindre un plus grand effet si
vous vous Žtiez dŽclarŽ simple Franais ‑ ce qui exprime un FAIT, un fait
y compris les consŽquences logiques qui en dŽcoulent [126]. Mais passons, c'est affaire de style.
Vous avez encore
parfaitement raison en vous glorifiant du passŽ rŽvolutionnaire de la France,
et de croire que ce passŽ rŽvolutionnaire rŽpondra de son avenir socialiste.
Mais il me ‑para”t que, arrivŽs lˆ, vous donnez un peu trop dans le
blanquisme, c'est-ˆ-dire dans la thŽorie que la France est destinŽe ˆ jouer
dans la rŽvolution prolŽtarienne le mme r™le (initiateur non seulement, mais aussi directeur) [127] qu'elle a jouŽ dans la rŽvolution bourgeoise de 1789-98. Cela est
contraire aux faits Žconomiques et politiques d'aujourd'hui. Le dŽveloppement
industriel de la France est restŽ infŽrieur ˆ celui de l'Angleterre ; il
est infŽrieur en ce moment ˆ celui de l'Allemagne qui a fait des pas de gŽant
depuis 1860 ; le mouvement ouvrier en France aujourd'hui ne peut se
comparer ˆ celui de l'Allemagne. Mais ni Franais, ni Allemands, ni Anglais
n'auront, ˆ eux seuls, la gloire d'avoir ŽcrasŽ le capitalisme ; si la
France ‑ PEUT-æTRE ‑ donne le signal [128], ce sera en Allemagne, le pays le plus profondŽment travaillŽ par
le socialisme et o la thŽorie a le plus profondŽment pŽnŽtrŽ les masses, que
la lutte se dŽcidera, et encore ni la France, ni l'Allemagne n'auront dŽfinitivement
assurŽ la victoire tant que l'Angleterre restera aux mains de la bourgeoisie.
L'Žmancipation
prolŽtarienne ne peut tre qu'un fait international, si vous t‰chez d'en faire
un fait simplement franais, vous la rendez impossible.
La direction
exclusivement franaise de la rŽvolution bourgeoise ‑ bien qu'elle fžt
inŽvitable, gr‰ce ˆ la btise et ˆ la l‰chetŽ des autres nations ‑ a
menŽ, vous savez o ? Ë NapolŽon, ˆ la conqute, ˆ l'invasion de la Sainte-Alliance.
Vouloir attribuer ˆ la France dans l'avenir le mme r™le, c'est dŽnaturer le
mouvement prolŽtarien international, c'est mme, comme le font les blanquistes,
rendre la France ridicule, car au-delˆ de vos frontires on se moque de ses
prŽtentions.
Mais voyez o a
mne. Vous parlez de ce que Ç la France relevait en 1889, dans son
immortel Congrs de Paris, le drapeau etc. È. Comme vous ririez, ˆ Paris,
si les Belges voulaient dire que la Belgique, dans SON immortel Congrs de
Bruxelles de 1891, ou la Suisse dans SON immortel Congrs de Zurich... De plus,
les actes de ces congrs sont des actes, non pas franais, belges ou suisses,
mais internationaux.
Et puis vous
dites : le parti ouvrier franais ne fait qu'un avec la social-dŽmocratie
allemande contre l'empire d'Allemagne, avec le parti ouvrier belge contre la
monarchie des Cobourg, avec les Italiens contre la monarchie de Savoie, etc.
Ë tout cela, il
n'y aurait rien ˆ redire, si vous aviez ajoutŽ : et tous ces partis ne
font qu'un avec nous contre la RŽpublique bourgeoise qui nous opprime, nous
panamise et nous lie au tsar russe. Votre RŽpublique,
aprs tout, a ŽtŽ faite par le vieux Guillaume et Bismarck [129], elle est tout aussi bourgeoise que tous nos gouvernements monarchiques,
et il ne faut pas croire qu'avec le cri de Ç vive la RŽpublique È, le
lendemain de Panama, vous trouveriez un seul adhŽrent dans toute l'Europe. La
forme rŽpublicaine n'est plus que la simple nŽgation ‑de la monarchie ‑
et le bouleversement de la monarchie s'accomplira comme simple corollaire de la
rŽvolution ; en Allemagne, les partis bourgeois sont si achevŽs que nous
devrons passer immŽdiatement de la monarchie ˆ la rŽpublique sociale. Vous ne pouvez donc plus opposer votre rŽpublique bourgeoise aux
monarchies comme une chose ˆ laquelle les autres nations auraient ˆ aspirer.
Votre rŽpublique et nos monarchies, c'est tout un vis-ˆ-vis du
prolŽtariat ; si vous nous aidez contre nos bourgeois monarchiques, nous
vous aiderons contre vos bourgeois rŽpublicains. C'est le cas de
rŽciprocitŽ, nullement de dŽlivrance des pauvres monarchiques par les gŽnŽreux
rŽpublicains franais : cela ne cadre pas avec
l'idŽe internationale et encore moins la situation historique qui ont mis votre
rŽpublique au pied du tsar. N'oubliez pas que, si la France fait la guerre ˆ
l'Allemagne dans l'intŽrt et avec l'aide du tsar, c'est l'Allemagne qui sera
le centre rŽvolutionnaire.
Mais il y a
encore une autre histoire trs malencontreuse. Vous tes Ç un avec la
social-dŽmocratie allemande contre l'Empire d'Allemagne È. Cela a ŽtŽ traduit dans la presse bourgeoise : Ç gegen
das deutsche Reich È. Et c'est ce que tout le
monde y verrait. Car Ç Empire È signifie Ç Reich È aussi
bien que Ç Kaisertum È (rŽgime impŽrial) ; mais dans
Ç Reich È l'accent est mis sur le pouvoir central comme reprŽsentant
de l'unitŽ nationale, et pour celle-ci, la condition politique de leur
existence, les socialistes allemands se battraient ˆ outrance. Jamais nous ne
voudrions rŽduire l'Allemagne ˆ l'Žtat de division et d'impuissance d'avant
1866 [130]. Si vous aviez dit contre l'empereur, ou contre le rŽgime impŽrial,
on n'aurait pu dire grand-chose, bien que ce pauvre Guillaume ne soit pas de
taille ˆ mŽriter d'tre honorŽ de la sorte ; c'est la classe possŽdante,
foncire et capitaliste qui est l'ennemi ; et c'est si bien compris en
Allemagne que nos ouvriers ne comprendraient pas le sens de votre offre de les
aider ˆ vaincre le toquŽ de Berlin.
J'ai donc priŽ
Liebknecht de ne pas parler de votre proclamation (dans la presse), tant que
les feuilles bourgeoises n'en parlaient pas ; mais si, en se fondant sur
cette malheureuse expression, on attaquait nos hommes comme des tra”tres, cela
donnerait lieu ˆ un dŽbat assez pŽnible.
En rŽsumŽ :
un .peu plus de rŽciprocitŽ ne pourrait pas nuire ‑ l'ŽgalitŽ entre
nations est aussi nŽcessaire que celle entre individus.
De l'autre c™tŽ,
votre faon de parler de la rŽpublique comme d'une chose dŽsirable en elle-mme
pour le prolŽtariat, et de la France comme du peuple Žlu, vous empche de parler
du fait ‑ dŽsagrŽable, mais irrŽfutable ‑ de l'alliance russe ou
plut™t du vasselage russe (auquel est soumise la RŽpublique franaise).
Eh bien, c'est
assez, je crois. J'espre vous avoir convaincu que dans la premire chaleur de
votre patriotisme renaissant vous avez un peu dŽpassŽ le but.
I
Le socialisme
allemand est entrŽ en scne bien avant 1848. Il y eut alors deux courants
indŽpendants. D'abord, un mouvement ouvrier, succursale du mouvement ouvrier
franais, mouvement qui a produit, comme une de ses phases, le communisme
utopique de Weitling. Puis, un mouvement thŽorique, issu de la dŽb‰cle de la
philosophie hŽgŽlienne ; ce mouvement, ds son origine, est dominŽ par le
nom de Marx. Le Manifeste communiste de janvier
1848 marque la fusion de ces deux courants, fusion achevŽe et voulue
irrŽvocable dans la fournaise de la rŽvolution, o tous, ouvriers et
philosophes, payrent Žgalement de leur personne [131].
Aprs la dŽfaite
de la rŽvolution europŽenne en 1849, le socialisme Žtait rŽduit, en Allemagne,
ˆ une existence occulte. Ce ne fut qu'en 1862 que Lassalle, condisciple de
Marx, arbora de nouveau le drapeau socialiste. Mais ce n'Žtait plus le
socialisme hardi du Manifeste : ce que
Lassalle demandait dans l'intŽrt de la classe ouvrire, c'Žtait la production
coopŽrative assistŽe par le crŽdit de l'ƒtat, reproduction du programme des
ouvriers parisiens affiliŽs, avant 1848, au National de Marrast, soit le programme opposŽ par les rŽpublicains purs ˆ
l'organisation du travail de Louis Blanc. Le
socialisme lassallŽen, on le voit, Žtait bien modeste. NŽanmoins, son
apparition sur la scne marque le point de dŽpart de la deuxime phase du
socialisme en Allemagne, car le talent, la fougue, l'Žnergie indomptable de
Lassalle rŽussirent ˆ crŽer un mouvement ouvrier, auquel se rattache, par des
liens positifs ou nŽgatifs, amicaux ou hostiles, tout ce qui pendant dix ans a
remuŽ le prolŽtariat allemand [132].
En effet, le
lassallŽanisme pur pouvait-il, ˆ lui seul, suffire aux aspirations socialistes
de la nation qui avait produit le Manifeste ?
C'Žtait impossible. Aussi, gr‰ce surtout aux efforts de Liebknecht et de Bebel,
il se forma bient™t un parti ouvrier qui proclama hautement les principes de
1848. Puis, en 1867, trois ans aprs la mort de Lassalle, parut Le Capital de Marx. De ce jour date le dŽclin du lassallŽanisme spŽcifique.
Les thŽories du Capital devinrent de plus en
plus la propriŽtŽ commune de tous les socialistes allemands, lassallŽens et
autres. Plus d'une fois, des groupes entiers de lassallŽens passrent en masse,
tambour et drapeaux dŽployŽs, au nouveau parti de Bebel et de Liebknecht,
appelŽ le parti d'Eisenach [133]. Comme ce parti ne cessa pas de cro”tre en force, il y eut bient™t
hostilitŽ ˆ outrance entre les lassallŽens et leurs rivaux ; on se battait
mme ˆ coups de gourdins, juste au moment o il n'y avait plus de diffŽrend
rŽel entre les combattants, o les principes, les arguments et mme les moyens
de lutte des uns Žtaient, pour tous les points essentiels, identiques avec ceux
des autres.
C'est alors que
la prŽsence au Reichstag de dŽputŽs des deux fractions socialistes [134] leur imposa la nŽcessitŽ d'une action commune. Vis-ˆ-vis des
dŽputŽs bourgeois [135] le ridicule de cette hostilitŽ traditionnelle sauta aux yeux. La
situation devint insupportable. Alors, en 1875, la fusion se fit. Depuis, les
frres ennemis n'ont pas cessŽ de former une famille cordialement unie. S'il y
avait eu la moindre chance de division, Bismarck lui-mme se chargea de
l'Žcarter, lorsqu'en 1878, par sa fameuse loi d'exception, il mit le socialisme
allemand hors du droit commun. Les coups de marteau de la persŽcution commune
achevrent de forger en une masse homogne, lassallŽens et eisenachiens.
Aujourd'hui, tandis que le parti socialiste publie une Ždition officielle des
Ïuvres de Lassalle, il Žcarte du programme, les anciens lassallŽens, donc les
dernires traces du lassallŽanisme spŽcifique.
Ai-je besoin de
raconter en dŽtail les pŽripŽties, les luttes, les revers, les triomphes qui
ont marquŽ la carrire du parti allemand ? ReprŽsentŽ par deux
dŽputŽs [136] et cent mille Žlecteurs ds que le suffrage universel en 1866 lui
ouvrit les portes du Reichstag, il y compte aujourd'hui 36 dŽputŽs et un
million et demi d'Žlecteurs, chiffre qu'aucun des autres partis n'a atteint aux
Žlections de 1890. Onze ans de mise hors la loi et d'Žtat de sige ont abouti ˆ
quadrupler ses forces et ˆ le rendre le plus fort de l'Allemagne. En 1867, les
dŽputŽs bourgeois [137] pouvaient prendre leurs collgues socialistes pour des tres
Žtranges, arrivŽs d'une autre plante ; aujourd'hui, qu'ils le veuillent
ou non, ils doivent les regarder comme l'avant-garde du pouvoir ˆ venir. Le
parti socialiste qui a renversŽ Bismarck, le parti qui, aprs onze ans de
lutte, a brisŽ la loi contre les socialistes, le parti socialiste qui comme une
marŽe montante dŽborde toutes les digues, envahit villes et campagnes, mme
dans les VendŽes [138] les plus rŽactionnaires ‑ ce parti, aujourd'hui, est arrivŽ
au point o, par un calcul presque mathŽmatique, il peut fixer l'Žpoque de son
avnement au pouvoir [139].
Le nombre des
votes socialistes fut :
En 1871.................................... 101
927
En 1874.................................... 351
670
En 1877.................................... 493
447
En 1884.................................... 549
999
En 1887.................................... 763
128
En 1890....................................... 1
427 298
Depuis les
dernires Žlections, le gouvernement a fait de son mieux pour pousser les
masses populaires vers le socialisme ; il a poursuivi les coalitions et
les grves ; il a maintenu, mme pendant la disette actuelle, les droits
d'entrŽe qui renchŽrissent le pain et la viande du pauvre au bŽnŽfice des
grands propriŽtaires fonciers. Aux Žlections de 1895, nous pouvons donc compter
sur deux millions et demi de voix au moins, qui atteindront, vers 1900, de
trois et demi ˆ quatre millions, sur dix millions d'Žlecteurs inscrits, ce qui
para”tra dr™lement Ç fin de sicle È ˆ nos bourgeois.
Vis-ˆ-vis de
cette masse compacte et toujours croissant de socialistes, il n'y a que les
partis bourgeois divisŽs. En 1890, les conservateurs (deux fractions
additionnŽes) eurent 1 737 417 voix, les nationaux-libŽraux 1 177 807, les
progressistes (radicaux) 1 159 915, le centre catholique 1 342 113. Voilˆ une
situation o un parti solide comptant deux millions et demi de voix suffira
pour faire capituler tout gouvernement.
Mais les voix
des Žlecteurs sont loin de constituer la force principale du socialisme
allemand. Chez nous, on n'est Žlecteur qu'ˆ l'‰ge de vingt-cinq ans, mais ˆ
vingt ans on est soldat. Or, comme c'est prŽcisŽment la jeune gŽnŽration qui
fournit au parti ses conscrits les plus nombreux, il s'ensuit que l'armŽe
allemande devient de plus en plus infectŽe de socialisme. Aujourd'hui, nous
avons un soldat sur cinq, dans quelques annŽes nous en aurons un sur
trois ; vers 1900, l'armŽe, jadis l'ŽlŽment prussien par excellence en
Allemagne, sera socialiste dans sa majoritŽ. Cela s'impose comme une fatalitŽ.
Le gouvernement de Berlin la voit arriver tout aussi bien que nous, mais il est
impuissant. L'armŽe lui Žchappe [140].
Combien de .fois
les bourgeois ne nous ont-ils pas sommŽs de renoncer ˆ tout jamais ˆ l'emploi
des moyens rŽvolutionnaires, de rester dans la lŽgalitŽ, maintenant que la
lŽgislation exceptionnelle est tombŽe et que le droit commun est rŽtabli pour
tous, y compris les socialistes !
Malheureusement,
nous ne sommes pas dans le cas de faire plaisir ˆ messieurs les bourgeois. Ce
qui n'empche pas que, pour le moment, ce n'est pas nous que la lŽgalitŽ tue.
Elle travaille si bien pour nous que nous serions fous d'en sortir tant que
cela dure. Reste ˆ savoir si ce ne sera pas les bourgeois et leur gouvernement
qui en sortiront les premiers pour nous Žcraser par la violence. C'est ce que
nous attendrons. Tirez les premiers, messieurs les bourgeois !
Nul doute, ils
tireront les premiers. Un beau jour, les bourgeois allemands et leur
gouvernement, dŽgožtŽs d'assister, les bras croisŽs, aux dŽbordements toujours
croissants du socialisme, auront recours ˆ l'illŽgalitŽ et ˆ la violence. Ë
quoi bon ! La force peut Žcraser une petite secte, du moins sur un terrain
limitŽ ; mais il n'y a pas de force qui puisse extirper un parti de deux
millions d'hommes rŽpandus sur toute la surface d'un grand Empire. La violence
contre-rŽvolutionnaire [141] pourra retarder de quelques annŽes le triomphe du socialisme, mais
ce sera pour le rendre d'autant plus complet.
II
Tout ce qui
prŽcde a ŽtŽ dit sous la rŽserve que l'Allemagne pourra suivre en paix son
dŽveloppement Žconomique et politique. Une guerre changerait tout cela. Et la
guerre peut Žclater d'un moment ˆ l'autre.
La guerre
aujourd'hui, tout le monde sait ce que cela signifie. Ce serait la Russie et la
France d'un c™tŽ, l'Allemagne, l'Autriche, peut-tre l'Italie, de l'autre. Les
socialistes de tous ces pays, enr™lŽs bon grŽ mal grŽ, seraient forcŽs de se
battre les uns contre les autres : que fera, que deviendra en pareil cas
le parti socialiste allemand ?
L'Empire
allemand est une monarchie aux forces semi-fŽodales, mais dominŽe, en dernier
lieu, par les intŽrts Žconomiques de la bourgeoisie. Gr‰ce ˆ Bismarck, cet
empire a commis d'Žnormes fautes. Sa politique intŽrieure, policire,
tracassire, mesquine, indigne du gouvernement d'une grande nation, lui a valu
le mŽpris de tous les pays bourgeoisement libŽraux ; sa politique
extŽrieure a suscitŽ la mŽfiance, sinon la haine, des nations voisines. Par
l'annexion violente de l'Alsace-Lorraine, le gouvernement allemand a rendu
impossible, pour longtemps, toute rŽconciliation avec la France, sans gagner aucun
avantage rŽel pour lui-mme ; il a rendu la Russie l'arbitre de l'Europe.
Cela est si Žvident que, ds le lendemain de Sedan, le Conseil gŽnŽral de
l'Internationale a pu prŽdire la situation europŽenne d'aujourd'hui. Dans son Adresse
du 9 septembre 1870, il a dit :
Ç Les
patriotes teutons s'imaginent-ils en rŽalitŽ qu'ils vont assurer la libertŽ et
la paix en jetant la France dans les bras de la Russie ? Si l'Allemagne,
emportŽe par la fortune des armes, l'arrogance de la victoire, l'intrigue
dynastique, commettait une spoliation territoriale sur la France, de deux
choses l'une : ou elle devrait se faire ouvertement l'instrument de la
politique conquŽrante de la Russie, ou bien, aprs un court armistice, elle
aurait ˆ braver une nouvelle guerre dŽfensive, une guerre qui au lieu de
ressembler ˆ ces guerres "localisŽes" d'invention moderne, serait une
guerre contre les races slave et romane combinŽes [142]. È
Sans aucun
doute : vis-ˆ-vis de cet Empire allemand, la RŽpublique franaise, telle
qu'elle est, reprŽsente la rŽvolution bourgeoise, il est vrai, mais toujours la
rŽvolution. Mais ds que cette rŽpublique se place sous les ordres du tsarisme
russe, ce n'est plus la mme chose. Le tsarisme russe, c'est l'ennemi de tous
les peuples occidentaux, mme des bourgeois de tous ces peuples ! Les
hordes czariennes, en envahissant l'Allemagne, y porteraient l'esclavage au
lieu de la libertŽ, la destruction au lieu du dŽveloppement, l'abrutissement au
lieu du progrs. Bras dessus, bras dessous avec le tsar, la France ne peut apporter
ˆ l'Allemagne aucune idŽe libŽratrice ; le gŽnŽral franais qui parlerait
aux Allemands de rŽpublique ferait rire l'Europe et l'AmŽrique. Ce serait
l'abdication du r™le rŽvolutionnaire de la France ; ce serait permettre ˆ
l'empire bismarckien de se poser comme le reprŽsentant du progrs occidental
contre la barbarie de l'Orient.
Mais, derrire
l'Allemagne, il y a le parti socialiste allemand, et l'avenir prochain du pays.
Ds que ce parti arrivera au pouvoir, il ne pourra s'y maintenir sans rŽparer
les injustices commises par ses prŽdŽcesseurs envers d'autres nationalitŽs. Il
devra prŽparer la restauration de la Pologne, trahie aujourd'hui si
honteusement par la bourgeoisie franaise ; il devra faire appel au
Schleswig du Nord et ˆ l'Alsace-Lorraine pour dŽcider librement de leur avenir
politique. Toutes ces questions se rŽsoudront donc sans effort et dans un
avenir prochain, si on laisse l'Allemagne ˆ elle-mme. Entre une France et une
Allemagne socialistes, il ne peut y avoir de question d'Alsace-Lorraine :
le cas sera vidŽ en un clin d'Ïil. Il s'agit donc d'attendre une dizaine
d'annŽes. Le prolŽtariat franais, anglais, allemand attend encore sa
dŽlivrance ; les patriotes alsaciens-lorrains ne sauraient-ils pas attendre ?
Y a-t-il lˆ matire ˆ dŽvaster tout un continent et ˆ le soumettre, en fin de
compte, au knout tsarien ? Le jeu en vaut-il la chandelle ?
En cas de
guerre, l'Allemagne d'abord, la France ensuite en seront le thŽ‰tre
principal ; ces deux pays surtout en payeront les frais sous forme de
dŽvastation. Il y a plus. Cette guerre, ds l'abord, se distinguera par une
sŽrie de trahisons entre alliŽs comme mme les annales de la tra”tresse
diplomatie ne nous en ont pas fourni de pareilles jusqu'ici ; la France ou
l'Allemagne, ou toutes les deux, en seront les principales victimes. Il est
donc presque sžr que ni l'un ni l'autre de ces deux pays, en vue des risques ˆ
courir, ne provoquera la lutte ouverte [143]. Mais la Russie, protŽgŽe par sa position gŽographique et par sa
situation Žconomique contre les suites les plus funestes d'une sŽrie de
dŽfaites, la Russie officielle seule peut trouver son intŽrt ˆ faire Žclater
une si terrible guerre : c'est elle qui y poussera. Dans tous les cas,
Žtant donnŽ la situation politique actuelle, il y a dix contre un ˆ parier
qu'au premier coup de canon sur la Vistule, les armŽes franaises marcheront
sur le Rhin.
Alors,
l'Allemagne combat pour son existence mme. Victorieuse, elle ne trouve rien ˆ
annexer. Ë l'Est comme ˆ l'Ouest, elle ne trouve que des provinces de langue
Žtrangre ; de celles-lˆ, elle n'en a dŽjˆ que trop. Battue, ŽcrasŽe entre
le marteau franais et l'enclume russe, elle devra cŽder ˆ la Russie l'ancienne
Prusse et les provinces polonaises, au Danemark le Schleswig, ˆ la France toute
la rive gauche du Rhin, Mme si la France s'y refusait, son alliŽe lui
imposerait cette conqute ; ce qu'il faut avant tout ˆ la Russie, c'est
une cause d'inimitiŽ permanente entre la France et l'Allemagne. RŽconciliez ces deux grands pays, et c'en est fait de la
suprŽmatie russe en Europe. DŽmembrŽe de cette sorte, l'Allemagne serait
incapable de remplir sa part dans la mission civilisatrice europŽenne [144] ; rŽduite au r™le que lui avait imposŽ NapolŽon aprs Tilsit,
elle ne pourrait vivre qu'en prŽparant une nouvelle guerre de rŽhabilitation
nationale ; mais en attendant, elle serait l'humble instrument du tsar qui
ne manquerait pas de s'en servir ‑ contre la France.
Que deviendrait
en pareille circonstance le parti socialiste allemand ? Il va sans dire
que ni le tsar ni les rŽpublicains bourgeois franais, ni le gouvernement
allemand lui-mme ne laisseraient passer une si bonne occasion pour Žcraser le
seul parti qui est, pour eux tous, l'ennemi. Nous avons vu comment Thiers et
Bismarck se sont donnŽ la main sur les ruines du Paris de la Commune ;
nous verrions alors le tsar, Constans, Caprivi (ou leurs successeurs
quelconques) s'embrasser sur le cadavre du socialisme allemand.
Mais le parti
socialiste allemand, gr‰ce aux efforts et aux sacrifices ininterrompus de
trente ans, a conquis une position qu'aucun des autres partis socialistes
n'occupe, une position qui lui assure l'ŽchŽance, ˆ bref dŽlai, du pouvoir
politique. L'Allemagne socialiste occupe dans le mouvement ouvrier
international le poste le plus avancŽ, le plus honorable, le plus
responsable ; elle a le devoir de maintenir ce poste envers et contre
tous.
Maintenant, si
la victoire des Russes sur l'Allemagne signifie l'Žcrasement du socialisme dans
ce pays, quel sera le devoir des socialistes allemands dans cette
ŽventualitŽ ? Devront-ils subir passivement les ŽvŽnements qui les
menacent d'extinction, abandonner sans rŽsistance le poste conquis, dont ils
rŽpondent devant le prolŽtariat du monde entier ?
ƒvidemment non.
Dans l'intŽrt de la rŽvolution europŽenne, ils sont tenus de dŽfendre toutes
les positions acquises, de ne pas capituler, pas plus devant l'ennemi du dehors
que devant l'ennemi du dedans ; et cela, ils ne peuvent l'accomplir qu'en
combattant ˆ outrance la Russie et ses alliŽs, quels qu'ils soient. Si la
RŽpublique franaise se mettait au service de Sa MajestŽ le tsar et autocrate
de toutes les Russies, les socialistes allemands la combattraient ˆ regret,
mais ils la combattraient tout de mme. La RŽpublique franaise peut reprŽsenter,
vis-ˆ-vis de l'Empire allemand, la rŽvolution bourgeoise. Mais vis-ˆ-vis de la
rŽpublique des Constans, des Rouvier, et mme des Clemenceau, surtout de la
rŽpublique qui travaille pour le tsar russe, le socialisme allemand reprŽsente
la rŽvolution prolŽtarienne.
Une guerre o
Russes et Franais envahiraient l'Allemagne serait pour celle-ci une guerre ˆ
mort o, pour assurer son existence nationale, elle devrait avoir recours aux
moyens les plus rŽvolutionnaires. Le gouvernement actuel certainement ne
dŽcha”nerait pas la rŽvolution, ˆ moins qu'on ne l'y for‰t. Mais il y a un
parti fort, qui l'y forcerait ou, en cas de besoin, l'y remplacerait : le
parti socialiste.
Nous n'avons pas
oubliŽ le grandiose exemple que la France nous a donnŽ en 1793. Le centenaire
de quatre-vingt-treize approche. Si la soif de conqute du tsar et l'impatience
chauvine de la bourgeoisie franaise arrtent la marche victorieuse mais
paisible des socialistes allemands, ces derniers sont prts, soyez-en sžrs, ˆ
prouver que les prolŽtaires allemands d'aujourd'hui ne sont pas indignes des
sans-culottes franais d'y il y a cent ans, et que 1893 vaudra bien 1793. Et
alors les soldats de Constans, en mettant le pied sur le sol allemand, seront
saluŽs du chant de :
Quoi, ces cohortes Žtrangres
Feraient la loi dans nos
foyers ?
RŽsumons. La
paix assure la victoire du parti socialiste allemand dans une dizaine
d'annŽes ; la guerre lui offre ou la victoire dans deux ou trois ans, ou
la ruine complte, au moins pour quinze ˆ vingt ans. Dans cette position, les
socialistes allemands devraient tre fous pour prŽfŽrer le va-tout de la guerre
au triomphe assurŽ que leur promet la paix. Il y a plus. Aucun socialiste, de
n'importe quel pays, ne peut dŽsirer le triomphe guerrier, soit du gouvernement
allemand actuel, soit de la rŽpublique bourgeoise franaise ; encore moins
celui du tsar, qui Žquivaudrait ˆ la subjugation de l'Europe [145]. Voilˆ pourquoi les socialistes demandent partout que la paix soit
maintenue. Mais si nŽanmoins la guerre doit Žclater, une chose est certaine.
Cette guerre, o quinze ˆ vingt millions d'hommes armŽs s'entrŽgorgeraient et
dŽvasteraient l'Europe comme jamais elle n'a ŽtŽ dŽvastŽe, cette guerre ou bien
amnerait le triomphe immŽdiat du socialisme, ou bien elle bouleverserait
tellement l'ancien ordre des choses, elle laisserait partout aprs elle un tel
monceau de ruines que la vieille sociŽtŽ capitaliste deviendrait plus
impossible que jamais, et que la rŽvolution sociale, retardŽe de dix ˆ quinze
ans, n'en serait que plus radicale et plus rapidement parcourue.
Ainsi s'achve
l'article l'Almanach ouvrier franais [146]. Il a ŽtŽ Žcrit ˆ la fin de l'ŽtŽ, alors que l'ivresse du champagne
de Cronstadt [147] Žchauffait encore la tte de la bourgeoisie franaise et que
l'enthousiasme patriotique atteignait son paroxysme avec les grandes manÏuvres
sur les champs de bataille de 1814 entre Seine et Marne. Ë ce moment-lˆ, la
France ‑ celle qui trouve son expression dans la grande presse et la
majoritŽ de la Chambre ‑ Žtait effectivement mžre pour faire assez de
grosses btises au service de la Russie, et la possibilitŽ Žtait grande que la
guerre passe ˆ l'avant-scne. Et pour que, si elle se rŽalise, il ne surgisse
pas de malentendu entre les socialistes franais et allemands, j'ai tenu pour
nŽcessaire de clarifier pour les premiers quelle devait tre, d'aprs ma
conviction, l'attitude que ces derniers devaient adopter face ˆ une telle
guerre.
Dans
l'intervalle cependant, les provocateurs de guerre russes ont dž en rabattre
considŽrablement. La disette en Russie, qui laisse prŽsager une famine, a
d'abord ŽtŽ connue. Puis vint l'Žchec de l'emprunt russe ˆ Paris, qui signifie
l'effondrement dŽfinitif du crŽdit de l'ƒtat russe...
En un mot :
en Russie, nous n'assistons pas ˆ une disette unique, occasionnelle, mais ˆ une
gigantesque crise Žconomique prŽparŽe par une trs longue et silencieuse
rŽvolution Žconomique et rendue simplement aigu‘ par une mauvaise rŽcolte. Mais
cette crise aigu‘ prend ˆ son tour pour sa part une forme chronique et menace
de durer des annŽes. Du point de vue Žconomique, elle accŽlre la dissolution
de la commune agraire de communisme archa•que, l'enrichissement et la
transformation en grands propriŽtaires fonciers des koulaks, et en gŽnŽral le
transfert de la propriŽtŽ nobiliaire et agraire dans les mains de la nouvelle
bourgeoisie.
Pour l'Europe,
elle signifie pour le moment la paix. Les clameurs de guerre russes
s'Žteindront pour une sŽrie d'annŽes. Des millions de paysans russes meurent de
faim au lieu que des millions de soldats tombent sur les champs de bataille.
Attendons encore un peu ce qui va en rŽsulter pour le despotisme russe.
Le parti de classe. Tome IV. ActivitŽs de classe du parti
Index des noms citŽs
ADAM :
ouvrier franais ; blanquiste, membre de la SociŽtŽ universelle des
communistes rŽvolutionnaires, fondŽe sous la monarchie de Juillet ; en
1850, l'un des dirigeants de l'Association des
ŽmigrŽs blanquistes de Londres.
ADLER Georg,
1863-1908 Žconomiste bourgeois, publiciste ; socialiste de la chaire, auteur
de divers ouvrages traitant de questions politiques et sociales.
ADLER Victor,
1852-1918 : mŽdecin, participa ˆ la fondation du parti social-dŽmocrate
autrichien, dont il fut l'un des dirigeants les plus marquants ; entretint
une correspondance suivie avec Engels, de 1889 ˆ 1895 ; dŽlŽguŽ au congrs
de 1889 de l'Internationale ouvrire socialiste ; rŽdacteur de la
Gleichheit et de la Arbeiter-Zeitung ˆ Vienne ; plus tard, fit partie de l'aile opportuniste du
parti social-dŽmocrate autrichien et de la IIe Internationale.
ALBERT Alexandre
(Martin, nom de famille vŽritable), 1815-1895 : ouvrier franais,
socialiste ; membre de l'organisation secrte blanquiste, crŽŽe sous la
monarchie de Juillet ; membre du gouvernement provisoire en 1848.
ALERINI Charles
(nŽ vers 1842) : anarchiste franais, nŽ en Corse ; membre de la
Section marseillaise de
l'A. I.T.,
organisa la Commune ˆ Marseille en avril 1871 ; aprs son Žcrasement,
Žmigra en Italie, puis en Espagne, o il propagea l'anarchisme ; rŽdacteur
du journal SolidaritŽ rŽvolutionnaire ˆ Barcelone ;
en 1872, dŽlŽguŽ au congrs de La Haye de l'A.I.T. ; fut exclu le 30 mai
1873 par dŽcision du Conseil gŽnŽral.
ALONZO :
dirigeant ouvrier anglais.
AMOUROUX :
communard, membre du comitŽ central de la Commune.
ANNECKE
Friedrich, vers 1818-1872 : officier d'artillerie prussien, chassŽ de
l'armŽe prussienne en 1846 pour activitŽ rŽvolutionnaire ; membre de la
Commune de Cologne, de la Ligue des communistes ; fondateur et secrŽtaire
de l'Union ouvrire de Cologne en 1848 ; commandant de l'artillerie dans
l'armŽe rŽvolutionnaire durant le soulvement de 1849 de Bade et du
Palatinat ; colonel durant la guerre civile aux ƒtats-Unis (1861-1865)
dans l'armŽe nordiste.
APPLEGARTH
Robert, 1833-1925 charpentier, l'un des dirigeants rŽformistes des syndicats
anglais ; secrŽtaire gŽnŽral de la confŽdŽration des charpentiers et
menuisiers de 1862 ˆ 1871 ; membre du Conseil des syndicats de Londres,
ainsi que du Conseil gŽnŽral de l'A.I.T. en 1865, 1868-1872 ; dŽlŽguŽ au
congrs de B‰le de l'A.I.T. de 1869 ; dirigeant de la Ligue pour la
RŽforme ; en 1871, il refusa de signer l'Adresse du Conseil gŽnŽral de
l'A.I.T. sur la Guerre civile en France ; cessa plus tard toute activitŽ
dans le mouvement.
ASSI
Adolphe-Alphonse, 1841-1886 : ouvrier mŽcanicien ; proudhonien de
gauche, membre de la section parisienne de l'A.I.T., poursuivi lors du
troisime procs de l'Internationale. Il organisa les rŽsistances ouvrires au
Creusot en 1870. Membre du comitŽ central de la Garde nationale et de la
Commune de Paris pour le XIe arrondissement ; aprs la chute de
la Commune, dŽportŽ en Nouvelle-CalŽdonie o il mourut.
AUER Ignace,
1846-1907 : sellier, publiciste ; adhŽra ds 1869 au parti ouvrier
social-dŽmocrate allemand ; secrŽtaire de l'exŽcutif du parti en
1874 ; de 1875 ˆ 1877, l'un des deux secrŽtaires du parti ouvrier
socialiste d'Allemagne ; rŽdacteur de la Berliner Freie Presse en 1877 ; dŽputŽ au Reichstag (1877-1878, 1880-1881, 1884-1887
et 1890-1907) ; jusqu'en 1893, il soutint surtout Bebel dans les polŽmiques
intŽrieures du parti, puis il glissa de plus en plus vers l'opportunisme.
AVELING Edward,
1851-1898 : biologiste et auteur dramatique ; traduisit, avec Samuel
Moore, le premier livre du Capital ; compagnon
de la fille de Marx Eleanor ; milite ˆ la Social Democratic Federation ; en 1884, participe ˆ la fondation de la Socialist League, dont il se retira lorsque celle-ci vira ˆ l'anarchisme ; avec
sa compagne, organisa le mouvement de masse et les syndicats des ouvriers non
qualifiŽs dans les annŽes 1880 ; dŽlŽguŽ au congrs de l'Internationale ouvrire
socialiste de 1889.
AVRIAL Augustin,
1840 : ouvrier mŽcanicien ; proudhonien de gauche, membre du Conseil
fŽdŽral de la section parisienne de lÕA.I.T. ; membre de la Commune, condamnŽ
ˆ mort, il parvint ˆ se rŽfugier en Alsace, puis ˆ Žmigrer en Angleterre, o il
participa durant quelque temps ˆ la Section franaise de 1871.
BABEUF
Franois-No‘l (Gracchus), 1760-1797 : rŽvolutionnaire franais, fondateur
du premier Ç parti communiste rŽellement agissant È (Marx) ;
dirigea avec Buonarroti et DarthŽ, la conjuration des ƒgaux en 1796 ;
exŽcutŽ en 1797.
BAKOUNINE
Micha•l Alexandrovitch, 1814-1876, nŽ ˆ Torjok en Russie Žmigra en France o il
se lia avec George Sand, Proudhon et les dirigeants de l'Žmigration
polonaise ; participa ˆ l'insurrection de Dresde en 1849 ; influena
idŽologiquement le mouvement populiste ; adhŽra ˆ la Ire
Internationale et mena une lutte acharnŽe contre le Conseil central de Londres
et Marx ; fut exclu de l'Internationale en 1872 au congrs de La Haye.
BANGYA Jean,
1817-1868 : journaliste et officier hongrois ; participa en 1848-1849
ˆ la rŽvolution de Hongrie ; aprs la dŽfaite, devint l'Žmissaire de
Kossuth ˆ l'Žtranger, en mme temps qu'il servit la police ; entra dans
l'armŽe turque sous le nom de Mohamed Bey ; fut l'agent de la Turquie au
Caucase lors de la guerre de Tchercassie contre la Russie, de 1855 ˆ 1858.
BARBéS Armand,
1809-1870, nŽ ˆ Pointe-ˆ-Pitre en Guadeloupe : l'un des chefs de la
sociŽtŽ secrte des Saisons sous la monarchie de Juillet ; condamnŽ ˆ mort
aprs le mouvement du 12 mai 1839, sa peine fut commuŽe en dŽtention
perpŽtuelle ; libŽrŽ de prison en 1848, fut Žlu dŽputŽ ˆ l'AssemblŽe
constituante o il soutint la politique de Ledru-Rollin. Il participa au
mouvement du 15 mai 1849, fut emprisonnŽ ˆ Belle-Ile-en-Mer ; amnistiŽ en
1854 par NapolŽon III, se condamna ˆ un exil volontaire ; cessa peu aprs
de toute activitŽ politique.
BARRY Maltman,
1842-1909 : journaliste anglais, socialiste ;
membre de
l'A.I.T., fut dŽlŽguŽ au congrs de La Haye en 1872 ; entra au Conseil
gŽnŽral en 1872 et au Conseil fŽdŽral britannique jusqu'en 1873 ; il
soutint Marx-Engels dans leur lutte contre les partisans de Bakounine et les
dirigeants rŽformistes anglais des syndicats ; continua son activitŽ
militante aprs la dissolution de l'Internationale. Journaliste au conservateur
Standard, il soutint la prŽtendue Ç aile socialiste È
des conservateurs dans les annŽes 1890.
BARTHƒLƒMY
Emmanuel, nŽ vers 1820-1855 : ouvrier franais,
blanquiste ;
membre de sociŽtŽs secrtes rŽvolutionnaires sous la monarchie de
Juillet ; participa au soulvement de juin 1848 ˆ Paris, puis Žmigra en
Angleterre. L'un des dirigeants de l'association des ŽmigrŽs blanquistes de
Londres, se joignit en 1850 ˆ la fraction petite-bourgeoise Willich-Schapper de
la Ligue des communistes ; fut exŽcutŽ en 1855 ˆ Londres.
BASTELICA AndrŽ,
1845-1884 : typographe, milita dans le mouvement ouvrier franais et
espagnol ; membre de l'A.I.T., participa aux actions rŽvolutionnaires de
Marseille (octobre-novembre 1870) ; membre de la Commune de Paris ;
membre du Conseil gŽnŽral de l'A.I.T. (1871), dŽlŽguŽ ˆ la confŽrence de
Londres (1871) ; prit parti pour Bakounine contre Marx.
BASTIDE Jules,
1800-1879 : homme politique franais, publiciste ; rŽpublicain
bourgeois, directeur du journal Le National (1836 ˆ 1846) ; dŽputŽ ˆ
l'AssemblŽe nationale constituante, devint ministre des Affaires extŽrieures du
gouvernement provisoire aprs fŽvrier 1848.
BAUER Edgar,
1820-1886 : publiciste allemand, jeune hŽgŽlien ; Žmigra en
Angleterre aprs la rŽvolution de 1848-1849 ; devint fonctionnaire
prussien aprs l'amnistie de 1861 ; frre de Bruno Bauer.
BAUER
Heinrich : cordonnier, originaire de Franconie, l'un des dirigeants de la Ligue
des Justes et de l'Association allemande de formation
des ouvriers de Londres ; membre du Conseil
central de la Ligue des communistes, dont il fut
lÕŽmissaire en Allemagne d'avril ˆ mai 1850. Il Žmigra en Australie en 1851.
BEALES Edmond,
1803-1881 : juriste anglais, radical bourgeois ; prŽsident de la British
National League for the Independence of Poland, l'un des dirigeants de la Emancipation Society, qui pr™na l'abolition de l'esclavage des noirs et soutint les
ƒtats du Nord durant la guerre civile aux ƒtats-Unis (1861-1865) ;
prŽsident de la Reform League (1865 ˆ 1869).
BEAULIEU,
LEHARDY DE, Jean-Charles-Marie-Joseph, 1802-1871 Žconomiste belge, partisan du
libre-Žchange.
BEBEL August,
1840-1913 : tourneur, l'un des dirigeants les plus marquants du mouvement
ouvrier allemand et international ; ami et disciple de Marx-Engels ;
ds 1863, organisa la fŽdŽration des unions ouvrires allemandes dont il fut le
prŽsident en 1867 ; membre de l'A.I.T. en 1866 ; l'un des principaux
fondateurs du parti ouvrier social-dŽmocrate allemand en 1869 ; dŽputŽ du
Reichstag de l'Allemagne du Nord (1867-1870) et du Reichstag allemand
(1871-1881 et 1883-1913) ; il vota contre les crŽdits de guerre au moment
de la guerre franco-prussienne de 1870 ; il s'opposa avec vigueur aux desseins
annexionnistes de Bismarck et soutint courageusement la Commune de Paris ;
pr™nait une unification de l'Allemagne par la voie rŽvolutionnaire et
dŽmocratique. De 1878 ˆ 1890, dirigea la social-dŽmocratie allemande ;
fort des conseils d'Engels, remporta la lutte contre la loi antisocialiste.
BECKER August,
1814-1871 : publiciste, collabora ˆ La Gazette rhŽnane (1842) et au VorwŠrts (1844) ;
membre de la Ligue des Justes en Suisse ; partisan de Weitling ; il
participa ˆ la rŽvolution allemande de 1848-1849, et Žmigra dans les annŽes
1850 aux ƒtats-Unis, o il collabora ˆ divers journaux dŽmocratiques.
BECKER B. :
ŽmigrŽ allemand aux ƒtats-Unis ; membre de la SociŽtŽ des gymnastes
allemands vers les annŽes 1850 en AmŽrique.
BECKER Bernhard,
1826-1882 : Žcrivain et journaliste allemand ; dŽlŽguŽ de l'Association
de formation des ouvriers de Francfort au congrs
de fondation de l'Association gŽnŽrale des ouvriers allemands qu'il prŽsida sans Žclat de 1864 ˆ 1865. En 1870, adhŽra au parti social-dŽmocrate
ouvrier ; dŽlŽguŽ au congrs de La Haye de l'A.I.T., en 1872, se dŽtourna
de l'activitŽ au sein du mouvement ouvrier en 1874, et publia en 1879 un
pamphlet contre la Commune.
BECKER Hermann
Heinrich, Ç Becker le Rouge È, 1820-1885 juge supplŽant et
publiciste ; membre de la SociŽtŽ dŽmocratique de Cologne en 1848 et membre du comitŽ directeur de la SociŽtŽ
pour les ouvriers et les employeurs ; il fut
Žlu au comitŽ de district rhŽnan des dŽmocrates et au comitŽ de sžretŽ de Cologne ;
journaliste ˆ la Westdeutsche Zeitung, de mai
1849 ˆ juillet 1850 ; membre de la Ligue des communistes en 1850, fut condamnŽ ˆ cinq ans de forteresse lors du procs des
communistes ; fut plus tard national-libŽral ; dŽputŽ du Parti du
progrs ˆ la Dite prussienne ˆ partir de
1862 ; membre du Reichstag de l'Allemagne du Nord et du Reichstag
allemand, de 1867 ˆ 1874 ; maire de Dortmund de 1875-1885, puis de
Cologne.
BECKER Johann
Philipp, 1809-1886 : brossier, originaire du Palatinat ; de la
dŽmocratie bourgeoise passa au socialisme ; prit la parole ˆ la fte
dŽmocratique de Hambach en 1830 ; commandant en chef de la milice
populaire de Bade en 1849, il fut Ç le seul gŽnŽral de la rŽvolution
allemande È (Engels) ; ˆ partir de 1860, devint l'ami et le compagnon
de lutte de Marx-Engels ; en 1864 fut l'un des fondateurs de la section
genevoise de l'A.I.T. ; en 1865 prŽsident de la section allemande du
comitŽ central de l'A.I.T. pour la Suisse, et de 1866 ˆ 1871, prŽsident de la
section regroupant les membres de langue allemande de l'A.I.T. Directeur et journaliste
du Vorbote, il fut dŽlŽguŽ ˆ toutes les
confŽrences et ˆ tous les congrs de l'A.I.T. Jusqu'ˆ la fin de sa vie resta
infatigablement ˆ la tte du mouvement ouvrier suisse et se dŽvoua ˆ la cause internationale.
BEESLY Edward
Spencer, 1831-1915 : historien et homme politique anglais ; radical
de tendance bourgeoise et positiviste ; professeur ˆ l'universitŽ de
Londres ; il prŽsida l'assemblŽe inaugurale de l'A.I.T. du 28 septembre
1864 ˆ St Martin's Hall ; en 1870-1871, intervint dans la presse anglaise
en faveur de l'Internationale et de la Commune de Paris ; se lia d'amitiŽ
avec Marx.
BERENDS
Julius : propriŽtaire d'une imprimerie ˆ Berlin ; dŽmocrate
petit-bourgeois ; chef de l'union des artisans berlinois et dŽputŽ ˆ
l'AssemblŽe nationale prussienne (aile gauche) ; Žmigra en AmŽrique en
1853.
BERNSTEIN
Eduard, 1850-1932 : rŽdacteur et publiciste ; adhŽra au parti
social-dŽmocrate ouvrier allemand en 1872 ; comme secrŽtaire littŽraire de
Karl Hšchberg, s'installa ˆ Zurich en 1878 ; lia connaissance avec
Marx-Engels en dŽcembre 1880, et depuis entretint une ample correspondance,
notamment avec Engels. Il passa graduellement au marxisme sous cette
influence ; rŽdacteur au Sozial-demokrat
(1881-1890) ; prit ouvertement une position opportuniste ˆ partir de 1896,
et Ç donna une expression caractŽristique au rŽvisionnisme È
(LŽnine) ; il devint l'un des chefs de l'aile droite de la
social-dŽmocratie allemande et de la IIe Internationale.
BERTRAND F.I. :
militant du mouvement ouvrier amŽricain, cigarier de souche allemande ;
secrŽtaire-correspondant de la section 6 de l'A.I.T. ˆ New York ; membre
du conseil fŽdŽral des sections nord-amŽricaines et rŽdacteur de la Arbeiter-Zeitung ; Žlu au Conseil gŽnŽral par le congrs de La Haye.
BESLAY Charles,
1795-1878 : entrepreneur de travaux publics, banquier, publiciste et homme
politique ; membre de l'A.I.T., proudhonien ; membre de la Commune
(VIe arrondissement) et de la Commission des finances ; dŽlŽguŽ
de la Commune ˆ la Banque de France ; il s'opposa ˆ la nationalisation de
la banque et ˆ l'immixtion dans ses affaires (ce que Marx critiqua) ;
aprs l'Žcrasement de la Commune, Žmigra en Suisse.
BISKAMP
Elard : journaliste et dŽmocrate petit-bourgeois ; participa ˆ la
rŽvolution allemande de 1848-1849, et Žmigra ˆ Londres aprs la dŽfaite de la
rŽvolution.
BISMARCK Otto,
prince de, 1815-1898 : homme d'ƒtat et diplomate prussien ;
reprŽsentant des intŽrts des hobereaux prussiens ; prŽsident du Conseil
prussien (1873 ˆ 1890) et chancelier d'Empire (1871 ˆ 1890) ; rŽalisa
l'unitŽ de l'Allemagne par le haut, de manire mi-rŽvolutionnaire,
mi-contre-rŽvolutionnaire, au moyen de guerres dynastiques (en 1866, contre
l'Autriche et ses alliŽs, les petits ƒtats de l'Allemagne mŽridionale ; en
1870-1871, contre la France bonapartiste) ; en politique intŽrieure,
assura l'alliance entre la grande bourgeoisie et les hobereaux, renforant
ainsi la bureaucratie et le militarisme prussiens ; ennemi acharnŽ du mouvement
ouvrier, il promulgua en 1878 la loi antisocialiste qui fut abrogŽe en 1890
gr‰ce ˆ la lutte ouvrire, ‑ ce qui dŽtermina, en fin de compte, sa
chute.
BLANC
Jean-Joseph-Louis, 1811-1882 : socialiste petit-bourgeois, journaliste et
historien ; participa au gouvernement provisoire et prŽsida la commission
du Luxembourg en 1848 ; dŽfendit une politique de conciliation entre les
classes et de pactisation avec la bourgeoisie ; en aožt 1848, Žmigra en
Angleterre, ou il devint le chef de l'Žmigration petite-bourgeoise ;
dŽputŽ de l'AssemblŽe nationale en 1871, prit position contre la Commune.
BLANQUI
Louis-Auguste, 1805-1881 : rŽvolutionnaire franais d'un courage et dune
fermetŽ exceptionnels ; organisateur de multiples sociŽtŽs secrtes et de
plusieurs conjurations cŽlbres (soulvement des Quatre Saisons, le 13 mai
1840) ; au cours de la rŽvolution de 1848, fut ˆ l'extrme-gauche du
mouvement dŽmocratique et prolŽtarien ; fut l'un des chefs du soulvement
du 31 octobre 1870, qui prŽluda ˆ la Commune ; condamnŽ ˆ mort le 9 mars
1871 par un conseil de guerre pour sa participation ˆ la journŽe du 31 octobre,
il fut arrtŽ ˆ la veille du 18 mars ; Žlu membre de la Commune (XVIIIe
et XIXe arrondissements), il fut dŽtenu au fort du Taureau pendant
la Commune. Dans l'Adresse sur la Commune, Marx
Žcrit que Thiers l'avait fait emprisonner prŽventivement, car Ç il savait
qu'avec Blanqui il donnerait une tte ˆ la Commune È ; dŽputŽ en 1879
ˆ Bordeaux, son Žlection fut invalidŽe ; libŽrŽ de la prison de Clairvaux
le 10 juin 1879, il avait passŽ trente-six ans de sa vie en prison.
BLEICHROEDER
Gerson von, 1822-1893 : directeur d'une grande banque berlinoise et
banquier privŽ de Bismarck, dont il fut le conseiller officieux en matire
financire, en mme temps que l'intermŽdiaire dans diffŽrentes opŽrations en
Bourse.
BLIND Karl,
1826-1907 : Žcrivain et journaliste ; dŽmocrate
petit-bourgeois ; participa ˆ la rŽvolution de 1848-1849 en Bade et entra
au gouvernement provisoire de ce pays en 1849 ; l'un des chefs de l'Žmigration
petite-bourgeoise allemande au cours des annŽes 1850 ˆ Londres ; devint
national-libŽral, puis partisan de Bismarck.
Blos Wilhelm,
1849-1927 : journaliste et historien allemand ; membre du parti
social-dŽmocrate ouvrier, de 1872 ˆ 1874 ; fit la connaissance de Marx en
1874, collabora ˆ la Neue Zeit et ˆ la Neue
Welt ; membre du Reichstag, fit partie de
l'aile droite, devint social-chauvin en 1914 ; aprs la rŽvolution de
novembre 1918, prŽsida le gouvernement provisoire et devint prŽsident de l'ƒtat
du Wurtemberg de 1919 ˆ 1920.
BOBCZINSKI
Constantin : prit part ˆ l'insurrection polonaise de 1863 ; Žmigra
ensuite ˆ Londres ; membre du Conseil gŽnŽral de l'A.I.T.
(1865-1868) ; secrŽtaire-correspondant pour la Pologne (ˆ partir de mai
1866) ; dŽlŽguŽ ˆ la confŽrence de Londres (1865) ; alla s'installer
ˆ Birmingham en 1866.
BOLTE
Friedrich : cigarier, de souche allemande : ŽlŽment marquant du
mouvement ouvrier amŽricain ; secrŽtaire gŽnŽral du Conseil fŽdŽral des
sections nord-amŽricaines de l'A.I.T. en 1872, et membre de la rŽdaction de la Arbeiter-Zeitung ; fut Žlu au Conseil gŽnŽral par le congrs de La Haye ; exclu
de l'A.I.T. pour avoir dŽfendu une position erronŽe en 1874 dans la Arbeiter-Zeitung.
BORN Stefan
(Simon Buttermilch), 1824-1898 : typographe, membre de la Ligue des
communistes, travailla ˆ la fois comme typographe et journaliste ˆ la Deutsche
BrŸsseler Zeitung ; organisa et dirigea la
FraternitŽ ouvrire, de 1848 ˆ 1849, puis se retira
du mouvement pour se fixer en Suisse comme professeur de littŽrature et publiciste
dŽmocrate.
BORNSTEDT
Adalbert von, 1808-1851 : ancien officier prussien, publiciste et
dŽmocrate petit-bourgeois ; Žditeur et rŽdacteur de la Deutsche
BrŸsseler Zeitung (1847-1848) ; membre de la
Ligue des communistes, en fut exclu en mars 1848 ; critiquŽ par Marx, il
organisa ˆ Paris une lŽgion allemande qui devait faire la rŽvolution en Allemagne ;
participa au soulvement de Bade en avril 1848 ; agent du gouvernement
prussien depuis les annŽes 1840.
B…RNSTEIN
Heinrich, 1805-1892 : dŽmocrate allemand, fondateur du VorwŠrts de Paris, auquel Marx collabora en 1844 ; aprs 1848, Žmigra
aux ƒtats-Unis et participa ˆ la guerre civile (1861-1865).
BOUGEART Alfred,
1815-1882 : publiciste franais de gauche,
auteur de
nombreux textes sur la rŽvolution franaise.
BOUSQUET Abel,
anarchiste franais, fut exclu de l'A.I.T. comme mouchard de police.
BOWRING Sir
John, 1792-1872 : homme politique anglais, littŽrateur et spŽcialiste des
langues ; disciple de Bentham et partisan du libre-Žchange ; joua un
r™le primordial dans la colonisation de l'Extrme-Orient par l'Angleterre.
BRACKE Wilhelm,
1842-1880 : Žditeur et libraire ; participa ˆ la fondation du parti
social-dŽmocrate ouvrier allemand, il y dŽfendit les conceptions marxistes. En
1865, il fonda la commune de Brunswick de l'Association gŽnŽrale des
ouvriers allemands, dont il devint le trŽsorier
gŽnŽral en 1867 ; il y mena l'opposition dans le sens de Bebel-Liebknecht
en vue de la formation d'un parti marxiste. Il fut Žlu au comitŽ directeur lors
du congrs d'Eisenach ; arrtŽ avec les autres membres du comitŽ en
septembre 1870 pour avoir dŽfendu le manifeste de Marx stigmatisant les visŽes
impŽrialistes et annexionnistes de Bismarck, condamnŽ au procs de Brunswick
pour haute trahison. Il fut Žlu au Reichstag en 1877 ; ses Žcrits
contriburent ˆ mettre en pices le lassallŽanisme et ˆ introduire le marxisme
en Allemagne. Ce fut l'un des proches de Marx et d'Engels.
BRAY John
Francis, 1809-1895 : typographe, socialiste utopique anglo-amŽricain,
disciple d'Owen en Žconomie ; trŽsorier de la Leed's Working Men's
Association crŽŽe par lui en 1837 ; revint en
AmŽrique en 1842.
BRENTANO Lorenz
Peter, 1813-1891 : juriste de Mannheim, dŽmocrate petit-bourgeois ;
en 1848, membre de la gauche ˆ l'AssemblŽe nationale de Francfort ; en
1849, prŽsident du gouvernement provisoire de Bade ; Žmigra ensuite en
Suisse, puis en AmŽrique.
BRENTANO Lujo
(Ludwig Joseph), 1844-1931 : Žconomiste de
la jeune Žcole
historique allemande, socialiste de la chaire ; cofondateur d'une sociŽtŽ
pour la politique sociale, en 1872.
BRIGHT John,
1811-1889 : fabricant anglais, reprŽsentant en vue du libre-Žchange,
cofondateur de la Ligue anticŽrŽalire ; au dŽbut des annŽes 1860, chef de
l'aile gauche du parti libŽral, fut plusieurs fois ministre dans les cabinets
libŽraux.
BRISBANE Albert
(Henry dans La Nouvelle Gazette rhŽnane),
1809-1890 : journaliste amŽricain, rŽdacteur de la New York Daily
Tribune, partisan de Fourier.
BUCHEZ
Philippe-Joseph-Benjamin (1796-1865) : homme politique franais,
historien, rŽpublicain bourgeois ; lÕun des idŽologues du socialisme
catholique, disciple de Saint-Simon ; il prŽsida le gouvernement
provisoire en 1848.
B†CHNER Georg,
1813-1837 : pote allemand, dŽmocrate rŽvolutionnaire, porte-parole
littŽraire de la lutte contre la rŽaction absolutiste et fŽodale, Žditeur des Hessische
Landbote, auteur du pamphlet Ç Paix dans les
chaumires ! Guerre aux palais ! È ; dut quitter l'Allemagne
en 1834 sous la pression policire.
BUCKLEY
James : syndicaliste anglais, membre de l'A.I.T. (novembre 1864-1869) et
membre de la Ligue pour la RŽforme.
B†RGERS
Heinrich, 1820-1878 : publiciste de tendance radicale ; collabora ˆ La
Gazette rhŽnane de 1842 ˆ 1843 ; membre de la
commune de Cologne de la Ligue des communistes ; collabora ˆ La Nouvelle
Gazette rhŽnane en 1848-1849 et adhŽra ˆ l'Union
ouvrire de Cologne ainsi qu'au comitŽ de sžretŽ.
Il entra en 1850 au Conseil central de la Ligue des communistes et fut condamnŽ
ˆ six ans de prison au procs de Cologne, comme Žtant l'une des ttes de la
Ligue des communistes ; devint plus tard national-libŽral.
BURNS John,
1858-1943 : ŽlŽment marquant du mouvement ouvrier anglais ; l'un des
dirigeants du nouveau syndicalisme dans les annŽes 1880, organisa la grve des
dockers de Londres en 1889 ; passa au syndicalisme libŽral dans les annŽes
1890 ; entra au Parlement en 1892, et devint ministre pour les Affaires
communales (1905-1914) et pour le Commerce (1914).
BURNS Lydia
(Lizzy, Lizzie), 1827-1878 : ouvrire irlandaise, compagne de Fr. Engels,
participa ˆ la lutte nationale irlandaise.
BURT Thomas,
1837‑1922 : mineur anglais, syndicaliste, secrŽtaire du syndicat des
mineurs de Northumberland ; membre du Parlement (1874-1918) ; il
dŽfendit la politique du parti libŽral.
BUTT Isaac,
1813-1879 : juriste et homme politique irlandais ; membre du
Parlement, se dŽvoua ˆ la cause des Fenians incarcŽrŽs dans les annŽes
1860 ; en 1873, chef de la Home Rule League
qui lutta pour un gouvernement autonome en Irlande.
CABET Etienne,
1788-1856 : socialiste utopique, reprŽsenta une phase progressive du
mouvement ouvrier franais ; attaqua violemment le rŽgime de
Louis-Philippe, notamment dans son journal le Populaire de 1841 ; en 1842, publia son Voyage
en Icarie, contribution importante au dŽveloppement
des idŽes communistes en France ; il ne joua plus qu'un r™le effacŽ lors
de la prŽparation immŽdiate de la rŽvolution de 1848 ; tenta de rŽaliser
ses thŽories au Texas, puis en Illinois.
CAMELINAT
Zephyrin, 1840-1892 : ouvrier du bronze ; reprŽsentant du mouvement
ouvrier italien et franais ; durant sa correspondance avec Engels (1871),
appliqua la ligne du Conseil gŽnŽral en Italie ; aprs 1872, devint l'un
des dirigeants des organisations anarchistes italiennes ; ˆ la fin des annŽes
1870, il se dŽtourna de l'anarchisme. En 1879, il fit un bref rŽsumŽ du premier
livre du Capital en langue italienne.
CAPRIVI Leo,
comte de, 1831-1899 : homme d'ƒtat et gŽnŽral prussien chancelier ˆ la
suite de la chute de Bismarck (1890-1894).
CARL Conrad,
mort en 1890 : tailleur, d'origine allemande, Žmigra aux ƒtats-Unis vers
1851 et participa activement au mouvement amŽricain ; membre du comitŽ
central de la fŽdŽration nord-amŽricaine de l'A. 1. T. et rŽdacteur ˆ la Arbeiter-Zeitung ; fut Žlu au Conseil central par le congrs de La Haye ;
fut exclu du Conseil gŽnŽral pour activitŽ dŽsorganisatrice.
CARLYLE Thomas
1795-1881 : Žcrivain anglais ; historien et philosophe
idŽaliste ; pr™nait le culte du hŽros et critiquait la bourgeoisie
anglaise du point de vue du romantisme rŽactionnaire ; rejoignit les rangs
des conservateurs ; ennemi dŽclarŽ du mouvement ouvrier aprs 1848.
CARTER
James : ouvrier anglais, parfumeur ; participa activement au
mouvement ouvrier ; membre de la Reform League et du Conseil gŽnŽral de l'A.I.T. (octobre 1864-1867). Il fut
secrŽtaire-correspondant pour l'Italie (1866-1867) ; participa ˆ la
confŽrence de Londres (1865), au congrs de Genve et de Lausanne de
l'A.I.T.
CETTI :
dŽlŽguŽ amŽricain, Žlu au Conseil gŽnŽral par le congrs de La Haye.
CHALAIN
Louis-Denis : ouvrier du bronze ; proudhonien, participa ˆ la
Commune, membre de la commission de la SžretŽ publique ainsi que de la
commission du Travail et de l'ƒchange ; condamnŽ ˆ mort par contumace,
Žmigra en Angleterre aprs la chute de la Commune ; fut Žlu membre du
Conseil gŽnŽral (sept.-nov. 1871) ; appartint ˆ la Section franaise de
1871 durant quelque temps, puis rejoignit les
anarchistes.
CHAMPION Henry
Hyde, 1857-1928 : Žditeur et publiciste anglais ; membre de la Social
Democratic Federation jusqu'en 1887 appartint
ensuite ˆ la direction de la Labour Electoral Association des syndicats de Londres ; rŽdacteur et Žditeur du Labour
Elector, entretint passagrement des relations
secrtes avec les conservateurs ; en 1894, il Žmigra en Australie o il
participa activement au mouvement ouvrier australien.
CHEMALƒ
FŽlix-Eugne, nŽ vers 1839 : architecte franais, proudhonien de
gauche ; dŽlŽguŽ au congrs de Genve, de Lausanne et de B‰le de l'A.I.T.
CLAFLIN
Tenessee, 1845-1923 : fŽministe bourgeoise des ƒtats-Unis ; avec sa
sÏur Victoria Woodhull publia Woodhull and Clajlin's Weekly ; chercha ˆ utiliser lÕInternationale ˆ ses fins.
CLEMENCE :
membre de la Commune.
CLUSERET
Gustave-Paul, 1823-1900 : dŽmocrate franais petit-bourgeois ; en
juin 1848, combattit dans la Garde nationale les ouvriers parisiens ; en
1859, aide de camp de Garibaldi ; durant la guerre civile amŽricaine, aide
de camp ˆ lÕŽtat-major de Mac Clellan ; prit part au mouvement des Fenians
irlandais ; adhŽra ˆ l'Internationale et se mla aux intrigues des
bakouninistes ; il participa aux soulvements rŽvolutionnaires de Lyon et
de Marseille (1870) ; membre de la Commune, il en fut le dŽlŽguŽ ˆ la
guerre en avril 1871. Aprs l'Žcrasement de la Commune, Žmigra en
Belgique ; aprs l'amnistie, il revint en France et fut Žlu dŽputŽ en
1888 ; il fut dŽlŽguŽ au congrs de l'Internationale socialiste en 1889.
CLuss
Adolf : ingŽnieur, membre de la Ligue des communistes ; en 1848,
secrŽtaire de l'Association pour la formation des ouvriers ˆ Mayence ;
Žmigra en 1859 aux ƒtats-Unis et resta en correspondance avec
Marx-Engels ; collabora ˆ diffŽrents journaux dŽmocratiques des
ƒtats-Unis, d'Allemagne et d'Angleterre.
COBDEN Richard,
1804-1865 : fabricant de Manchester ; partisan du
libre-Žchange ; participa ˆ la fondation de la Ligue anticŽrŽalire ;
membre du Parlement.
COENEN
Philippe : cordonnier, reprŽsentant du mouvement ouvrier belge ;
secrŽtaire de rŽdaction du journal ouvrier d'Anvers De Werker ; membre de lÕA.I. T., dŽlŽguŽ au congrs de Bruxelles (1868),
ˆ la confŽrence de Londres (1871), au congrs de La Haye (1872), o il soutint
les bakouninistes ; il participa plus tard ˆ la fondation du parti
socialiste belge.
COHN (ou Cohen)
James : cigarier anglais, participa activement au mouvement ouvrier
anglais et danois ; fut prŽsident du syndicat des cigariers de Londres et
membre du Conseil gŽnŽral de l'A.I.T. (1870-1871) ; fut
secrŽtaire-correspondant pour le Danemark ; dŽlŽguŽ au congrs de
Bruxelles (1868) et ˆ la confŽrence de Londres (1871) de lÕA.I.T.
COMBAULT
AmŽdŽe-Benjamin, vers 1838-1885 : ouvrier bijoutier ; ŽmigrŽ ˆ
Londres, il adhŽra ˆ l'A.I.T. et devint membre du Conseil gŽnŽral
(1866-1867) ; prit ensuite une part active ˆ l'organisation de l'Internationale
ˆ Paris, poursuivi au 2e procs (1868) et au 3e (1870) de
l'A.I.T. et condamnŽ ˆ un an de prison ; il participa ˆ la Commune de
Paris et fut dŽlŽguŽ ˆ l'Enregistrement.
CREMER Willian
Randall, 1838-1908 : membre actif des syndicats et du mouvement pacifiste
de tendance rŽformiste ; lÕun des fondateurs et dirigeants de la
fŽdŽration syndicale des charpentiers et menuisiers ; membre du Conseil
fŽdŽral des syndicats de Londres, de la Ligue nationale anglaise pour
lÕindŽpendance de la Pologne, de la Land and
Labour League. Il fut membre du Conseil central de
l'A.I.T. et son secrŽtaire gŽnŽral (1864-1866) ; participa ˆ la confŽrence
de Londres (1865), au congrs de Genve (1866) ; il fit partie de la Reform
League ; s'opposa bient™t ˆ la tactique rŽvolutionnaire
du Conseil gŽnŽral et pactisa avec la bourgeoisie lors de l'agitation pour la
rŽforme Žlectorale ; adhŽra finalement au parti libŽral et fut Žlu au
Parlement (1885-1895 ; 1900-1908).
CRESPELLE :
membre de la section franaise de l'A.I.T. ˆ Londres ; il y dŽfendit les
positions du Conseil gŽnŽral, dont il devint membre (1866-1867).
DANIELS Dr
Roland, 1819-1855 : mŽdecin ˆ Cologne ; membre du Conseil central de
la Ligue des communistes, fut lÕun des accusŽs du procs des communistes de
1852 ; fut acquittŽ.
DANTE Alighieri,
1265-1321 : sans doute le plus grand pote d'Italie ; dans La Divine
ComŽdie, il dŽcrit le monde et l'homme du Moyen
åge.
DAVID
Edouard : reprŽsentant du mouvement ouvrier amŽricain, de souche
franaise, fut Žlu par le congrs de La Haye au Conseil gŽnŽral, mais il
dŽclina cette fonction.
DELAHAYE
Pierre-Louis, nŽ en 1820 : ingŽnieur franais ; membre de l'A.I.T.
ds 1864 ; participa ˆ la Commune ; Žmigra en Angleterre, aprs la
chute de la Commune ; membre du Conseil gŽnŽral de l'A.I.T. (1871-1872),
dŽlŽguŽ ˆ la confŽrence de Londres (1871).
DELL
William : tapissier, membre de la Ligue nationale pour l'indŽpendance
de la Pologne ; participa ˆ l'assemblŽe
inaugurale de lÕA.I.T. en septembre 1864 ; membre du Conseil gŽnŽral
(1864-1869), et trŽsorier (1865-1866-1867) ; participa ˆ la confŽrence de
Londres de 1865, l'un des dirigeants de la Ligue pour la RŽforme.
DE PAEPE CŽsar,
1842-1890 : typographe, puis mŽdecin ; ŽlŽment marquant du mouvement
ouvrier belge et international ; membre de l'Association fŽdŽrative
gŽnŽrale de Belgique, participa ˆ la fondation de la section belge de l'A.I.T.
Ds 1865, en relation Žpistolaire avec Marx, rvait de concilier Marx et
Bakounine ; membre du Conseil fŽdŽral belge ; dŽlŽguŽ ˆ la confŽrence
de Londres (1865 et 1871), aux congrs de Lausanne (1867), de Bruxelles (1868)
et de B‰le (1869) ; aprs le congrs de La Haye, soutint pendant un
certain temps les bakouninistes ; en 1885, participa ˆ la fondation du
Parti ouvrier belge.
DEREURE Simon,
1838-1900 : cordonnier, partisan de Blanqui ; ŽlŽment actif du
mouvement ouvrier franais et international ; adhŽra ˆ la section
parisienne de lÕA.I.T. et fit partie de la rŽdaction du journal La
Marseillaise ; dŽlŽguŽ au congrs de B‰le
(1869) ; membre de la Commune, Žmigra ensuite aux ƒtats-Unis ;
assista comme dŽlŽguŽ amŽricain au congrs de La Haye, qui l'Žlut au Conseil
gŽnŽral ; adhŽra en 1882 au parti ouvrier franais.
DEROSSI Charles,
1844-1910 : chapelier, journaliste ; membre (en 1869) et secrŽtaire
(de 1871 ˆ 1875) de l'Association gŽnŽrale des ouvriers allemands ; de 1875 ˆ 1878, secrŽtaire du parti socialiste ouvrier
d'Allemagne ; contribua ˆ la diffusion illŽgale du Sozial-demokrat en Suisse aprs l'interdiction du parti social-dŽmocrate par
Bismarck ; dans les annŽes 1880, Žmigra en AmŽrique ou il collabora ˆ
diffŽrents journaux ouvriers de langue allemande.
D1ETZ Johann
Heinrich Wilhelm, 1843-1922 : typographe et imprimeur,
social-dŽmocrate ; fondateur de la maison d'Ždition J. H. W. Dietz, qui
Ždita plus tard les textes du parti social-dŽmocrate ˆ Stuttgart ; dŽputŽ
au Reichstag (1881-1918) ; ˆ la fin de sa vie, prit une attitude de
conciliation vis-ˆ-vis du rŽvisionnisme et de l'opportunisme.
DRONKE Ernst,
1822-1891 : publiciste et Žcrivain ; d'abord Ç vrai È
socialiste, puis adhŽra ˆ la Ligue des communistes au dŽbut de 1848 ;
collabora ˆ La Nouvelle Gazette rhŽnane ;
Žmigra en France aprs la rŽvolution ; en juillet 1850, ˆ la demande de
Marx-Engels, fut chargŽ de rŽorganiser la Ligue des communistes en
Suisse ; resta aux c™tŽs de Marx-Engels aprs la scission de la
Ligue ; Žmigra en Angleterre en avril 1852, afin d'aider Marx-Engels ˆ
dŽnoncer les intrigues policires dans le procs des communistes de
Cologne ; aprs la dissolution de la Ligue en novembre 1852, se retira du
mouvement.
D†HRING Eugen
Karl, 1833-1921 idŽologue du socialisme petit-bourgeois rŽactionnaire ;
matŽrialiste vulgaire, fut nommŽ professeur ˆ l'universitŽ de Berlin en
1853 ; sanctionnŽ en 1877, pour opposition au gouvernement ; exera
une grande influence sur la social-dŽmocratie allemande ; Marx-Engels
durent finalement intervenir pour dŽnoncer lÕaction de ses idŽes Žclectiques en
matire philosophique et Žconomique avec l'ouvrage connu sous le titre Anti-DŸhring.
DUPLEIX
Franois : relieur, Žmigra en Suisse ; fut l'un des fondateurs et le
prŽsident de la section de l'A.I.T. genevoise ; dŽlŽguŽ ˆ la confŽrence de
Londres (1865), aux congrs de Genve (1866) et de Lausanne (1867).
DUPONT Eugne,
vers 1831-1881 : ouvrier et fabricant d'instruments de musique ;
figure Žminente du mouvement ouvrier international ; prit part au
soulvement de juin 1848 ˆ Paris ; vŽcut jusqu'en 1862 ˆ Londres ;
membre du Conseil gŽnŽral de l'A.I.T. (novembre 1864-1872) ;
secrŽtaire-correspondant pour la France ; participa ˆ la confŽrence de
Londres (1865) et au congrs de Genve (1866), prŽsida le congrs de Lausanne
(1867) ; dŽlŽguŽ au congrs de Bruxelles (1868), ˆ la confŽrence de
Londres (1871) et au congrs de La Haye (1872) ; il suivit la ligne de
Marx ; s'installa ˆ Manchester en 1870, o il fonda une section de
l'A.I.T. ;
membre du Conseil fŽdŽral de l'A.I.T. (1872-1873), Žmigra aux ƒtats-Unis en
1874.
DURAND
Gustave-Paul-Emile, nŽ en 1835 : ouvrier-joaillier ; aprs tre chute
de la Commune, vŽcut ˆ Londres en prŽtendant tre rŽfugiŽ de la Commune ;
secrŽtaire de la Section franaise de 1871 ; dŽmasquŽ comme mouchard, fut
expulsŽ de l'A.I.T.
DUVAL
Emile-Victor, 1841-1871 : ouvrier fondeur ; ŽlŽment actif du
mouvement ouvrier franais, de tendance blanquiste, adhŽra ˆ l'A.I.T. ;
secrŽtaire du Conseil fŽdŽral parisien de l'Internationale ; fut poursuivi
au 3e procs de l'Internationale (1870) ; fut Žlu au comitŽ
central de la Garde nationale et ˆ la Commune (XIIIe arrondissement) ;
gŽnŽral de la Garde nationale de la Commune ; fait prisonnier le 4 avril
1871, fusillŽ par les Versaillais.
ECCARIUS Johann
Georg, 1818-1889 : tailleur originaire de Thuringe, publiciste ;
ŽmigrŽ ˆ Londres, adhŽra ˆ la Ligue des Justes, puis des communistes ;
l'un des dirigeants de l'Association pour la formation des ouvriers
allemands de Londres ; membre du Conseil
gŽnŽral de l'A.I.T. ds 1864 ; travailla en collaboration avec Marx ;
secrŽtaire gŽnŽral du Conseil (1867-1871) ; secrŽtaire-correspondant pour
l'AmŽrique (1870-1872) ; dŽlŽguŽ ˆ toutes les confŽrences et ˆ tous les
congrs de l'A.I.T. ; rejoignit plus tard l'aile rŽformiste des syndicats.
EHRHARD Johann
Ludwig Albert, nŽ en 1820 : vendeur ˆ Cologne, membre de la Ligue des
communistes ; figura parmi les accusŽs du procs de Cologne, acquittŽ par
les jurŽs.
EICHHOFF Karl
Wilhelm, 1833-1895 : nŽgociant, journaliste et Žcrivain socialiste ;
en 1859, dŽnona la corruption de la police prussienne et dŽcouvrit surtout
l'activitŽ de mouchard de Stieber, ce qui lui valut d'tre condamnŽ ˆ la
prison ; ˆ partir de 1859, correspondit avec Marx, ainsi qu'avec Engels,
qu'il connut durant son sŽjour ˆ Londres (1861-1866) ; fut trs actif dans
le mouvement ouvrier allemand ˆ partir de 1868 ; membre et correspondant
de
l'A.I.T.,
rŽdigea, sous la direction de Marx et avec les documents fournis par celui-ci,
une histoire de l'Internationale ; adhŽra en 1869 au parti
social-dŽmocrate ouvrier et collabora activement ˆ la presse socialiste.
EISENMANN
Gottfried, 1795-1867 : mŽdecin et publiciste ; en 1848, membre du
prŽparlement et de l'AssemblŽe nationale de Francfort (centre, plus tard, aile
gauche).
ELSNER Karl
Friedrich Moritz, 1809-1894 : publiciste et homme politique silŽsien de
tendance radicale ; en 1848, siŽgea ˆ gauche dans l'AssemblŽe nationale
prussienne ; au cours des annŽes 1850 rŽdacteur de la Neue-Oder-Zeitung ˆ laquelle Marx collabora en 1855.
ESSER Christian
Josef : tonnelier de Cologne ; en 1848, prŽsident de la filiale de
Cologne de l'Union ouvrire ; en 1849, rŽdacteur
du journal Freiheit, BrŸderlichkeit, Arbeit.
D'ESTER Karl
Ludwig Johann, 1811-1859 : mŽdecin ˆ Cologne, membre de la commune de
Cologne de la Ligue des communistes ; en 1848, membre du prŽparlement et
l'un des dirigeants de la Gauche ˆ l'AssemblŽe nationale prussienne ;
participa au second congrs dŽmocrate d'octobre 1848 ˆ Berlin, o il fut Žlu au
comitŽ central des dŽmocrates d'Allemagne ; en 1849, dŽputŽ ˆ la seconde
Chambre (extrme-gauche) ; joua un r™le important dans le soulvement de
Bade et du Palatinat en 1849 ; aprs la dŽfaite, Žmigra en Suisse.
ESTRUP Jacob
Bršnnum Scavenius, 1825-1913 : homme d'ƒtat danois, ministre de
l'IntŽrieur (1865-1869), prŽsident du Conseil et ministre de Finances
(1875-1894), conservateur.
EWALD Georg
Heinrich August, 1803-1875 : orientaliste, exŽgte et critique de la
Bible.
EWERBECK August
Hermann, 1816-1860 : mŽdecin et Žcrivain, dirigea la Ligue des Justes,
plus tard la Ligue des communistes qu'il quitta en 1850.
FAVRE
Gabriel-Claude, 1809-1880 : homme politique et avocat, l'un des chefs des
rŽpublicains bourgeois modŽrŽs ; sous-secrŽtaire d'ƒtat aux Affaires
Žtrangres en 1848 ; dŽputŽ ˆ la Constituante et ˆ la LŽgislative de 1848
ˆ 1851 ; dŽputŽ du Corps lŽgislatif en 1863 ; ministre des Affaires
Žtrangres au gouvernement de la DŽfense nationale et de Thiers ; prŽpara
aussit™t, avec Bismarck, la capitulation de Paris ; nŽgocia, avec Thiers,
le traitŽ de Francfort ; ennemi forcenŽ de la Commune, sollicita l'aide
prussienne ; aprs l'Žcrasement de la Commune, mit tout en Ïuvre pour
obtenir l'extradition des communards rŽfugiŽs ˆ l'Žtranger.
FERRƒ
Charles-ThŽophile, 1845-1871 : rŽvolutionnaire franais de tendance
blanquiste ; prit une part active au mouvement rŽpublicain dans les annŽes
1860 ; membre de la Commune et de la commission de la SžretŽ publique,
fusillŽ par les Versaillais.
FLEROVSKY
(BERWI), Vasili Wasilevitch, 1829-1918 : Žconomiste et sociologue
russe ; dŽmocrate et reprŽsentant du socialisme populiste.
FLEURY Charles
(KRAUSE Carl Friedrich August) nŽ en 1824 nŽgociant allemand installŽ ˆ
Londres, espion prussien.
FLOCON
Ferdinand, 1800-1866 : publiciste et homme politique franais, de tendance
dŽmocratique ; intervint ˆ plusieurs reprises en faveur de Marx ;
rŽdacteur du journal La RŽforme ; en 1848,
membre du gouvernement provisoire, ministre de l'Agriculture et du Commerce.
ExpulsŽ aprs le coup d'ƒtat de 1851, se rŽfugia en Suisse.
FLOURENS
Gustave, 1838-1871 : professeur de physiologie, rŽvolutionnaire de tendance
blanquiste, collabora ˆ La Marseillaise de
Rochefort et prit part ˆ la manifestation de Neuilly, lors de l'enterrement de
Victor Noir en fŽvrier 1870, ainsi qu'au soulvement des 31 octobre 1870 et 22
janvier 1871 ; membre de la Commune (XIXe arrondissement) et de
la commission de la Guerre ; assassinŽ en avril 1871 par les Versaillais.
FONTAINE
LŽon : journaliste belge, prit une part active au mouvement
dŽmocratique ; rŽdacteur de l'Ždition franaise du Kolokol d'Alexandre Herzen (1862-1865) ; secrŽtaire-correspondant
provisoire du Conseil central de l'A.I.T. pour la Belgique en 1865 ;
dŽlŽguŽ au congrs de Bruxelles (1868).
FONTANA
Giuseppe : participa ˆ la rŽvolution de 1848 en Italie, puis Žmigra et
devint l'un des dirigeants de l'Associazione di Mutuo Progresso, organisation des ouvriers italiens de Londres de tendance
mazzinienne ; membre du Conseil central de l'A.I.T. (1864-1865) et
secrŽtaire-correspondant pour l'Italie (1865).
FORNACCIERI :
ŽlŽment actif du mouvement ouvrier amŽricain, de souche italienne ;
participa en 1876 au congrs de La Haye qui l'Žlut au Conseil gŽnŽral de
l'A.I.T.
FOURIER
Franois-Marie-Charles, 1772-1837 : socialiste utopique franais,
remarquable critique du systme capitaliste.
FRANKEL :
ouvrier allemand, rŽfugiŽ ˆ Londres ; adhŽra en 1847 ˆ la Ligue des
communistes et ˆ l'Association pour la formation des ouvriers allemands ;
membre du Conseil central de la Ligue des communistes, de 1849 ˆ 1850 ;
lors de la scission, se joignit ˆ la fraction Willich-Schapper.
FRANKEL Leo,
1844-1896 : orfvre, figure Žminente du mouvement ouvrier hongrois et
international ; fut impliquŽ dans le 3e procs de
l'Internationale ˆ Paris ; membre de la Commune et commissaire au Travail
sous la Commune ; membre du Conseil gŽnŽral (1871-1872) et correspondant
pour l'Autriche-Hongrie ; dŽlŽguŽ ˆ la confŽrence de Londres (1871) et au
congrs de La Haye (1872). Revenu en Hongrie en 1876, participa ˆ la crŽation
du parti social-dŽmocrate de Hongrie ; revint ˆ Paris en 1889 ;
dŽlŽguŽ aux diffŽrents congrs de la IIe Internationale.
FREILIGRATH
Ferdinand, 1810-1876 : pote dŽmocrate bourgeois de la rŽvolution de
1848-1849 ; ami de longue date de Marx-Engels ; collabora ˆ La
Nouvelle Gazette rhŽnane ˆ partir d'octobre
1848 ; membre de la Ligue des communistes ; Žmigra ˆ Londres,
1851-1868 ; se retira progressivement du mouvement rŽvolutionnaire.
FRIBOURG E.
E. : graveur, puis marchand ; proudhonien de droite, participa ˆ la
fondation de l'A.I.T. ; fut lÕun des dirigeants de la section parisienne
de l'A.I.T. ; en 1865, dŽlŽguŽ ˆ la confŽrence de Londres et en 1866 au
congrs de Genve ; publia en 1871 l'ouvrage dŽnonant l'Internationale et
la Commune, L'Association internationale des travailleurs.
FRITZSCHE
Friedrich Wilhelm, 1825-1905 : cigarier ; participa ˆ la rŽvolution
de 1848-1849, cofondateur de l'Association gŽnŽrale des ouvriers allemands en 1863 et de l'Association gŽnŽrale des cigariers allemands, prŽsident du syndicat des cigariers jusqu'en 1878 ; dŽlŽguŽ
au congrs d'Eisenach en 1869 et au congrs d'unification de Gotha de
1875 ; membre du Reichstag de l'Allemagne du Nord (1868-1871) et du
Reichstag allemand (1877-1881) ; Žmigra aux ƒtats-Unis en 1881, et se
retira ensuite du mouvement ouvrier.
GAMBETTA LŽon,
1838-1882 : avocat et homme d'ƒtat ; rŽpublicain bourgeois, membre du
gouvernement de la DŽfense nationale (1870-1871), dirigea la dŽlŽgation de
Tours et dŽmissionna le 6 fŽvrier 1871 ˆ Bordeaux ; sŽjourna en Espagne
durant la Commune ; fonda en 1871 le journal la RŽpublique franaise ; prŽsident de la Chambre des dŽputŽs en 1879 ; prŽsident du
Conseil et ministre des Affaires Žtrangres (1881‑1882) ;
pratiqua la politique opportuniste de la petite bourgeoisie franaise.
GAMBUZZI Carlo,
1837-1902 avocat italien ; partisan de Mazzini dans les annŽes 1860, puis
anarchiste ; fut l'un des dirigeants de l'Alliance secrte de la DŽmocratie
socialiste et d'autres organisations anarchistes en
Italie.
GARIBALDI
Giuseppe, 1807-1882 : rŽvolutionnaire italien, nŽ ˆ Nice ; dirigea le
mouvement de libŽration et d'unification de l'Italie ; en 1848, combattit
ˆ la tte d'un corps franc aux c™tŽs de l'armŽe du PiŽmont contre l'Autriche.
D'avril ˆ juin 1849, organisa la dŽfense de la RŽpublique romaine, mais fut
submergŽ par les Napolitains, les Franais et les Autrichiens ; en 1859,
reprit la lutte contre les Autrichiens, ˆ la tte des chasseurs des Alpes, puis
avec les Ç Mille È libŽra la Sicile et le Sud de l'Italie de la tyrannie
des Bourbons (1859-1860) ; s'effora ˆ deux reprises de libŽrer Rome de la
domination papale (1862 et 1867) ; participa, du c™tŽ franais, ˆ la
guerre contre la Prusse en 1870 en commandant l'armŽe des Vosges qui se
composait de sections de la Garde nationale ainsi que de volontaires franais
et Žtrangers ; prit ensuite la dŽfense de la Commune, et salua la formation
de sections de l'A.I.T. en Italie.
GEBERT
August : ŽbŽniste ;
membre de la Ligue des communistes en Suisse, puis ˆ Londres ; lors
de la scission de 1850, se joignit ˆ la fraction Willich-Schapper.
GEIB August,
1842-1879 libraire ˆ Hambourg ; social-dŽmocrate et membre de l'Association
GŽnŽrale des Ouvriers Allemands ; participa au
congrs d'Eisenach de 1869, et contribua ˆ la crŽation du parti
social-dŽmocrate ; trŽsorier du parti (1872-1878), Žlu au Reichstag (1874-1876).
GEISER Bruno,
1846-1898 : journaliste ; adhŽra en 1869 au parti social-dŽmocrate
ouvrier ; fit de l'agitation en SilŽsie en 1872 ; membre de
l'A.I.T. ; rŽdacteur du Volksstaat en 1875
de la Neue Welt (1877-1886) ; dŽputŽ au
Reichstag (1881-1887) ; reprŽsentant de l'aile droite de la fraction
social-dŽmocrate au Reichstag ; dŽchargŽ de toute fonction dans le parti
au congrs de Saint-Gallien de 1887.
GIGOT Philippe,
1820-1860 : reprŽsentant du mouvement dŽmocratique et ouvrier belge ;
membre de la Ligue des communistes ; proche de Marx-Engels dans les annŽes
1840, participa activement au comitŽ de correspondance communiste, crŽŽ au printemps
1846 ˆ Bruxelles.
GLADSTONE
William Ewart, 1809-1898 : homme d'ƒtat anglais, conservateur, puis
pŽŽliste ; au cours de la seconde moitiŽ du XIXe sicle, chef
du parti libŽral ; chancelier de l'ƒchiquier (1852-1855 et 1859-1866) et
Premier ministre (1868-1874, 1880-1885, 1886 et 1892-1894).
GOEGG Amand
1820-1897 : journaliste, dŽmocrate petit-bourgeois ; en 1849, membre
du gouvernement provisoire de Bade, Žmigra aprs la dŽfaite de la
rŽvolution ; rejoignit la social-dŽmocratie allemande dans les annŽes
1870.
GORTCHAKOF
Alexandre Michailovitch, prince de, 1798-1883 homme d'ƒtat et diplomate russe,
ministre des Affaires Žtrangres (l856-1882).
GOTTSCHALK
Andreas, 1815-1849 : mŽdecin, membre de la commune de Cologne de la Ligue
des communistes ; prŽsident de l'Union ouvrire de Cologne (avril-juin
1848) ; reprŽsenta la tendance ouvriŽriste et sectaire, et s'opposa ˆ la
stratŽgie dŽfendue par Marx-Engels dans la rŽvolution allemande de 1848-1849.
GRILLENBERGER
Karl, 1848-1897 journaliste et Žditeur ; adhŽra au parti social-dŽmocrate
en 1869 ; Žditeur et rŽdacteur de nombreux journaux locaux de la
social-dŽmocratie ; fut l'un des organisateurs de la diffusion illŽgale du
Sozial-demokrat en Allemagne du Sud sous le
rŽgime de la loi antisocialiste de Bismarck ; porte-parole de l'aile
droite de la fraction parlementaire de la social-dŽmocratie.
GR†N Karl (Ernst
von der Haide), 1817-1887 : publiciste petit-bourgeois ; vers 1845,
fut l'un des porte-parole les plus influents du Ç vrai
socialisme È ; dŽfendit le point de vue dŽmocrate petit-bourgeois au
cours de la rŽvolution de 1848-1849 ; dŽputŽ ˆ l'AssemblŽe nationale de
Prusse (aile gauche) en 1848 ; Žmigra aprs la rŽvolution et s'installa ˆ
Bruxelles, de 1850 ˆ 1861 ; professeur ˆ Francfort-sur-le-Mein de 1862 ˆ
1865, et ˆ Vienne aprs 1870 ; participa au congrs de la Paix et de la
LibertŽ ˆ Genve en 1867.
GUESDE Jules
(Mathieu Bazile), 1845-1922 : dirigeant marquant du mouvement ouvrier
franais et international ; d'abord rŽpublicain bourgeois ;
emprisonnŽ sous l'Empire, il dŽfendit la Commune dans son journal les Droits
de l'Homme (Montpellier) ; contraint de se rŽfugier
en Suisse, il y frŽquenta les milieux anarchistes jusqu'en 1875. Il se rallia
ensuite aux conceptions de Marx et fonda L'EgalitŽ en 1878. CrŽateur avec P. Lafargue du Parti ouvrier franais,
proposa au congrs du Havre le programme qu'il avait prŽparŽ ˆ Londres avec
Marx en mai 1880. Dans le parti ouvrier franais, il fut d'abord le reprŽsentant
intransigeant de la tendance collectiviste ; l'un des premiers
propagandistes des idŽes marxistes en France et, durant plusieurs annŽes, l'un
des dirigeants de l'aile rŽvolutionnaire du mouvement ouvrier franais ;
aprs avoir luttŽ contre l'opportunisme, il acceptera de participer au gouvernement
Viviani en 1914 et passera, durant la Premire Guerre mondiale, aux positions
du social-chauvinisme.
GUILLAUME James,
1844-1916 : instituteur suisse ; anarchiste et partisan de Bakounine,
fut l'un des organisateurs de l'Alliance de la dŽmocratie socialiste ;
dŽlŽguŽ aux congrs de l'A.I.T. de Genve (1866), de Lausanne (1867), de B‰le
(1869) et de La Haye (1872) ; rŽdacteur des journaux Le Progrs, La SolidaritŽ et du Bulletin de
la FŽdŽration jurassienne ; fut exclu, en mme
temps que Bakounine, de l'A.I.T. par le congrs de La Haye.
GUTZKOW Karl
Ferdinand, 1811-1878 : Žcrivain, porte-parole de la Jeune Allemagne ;
rŽdacteur de la revue Telegraph fŸr Deutschland
(1838-1843) ; dramaturge au thŽ‰tre de la cour de Dresde (1847-1850).
HALES John, nŽ
en 1839 tisserand, l'un des dirigeants des syndicats anglais ; membre du
Conseil gŽnŽral de l'A.I.T. (1866-1872) dont il fut le secrŽtaire (mai
1871-juillet 1872) ; membre du comitŽ exŽcutif de la Ligue pour la
RŽforme ainsi que de la direction de la Ligue de
la Terre et du Travail ; dŽlŽguŽ ˆ la
confŽrence de Londres (1871) et au congrs de La Haye (1872) ; ds le dŽbut
de 1872, ˆ la pointe de l'aile rŽformiste du Conseil gŽnŽral britannique ;
combattit Marx et ses partisans, et fut exclu de l'A.I.T. par dŽcision du
Conseil gŽnŽral (30 mai 1873) ; fut l'artisan de la scission dans le
Conseil fŽdŽral britannique.
HANSEMANN David
Justus, 1790-1864 : grand capitaliste et banquier ; l'un des
reprŽsentants principaux de la bourgeoisie libŽrale rhŽnane ; ministre des
Finances de Prusse, de mars ˆ septembre 1848 ; mena une politique de
conciliation avec les forces de la contre-rŽvolution.
HARDIE James
Keir, 1856-1915 : mineur Žcossais, par la suite publiciste ; ŽlŽment
marquant du mouvement ouvrier anglais ; secrŽtaire du syndicat des mineurs
d'Ayrshire ; ˆ l'origine, libŽral ; fondateur et dirigeant du Labour
Party Žcossais (1888), puis de l'IndŽpendent
Labour Party (1893) ; plus tard l'un des
dirigeants les plus actifs du Labour Party ;
dŽputŽ de 1892 ˆ 1895. En 1906, chef du groupe travailliste aux Communes. Eut
une position ferme contre la guerre en 1914.
HARNEY George
Julian, 1817-1897 reprŽsentant Žminent du mouvement ouvrier anglais des annŽes
1840 et 1850, l'un des chefs de l'aile gauche du chartisme ; publiciste
rŽvolutionnaire, Ždita le Northern Star,
l'hebdomadaire The Red Republican ainsi que
d'autres pŽriodiques chartistes plus ŽphŽmres ; membre de la Ligue des communistes
et du comitŽ de correspondance communiste de Bruxelles ; cofondateur des Fraternal
Democrats et trs liŽ avec Marx-Engels jusqu'au
dŽbut des annŽes 1850 ; noua ensuite des contacts avec des cercles
petits-bourgeois et cessa d'agir dans un sens rŽvolutionnaire ; vŽcut de
1863 ˆ 1888 aux ƒtats-Unis ; fut membre de l'Internationale.
HASENCLEVER
Wilhelm, 1837-1889 : tanneur, journaliste de tendance lassallŽenne ;
ˆ partir de 1864, membre, en 1866, secrŽtaire, en 1870, trŽsorier, et en 1871
prŽsident de l'Association gŽnŽrale des ouvriers allemands ; rŽdacteur du Social-demokrat
ˆ partir de 1870 ; dŽlŽguŽ au congrs d'unification de Gotha (1875), l'un
des deux prŽsidents du parti socialiste ouvrier de 1875 ˆ 1876 ; dirigea
le VorwŠrts avec Liebknecht de 1876 ˆ
1878 ; dŽputŽ au Reichstag d'Allemagne du Nord (1869-1871) et du Reichstag
allemand (1874-1878 et 1879-1888) ; fit partie de l'aile non marxiste de
la fraction parlementaire de la social-dŽmocratie.
HASSELMANN
Wilhelm, nŽ en 1844 : rŽdacteur et dirigeant de l'Association gŽnŽrale
des ouvriers allemands ; rŽdacteur du Neue
Social-democrat de 1871 ˆ 1875, adhŽra au parti
socialiste ouvrier en 1875, dŽputŽ au Reichstag de 1874 ˆ 1876, 1878 ˆ
1880 ; exclu du parti en tant qu'anarchiste, Žmigra aux ƒtats-Unis.
HAUDE :
membre de la Ligue des communistes ; aprs la scission de 1850, devint
l'Žmissaire de la fraction sectaire de Willich-Schapper en Allemagne.
HAUPT Hermann
Wilhelm, nŽ vers 1831 garon d'Žpicerie, membre de la Ligue des
communistes ; arrtŽ avant le procs de Cologne, dŽnona les activitŽs de
ses camarades, et fut libŽrŽ par la police ; se rŽfugia au BrŽsil.
HECKER :
fonctionnaire prussien de la justice ; procureur gŽnŽral ˆ Cologne en 1848.
HECKER Friedrich
Franz Karl, 1811-1881 ; avocat ˆ Mannheim ; dŽmocrate
petit-bourgeois, rŽpublicain radical ; en 1848, dŽputŽ du
prŽparlement ; l'un des dirigeants du soulvement de Bade en avril
1848 ; Žmigra en Suisse, puis aux ƒtats-Unis o il participa, du c™tŽ
nordiste, ˆ la guerre de SŽcession, comme colonel.
HEGEL Georg
Wilhelm Friedrich, 1770-1831 : Žminent reprŽsentant de la philosophie
classique allemande (idŽaliste objectif) qui culmina dans le systme hŽgŽlien,
o, Ç pour la premire fois ‑ et c'est son grand mŽrite ‑ tout
le monde naturel, historique et intellectuel est saisi comme un procs,
c'est-ˆ-dire est conu, et prŽsentŽ comme Žtant en mouvement perpŽtuel,
changement, transformation et dŽveloppement, et o est faite la tentative de mettre
en Žvidence et de dŽmontrer la connexion interne de ce mouvement et de ce
dŽveloppement È (Engels).
HEINE Heinrich,
1797-1856 : pote allemand, Žmigra ˆ Paris en 1830 ; adversaire de
l'absolutisme et de la rŽaction fŽodale et clŽricale, fut un ardent
patriote ; l'un des initiateurs de la littŽrature dŽmocratique
allemande ; ami intime de la famille Marx.
HEINZEN Karl,
1809-1880 : publiciste, dŽmocrate radical petit-bourgeois ; s'opposa
ˆ Marx-Engels avant la rŽvolution de 1848 ; participa quelque temps au
soulvement de Bade et du Palatinat, puis Žmigra en Suisse, en Angleterre et,
enfin, en automne 1850, aux ƒtats-Unis.
HEPNER Adolf,
1846-1923 : rŽdacteur et cofondateur du parti social-dŽmocrate ouvrier
allemand (1869) ; collabora au Volksstaat (1869-1873) ;
co-accusŽ au procs de haute trahison de Leipzig en 1872 ; dŽlŽguŽ au
congrs de La Haye (1872) ; Žmigra aux ƒtats-Unis en 1882 ; revint en
Allemagne en 1908 ; rejoignit les positions chauvines de la droite du
parti social-dŽmocrate en 1914.
HERWEGH Georg,
1817-1875 : reprŽsentant Žminent de la poŽsie rŽvolutionnaire sur la
libertŽ de la pŽriode antŽrieure ˆ 1848 ; entretint des relations
cordiales avec Marx ; aprs la rŽvolution de FŽvrier, adhŽra ˆ la SociŽtŽ
dŽmocratique allemande de Paris, o, malgrŽ l'opposition de Marx-Engels, il
organisa une lŽgion formŽe d'ŽmigrŽs allemands qui s'effora de porter la
rŽvolution en Allemagne et notamment en Bade ; elle fut compltement
ŽcrasŽe au premier engagement ; Žmigra plus tard en Suisse ; pote du
premier chant fŽdŽral du mouvement ouvrier allemand, qu'il rejoignit en
1863 ; membre de l'A.I.T., adhŽra plus tard au parti social-dŽmocrate
ouvrier allemand.
HERZEN Alexandre
Ivanovitch, 1812-1870 : dŽmocrate russe ; philosophe matŽrialiste,
publiciste et Žcrivain ; vŽcut ˆ partir de 1852 en Angleterre, o il crŽa
une imprimerie, dirigea une collection et Ždita la revue Kolokol.
HESS Moses,
1812-1875 : publiciste petit-bourgeois et philosophe ; cofondateur et
rŽdacteur de La Gazette rhŽnane, l'un des reprŽsentants
principaux du Ç vrai socialisme È ; membre de la Ligue des Justes,
puis de la Ligue des communistes ; en opposition ouverte avec Marx-Engels
sur le plan politique ˆ partir de 1846 ; lors de la scission de 1850,
rejoignit la fraction sectaire Willich-Schapper ; fut pendant plusieurs
annŽes partisan de l'Association gŽnŽrale des ouvriers allemands fondŽe par Lassalle (1863-1866) ; participa aux congrs de
l'A.I.T. de
Bruxelles (1868) et de B‰le (1869).
HINS Eugne,
1839-1923 : journaliste belge de tendance proudhonienne ; prit une
part active au mouvement ouvrier belge dans les annŽes 1860 ; l'un des
fondateurs des sections belges de l'A.I.T. ; dŽlŽguŽ aux congrs de
Bruxelles (1868) et de B‰le (1869) ; dans la lutte qui opposa Marx ˆ
Bakounine dans l'Internationale, prit parti pour ce dernier.
HIRSCH Carl,
1841-1900 : journaliste ; membre de l'Association gŽnŽrale des
ouvriers allemands qu'il quitta en 1868 ;
participa ˆ la fondation de l'Association ouvrire dŽmocratique ˆ Berlin et plus tard au parti social-dŽmocrate ouvrier
(1869) ; dŽfendit l'A.I.T. en Allemagne ; rŽdacteur au Demokratisches
Wochenblatt en 1868 avec Liebknecht, puis au Volksstaat qu'il dirigea de dŽcembre 1870 ˆ mars 1871 ; rŽdacteur au Crimmitscher
BŸrger- und Bauernfreund (1870-1871), le premier
quotidien social-dŽmocrate en Allemagne ; aprs 1872, correspondant
parisien de la presse social-dŽmocrate allemande ; Žditeur de Die
Laterne (1878-1879) ˆ Bruxelles, Žmigra en 1879 ˆ
Londres, o il se lia avec Marx et correspondit avec Engels ; retourna en
Allemagne, pour diriger la Rheinische Zeitung ˆ
partir de 1894 ; se retira ensuite de la vie politique.
H…CHBERG Karl
(Dr Ludwig Richter), 1853-1885 : Žcrivain et Žditeur ; rŽformateur
social ; adhŽra au parti social-dŽmocrate ouvrier en 1876 ; directeur
de la Zukunft (1877-1878), du Jahrbuch fŸr Sozialwissenschaft
und Sozialpolitik (1879-1881).
HOLTORP Emile
ŽmigrŽ polonais ˆ Londres ; membre du Conseil central de l'A.I.T. (octobre
1864-1866) et secrŽtaire-correspondant pour la Pologne (1864-1865) ;
participa ˆ la confŽrence de Londres de 1865 ; en 1866, adhŽra au ComitŽ
rŽpublicain international fondŽ par Mazzini.
HOWELL George,
1833-1910 : maon, chartiste, puis militant syndicaliste ; secrŽtaire
du Conseil londonien des syndicats de 1861 ˆ 1862 ; participa ˆ
l'assemblŽe inaugurale du 28 septembre 1864 de l'A.I.T. ; membre du
Conseil gŽnŽral de l'A.I.T., d'octobre 1864 ˆ 1869 ; participa ˆ la
confŽrence de Londres (1865) ; secrŽtaire de la Ligue pour la RŽforme et
du comitŽ parlementaire des syndicats de 1871 ˆ 1875 ; se retira de
l'Internationale au moment de la Commune, et devint l'un des dirigeants
rŽformistes du mouvement anglais.
HYNDMAN Henry
Mayers (prit le pseudonyme de John Broadhouse au cours des annŽes 1880),
1842-1921 : socialiste anglais de tendance rŽformiste ; fondateur en
1881, puis dirigeant de la Democratic Federation
qui devint la Social Democratic Federation en
1884 ; diffusa le marxisme en Angleterre tout en plagiant et adultŽrant
les textes de Marx qui se brouilla avec lui ; il suivit une ligne opportuniste
et sectaire, et devint l'un des dirigeants du British
Socialist Party avec lequel il rompit en 1916 en raison de ses conceptions social-chauvinistes.
IMANDT
Peter : instituteur de Crefeld ; dŽmocrate et prŽsident de l'Union
ouvrire de Crefeld, participa ˆ la rŽvolution de 1848-1849 tant ˆ Cologne qu'ˆ
Trves ; Žmigra plus tard et adhŽra ˆ la Ligue des communistes ; liŽ
avec Marx et Engels.
JACOBI Dr
Abraham, nŽ en 1832 : mŽdecin berlinois ; membre de la Ligue des
communistes ; accusŽ au procs de Cologne de 1852, fut acquittŽ et Žmigra
aux ƒtats-Unis.
JACOBY Johann,
1805-1877 : mŽdecin de Kšnigsberg ; publiciste et homme
politique ; dŽmocrate Žnergique ; en 1848, dŽputŽ du prŽparlement et
l'un des dirigeants de l'aile gauche de l'AssemblŽe nationale prussienne ;
plus tard, adversaire de la politique de Bismarck ; adhŽra en 1872 au
parti social-dŽmocrate.
JOHANNARD Jules,
1843-1888 : lithographe, blanquiste ; membre du Conseil gŽnŽral de
l'A.I.T. (1868-1869 et 1871-1872) ; secrŽtaire-correspondant pour l'Italie
(1868-1869) ; en 1870, fonda une section de l'Internationale ˆ
Saint-Denis ; inculpŽ dans le troisime procs de l'Internationale
(1870) ; membre de la Commune, Žmigra ˆ Londres aprs la dŽfaite de la Commune ;
dŽlŽguŽ au congrs de La Haye (1872).
JONES Ernest
Charles ; 1819-1869 ; pote et publiciste anglais ; reprŽsentant
rŽvolutionnaire du mouvement ouvrier anglais ; chartiste de l'aile
gauche ; rŽdacteur du Northern Star,
directeur des feuilles chartistes Notes to the People et The People's Papers, partisan de
Marx jusqu'aux annŽes 1850, puis se rallia ˆ l'aile gauche du radicalisme
bourgeois.
JOTTRAND
Lucien-LŽopold 1804-1877 : avocat belge et publiciste ; dŽmocrate
radical ; participa ˆ la rŽvolution de 1830 ; en 1847, prŽsident de
l'Association dŽmocratique de Bruxelles ; rŽdacteur du DŽbat social.
JOUKOVSKY
Nicolas, 1833-1895 : anarchiste russe ; Žmigra en Suisse
(1862) ; secrŽtaire de la section genevoise appelŽe Alliance de la
dŽmocratie socialiste, . dont il fut l'un des chefs ; en 1872 se retira de
l'Internationale pour protester contre l'expulsion de Bakounine au congrs de
La Haye.
JUNG Hermann,
1830-1901 : horloger ; ŽlŽment marquant du mouvement ouvrier suisse
et international ; participa ˆ la rŽvolution de 1848-1849 en
Allemagne ; Žmigra ensuite ˆ Londres ; membre du Conseil gŽnŽral de
l'A.I.T. et secrŽtaire-correspondant pour la Suisse de novembre 1864 ˆ
1872 ; trŽsorier du Conseil gŽnŽral de 1871 ˆ 1872 ; vice-prŽsident
de la confŽrence de Londres (1865), prŽsident des congrs de Genve (1866), de
Bruxelles (1868) et de B‰le (1869) et de la confŽrence de Londres (1871) ;
membre du Conseil fŽdŽral anglais ; il suivit la ligne de Marx jusqu'au
congrs de La Haye ; se joignit plus tard aux dirigeants rŽformistes des
syndicats.
JUNGE Adolph
Friedrich : membre de la Ligue des Justes, puis des communistes ;
Žmigra aux ƒtats-Unis au dŽbut de 1848.
KAUTSKY Karl,
1854-1938 : socialiste originaire d'Autriche, Žcrivain, rŽdacteur ;
Žvolua vers le marxisme ˆ la fin des annŽes 1870 ; fut l'un des plus
grands marxistes, considŽrŽ longtemps comme l'hŽritier spirituel de Marx-Engels
(avec Bebel et Bernstein) ; de 1883 ˆ 1917, directeur de la Neue Zeit, l'organe thŽorique de la social-dŽmocratie allemande et
internationale ; au cours des annŽes 1890, devint le thŽoricien du parti
socia-dŽmocrate allemand et mme de l'Internationale, et contribua alors
fortement ˆ la diffusion et ˆ la dŽfense du marxisme. Il lutta d'abord contre
Bernstein et le rŽvisionnisme, mais vers 1910 devint le porte-parole du
centre ; renia le marxisme au cours de la Premire Guerre mondiale, et
sera hostile au bolchevisme aprs la rŽvolution d'Octobre.
KAVANAGH
Samuel : originaire d'Irlande ; reprŽsentant du mouvement ouvrier
amŽricain ; Žlu au Conseil gŽnŽral par le congrs de La Haye (1872).
KAYSER Max,
1853-1888 : journaliste, social-dŽmocrate ; dŽputŽ au Reichstag ˆ
partir de 1878, appartint ˆ l'aile droite de la fraction parlementaire
social-dŽmocrate.
KELLEY-WISCHNEWETZKY
Florence, 1859-1932 : socialiste amŽricaine, plus tard rŽformiste
bourgeoise ; traduisit en anglais La Situation des classes laborieuses
en Angleterre d'Engels avec lequel elle
correspondit longtemps.
KINKEL
Gottfried, 1815-1882 : pote et historien de l'art ; dŽmocrate
petit-bourgeois ; participa au soulvement de Bade et du Palatinat en
1848-1849, condamnŽ ˆ la forteresse ˆ vie par un tribunal prussien ;
s'Žvada en 1850 et Žmigra en Angleterre, o il devint l'un des chefs de
l'Žmigration petite-bourgeoise ; Žditeur du Hermann (1859), combattit Marx et Engels ; dans les annŽes 1860,
partisan de l'unitŽ allemande sous l'Žgide de la Prusse.
KISSELEV Pavel
Dimitrevitch, comte, 1788-1872 : homme d'ƒtat et diplomate russe ;
gouverneur des principautŽs de la Moldavie et de la Valachie (1829-1834) ;
ˆ partir de 1835, membre permanent de tous les comitŽs secrets sur la question
paysanne ; aprs 1837, ministre des Domaines ; partisan de rŽformes
modŽrŽes.
KLAPKA Georges,
1820-1892 : gŽnŽral hongrois, commanda une armŽe hongroise durant la
rŽvolution de 1848-1849 ; de juin ˆ septembre 1849, commandant de la
forteresse de Komorn ; Žmigra en 1849 et entra en relation avec les
milieux bonapartistes dans les annŽes 1850, retourna en Hongrie aprs
l'amnistie de 1867.
KLINGS
Karl : ouvrier, membre de la Ligue des communistes, plus tard de
l'Association gŽnŽrale des ouvriers allemands ; Žmigra aux ƒtats-Unis en
1865 et participa activement ˆ la vie de la section de l'A.I.T. de Chicago.
KLOSE G. :
ŽmigrŽ allemand ˆ Londres ; membre de la Ligue des communistes ;
figure parmi les accusŽs du procs de Cologne : fut acquittŽ.
KOMP
Albrecht : ŽmigrŽ aux ƒtats-Unis ; ˆ partir de 1857, l'un des
dirigeants du Communist Club de New York ;
ami de Joseph Weydemeyer.
K…PPEN Karl
Friedrich, 1808-1863 : publiciste et historien de tendance radicale ;
Jeune-HŽgŽlien, fit la connaissance de Marx au Ç Club des docteurs È
ˆ Berlin et resta liŽ d'amitiŽ avec lui ; collabora ˆ La Gazette
rhŽnane ; participa activement au mouvement
dŽmocratique durant la rŽvolution de 1848-1849 ; Žcrivit un ouvrage connu
sur le bouddhisme.
KORFF
Hermann : ancien officier prussien, chassŽ de l'armŽe ˆ cause de ses
convictions dŽmocratiques ; directeur responsable de La Nouvelle
Gazette rhŽnane ; de 1848 ˆ 1849 ; Žmigra
plus tard aux ƒtats-Unis.
KOSSUTH Lajos
(Louis), 1802-1894 : chef du mouvement de libŽration nationale de
Hongrie ; ˆ la tte des forces bourgeoises dŽmocratiques durant la
rŽvolution de 1848-1849 ; Žmigra aprs la dŽfaite et chercha ˆ s'assurer
l'appui des milieux bonapartistes dans les annŽes 1850.
K…TTGEN Gustav
Adolph, 1805-1882 peintre et pote rhŽnan ; participa dans les annŽes 1840
au mouvement ouvrier, proche du socialisme Ç vrai È ; participa
ˆ l'activitŽ du comitŽ de correspondance communiste de Bruxelles ; prit
part ˆ la rŽvolution de 1848-1849 ; membre de l'Union ouvrire de Brme ; Ždita en avril 1849 le journal Vereinigung-Zeitung
fŸr sŠmtliche Arbeiter et y prit une position de
dŽmocrate radical.
KRIEGE Hermann,
1820-1850 : journaliste allemand ; Ç vrai È socialiste ;
ˆ partir de 1845, dirigea le groupe des Ç vrais È socialistes
allemands de New York et y Ždita Der Volks-Tribun.
KUGELMANN
Ludwig, 1828-1902 : mŽdecin, dŽmocrate ; ami intime de Marx et
Engels ; participa ˆ la rŽvolution de 1848-1849 ; en correspondance
suivie avec Marx de 1862 ˆ 1874 ; membre actif de l'A.I.T. ˆ
Hanovre ; dŽlŽguŽ aux congrs de Lausanne (1867) et de La Haye
(1872) ; contribua fortement ˆ la diffusion du Capital en Allemagne.
KWASNIEWSKI
Gustav, 1833-1902 : instituteur et Žcrivain ; cofondateur et membre
actif de l'Union ouvrire dŽmocratique de Berlin ; membre de la section
berlinoise de l'A.I.T. et, ds 1869, du parti social-dŽmocrate ; participa
activement ˆ la diffusion du Capital et des idŽes
du communisme marxiste ; rŽdacteur du Crimmitschauer BŸrger-und
Bauern-freund (1871-1875) ; se retira plus
tard de l'activitŽ politique.
LAFARGUE Paul,
1842-1911 : mŽdecin, socialiste, propagandiste du marxisme en
France ; disciple et compagnon de lutte de Marx-Engels ; membre du
Conseil gŽnŽral de lÕA.I.T. et secrŽtaire-correspondant pour l'Espagne
(1866-1869) ; participa activement ˆ la fondation de sections de l'A.I.T.
en France (1869-1870) ainsi qu'en Espagne et au Portugal (1871-1872) ;
dŽlŽguŽ au congrs de La Haye (1872) ; fonda, avec Jules Guesde, le Parti
ouvrier franais ; dŽlŽguŽ ˆ presque tous les congrs du parti ouvrier
franais et de la IIe Internationale ; compagnon de la fille de
Marx, Laura.
LAFAYETTE
Marie-Joseph-Paul, marquis de, 1757-1834 : homme d'ƒtat et gŽnŽral
franais, combattit aux ƒtats-Unis pour la rŽvolution amŽricaine contre les
Anglais ; l'un des chefs politiques de la grande bourgeoisie au cours de
la rŽvolution franaise ; en 1830, prŽpara la voie pour le retour au tr™ne
de Louis-Philippe.
LANDECK Bernard,
nŽ en 1832 : joaillier franais ; dŽlŽguŽ de la Commune ˆ
Marseille ; membre de l'Internationale et de la Section franaise de 1871
ˆ Londres qui entra en conflit avec le Conseil gŽnŽral de l'A.I.T.
LASSALLE
Ferdinand, 1825-1864 : Žcrivain et dŽmocrate petit-bourgeois ;
participa ˆ la rŽvolution de 1848-1849 ; correspondit activement avec Marx
et Engels jusqu'en 1862 ; son mŽrite historique est d'avoir crŽŽ l'Association
gŽnŽrale des ouvriers allemands en mai 1863, rŽalisant
ainsi la volontŽ des ouvriers avancŽs de se sŽparer de la bourgeoisie libŽrale
sur le plan de l'organisation. Cependant, il ne transmit pas ˆ la classe
ouvrire de perspective rŽvolutionnaire. Il suscita, au contraire, l'illusion
de la possibilitŽ d'une Ç transcroissance È pacifique au socialisme
avec le concours de l'ƒtat des hobereaux prussiens. Cette idŽologie du
Ç socialisme royal-prussien È conduisit Lassalle ˆ pactiser avec
Bismarck et le militarisme prussien des grands propriŽtaires fonciers, prenant
parti pour la rŽalisation de l'unitŽ de l'Allemagne par Ç le haut È
sous l'hŽgŽmonie de l'ƒtat prussien.
LAUBE Heinrich,
1806-1884 : Žcrivain, reprŽsentant de la Jeune Allemagne ; de 1849 ˆ
1879, directeur de thŽ‰tre ˆ Vienne et ˆ Leipzig ; metteur en scne
considŽrable de l'Žpoque.
LAURREL C. A.
F. : membre actif du mouvement ouvrier amŽricain, de souche
suŽdoise ; Žlu au Conseil gŽnŽral de l'A.I.T. par le congrs de La Haye.
LAVROV Piotr,
1823-1900 : sociologue et publiciste russe ; l'un des idŽologues du
populisme ; Žclectique en philosophie ; membre de l'A.I.T., participa
ˆ la Commune de Paris ; rŽdacteur de la revue V pered ! (En avant !) de 1867 ˆ 1872, ainsi que du journal du mme nom,
de 1875-1876 ; frŽquenta pendant toute une pŽriode la famille Marx.
LAW Harriet,
1832-1897 : dirigeante du mouvement dŽmocratique et athŽiste
d'Angleterre ; membre du Conseil gŽnŽral de 1867 ˆ 1872 et de la section
de Manchester de l'A.I.T.
LEDRU-ROLLIN
Alexandre-Auguste, 1807-1874 homme politique et publiciste franais ; l'un
des chefs de la dŽmocratie petite-bourgeoise ; rŽdacteur du journal
socialiste dŽmocrate La RŽforme ; en 1848,
ministre de l'IntŽrieur du gouvernement provisoire et membre de la Commission
exŽcutive ; dŽputŽ de l'AssemblŽe constituante et lŽgislative dans
laquelle il dirigea le parti de la Montagne ; aprs la manifestation du 13
juin 1849, Žmigra en Angleterre o il vŽcut jusqu'en 1870 ; dŽputŽ de
l'AssemblŽe nationale, il dŽmissionna pour protester contre la conclusion de la
paix avec l'Allemagne.
LEFRAN‚AIS
Gustave, 1826-1901 : instituteur, proudhonien de gauche ; participa ˆ
la rŽvolution de 1848 ; adhŽra ˆ l'A.I.T. vers la fin des annŽes
1860 ; membre de la Commune, dont il Žcrivit une histoire ; Žmigra en
Suisse o il se joignit aux anarchistes.
LEHMANN A. : mŽdecin allemand.
LELEWEL Joachim,
1786-1861 : historien et rŽvolutionnaire polonais ; chef de l'aile
dŽmocratique bourgeoise lors du soulvement de 1830-1831 ; puis chef de
l'Žmigration dŽmocratique polonaise ; il fonda en 1837 l'association des
ŽmigrŽs polonais qui rejoignit en 1846 la SociŽtŽ dŽmocratique polonaise.
LE LUBEZ
Victor-Pierre, nŽ vers 1834 : ŽmigrŽ franais ˆ Londres, liŽ aux ŽlŽments
bourgeois-rŽpublicains et radicaux en France et en Angleterre ; participa
ˆ l'assemblŽe inaugurale du 28 septembre 1864 de l'A.I.T. ; membre du
Conseil central de 1864 ˆ 1866, et secrŽtaire-correspondant pour la
France ; participa ˆ la confŽrence de Londres de 1865 ; fut exclu du
Conseil central par le congrs de Genve de 1866, en raison de ses intrigues et
de ses dŽnigrements.
LEROUX Pierre,
1797-1871 : publiciste et socialiste utopique, partisan de
Saint-Simon ; en 1848, dŽputŽ de l'AssemblŽe constituante et en 1849 de
l'AssemblŽe lŽgislative (Montagne).
LESSNER
Friedrich, 1825-1910 : tailleur, ami et compagnon de lutte de
Marx-Engels ; membre de la Ligue des Justes
et de la Ligue des communistes ; participa
ˆ la rŽvolution de 1848-1849 ; condamnŽ ˆ trois ans de forteresse au
procs de Cologne de 1852 ; Žmigra en Angleterre en 1856 ; membre de
l'Association pour la formation des ouvriers allemands de Londres ; membre du Conseil gŽnŽral de 1864 ˆ 1872 ;
dŽlŽguŽ ˆ la confŽrence de Londres de 1865 ; lutta activement pour
rŽaliser la politique de Marx-Engels ; participa ˆ tous les congrs de
l'A.I.T. ; membre du Conseil fŽdŽral britannique, et l'un des fondateurs
du British Independent Labour Party.
LEVEN :
dŽmocrate de Rheindorf.
LEVIéLE
E. : reprŽsentant du mouvement ouvrier amŽricain, de souche
franaise ; fut Žlu au Conseil gŽnŽral par le congrs de La Haye de 1872.
LEVY
Gustav : socialiste de RhŽnanie ; l'un des agitateurs les plus actifs
de l'Association gŽnŽrale des ouvriers allemands,
en 1856, Žmissaire des ouvriers de DŸsseldorf chez Marx ˆ Londres.
LEWIS
Leon : journaliste amŽricain ; Žlu en 1865 au Conseil central de
l'A.I.T., dont il fut le secrŽtaire-correspondant pour l'AmŽrique.
LICHNOWSKI Felix
Maria, prince de, 1814-1848 : grand propriŽtaire de SilŽsie ;
officier prussien rŽactionnaire ; dŽputŽ ˆ l'AssemblŽe nationale de
Francfort (aile droite) en 1848 ; tuŽ lors du soulvement de septembre ˆ
Francfort. Cf.
Schnapphahnski.
LIEBKNECHT
Nathalie, 1835-1909 : seconde femme de Wilhelm Liebknecht.
LIEBKNECHT
Wilhelm (Library), 1826-1900 : publiciste,
l'un des chefs les plus Žminents du mouvement ouvrier allemand et international ;
ami et compagnon de lutte de Marx-Engels, bien que trs critiquŽ ˆ l'occasion
par ceux-ci ; participa ˆ la rŽvolution de 1848-1849 ; Žmigra en
Suisse, puis en Angleterre, o il adhŽra ˆ la Ligue des communistes ; retourna en Allemagne en 1862 ; en liaison avec
Marx-Engels, membre actif de l'Association gŽnŽrale des ouvriers allemands ; membre de l'A.I.T. ; propagandiste et agitateur du communisme
scientifique ; fondateur et dirigeant du Parti populaire de Saxe, en 1866 ; participa en 1869 ˆ la fondation du Parti
social-dŽmocrate ouvrier ; directeur
responsable du Demokratisches Wochenblatt, du Volksstaat et du VorwŠrts ; adversaire
acharnŽ du militarisme prussien, lutta pour l'unitŽ allemande par la voie
dŽmocratique et rŽvolutionnaire ; dŽputŽ du Reichstag de l'Allemagne du
Nord (1867-1870) et du Reichstag allemand (1874-1900), vota avec Bebel, contre
les crŽdits de guerre en 1870 et fut poursuivi par les autoritŽs prussiennes
pour son dŽfaitisme rŽvolutionnaire ; prit une position d'hostilitŽ
ouverte ˆ la politique d'annexion lors de la guerre franco-prussienne, et
soutint activement la Commune de Paris ; de 1879 ˆ 1892, fut plusieurs
fois condamnŽ par les tribunaux prussiens ; dŽlŽguŽ aux diffŽrents congrs
de l'Internationale socialiste ouvrire ; en politique et dans le parti
allemand, eut une attitude trop souvent conciliatrice.
LIMOUSIN
Charles-M. : typographe, puis journaliste ; secrŽtaire de rŽdaction
de la revue L'Association ; rŽdacteur de la
Tribune ouvrire ; dŽlŽguŽ ˆ la confŽrence
de Londres de l'A.I.T. (1865) ; en 1870, membre du Conseil fŽdŽral de
Paris ; participa au mouvement coopŽratif ; Žditeur d'une sŽrie de
revues.
LINCOLN
H.-J. : directeur du Daily News.
LISSAGARAY
Prosper-Olivier, 1838-1901 journaliste et historien ; s'illustra sous
l'Empire par son duel avec Cassagnac ; participa ˆ la Commune, rejoignit
le groupe dŽmocratique bourgeois des nŽo-jacobins ; Žmigra en Angleterre
aprs la Commune, et Žcrivit l'Histoire de la Commune de 1871. Aprs l'amnistie, fonda la Bataille auquel collaborrent les possibilistes.
LOCHNER Georg,
nŽ vers 1834 : ŽbŽniste ; ŽlŽment actif du mouvement ouvrier allemand
et international ; membre de la Ligue des communistes et de l'Association pour la formation des ouvriers allemands de Londres ; membre du Conseil gŽnŽral de l'A.I.T., de novembre
1864 ˆ 1867 et de 1871 ˆ 1872 ; ami et compagnon de lutte de Marx-Engels.
LONGUET Charles,
1839-1903 : journaliste de tendance proudhonienne ; Žtudiant, il
fonda la Rive Gauche, organe de l'opposition ;
contraint de s'enfuir en Belgique ; adhŽra ˆ l'Internationale ;
membre du Conseil gŽnŽral de 1866 ˆ 1867 et de 1871 ˆ 1872 ;
secrŽtaire-correspondant pour la Belgique en 1866 ; dŽlŽguŽ aux congrs de
Lausanne (1866), de Bruxelles (1868), de la confŽrence de Londres (1871) et du
congrs de La Haye (1872) ; aprs le 4 septembre, il commanda un bataillon
de la Garde nationale ; membre de la Commune, Žmigra en Angleterre ;
en 1872, Žpousa la fille a”nŽe de Marx, Jenny ; aprs son retour en
France, devint l'un des principaux collaborateurs de La Justice de Clemenceau ; se joignit aux possibilistes ; conseiller
municipal de Paris dans les annŽes 1880 et 1890.
LORENZO Anselmo,
1841-1915 : ŽlŽment actif du mouvement ouvrier espagnol ;
organisateur des sections de l'Internationale en Espagne ; membre du
Conseil fŽdŽral espagnol de 1870 ˆ 1872 ; dŽlŽguŽ ˆ la confŽrence de
Londres (1871) de l'A.I.T. o il prit position contre les bakouninistes.
Louis XVI,
1754-1793 : roi de France.
LUCRAFT
Benjamin, 1809-1897 : ŽbŽniste, dirigeant syndical rŽformiste ;
participa ˆ l'assemblŽe inaugurale de l'A.I.T. ; membre du Conseil gŽnŽral
de 1864 ˆ 1871 ; dŽlŽguŽ au congrs de Bruxelles (1868), de B‰le
(1869) ;. membre du comitŽ exŽcutif de la Reform League et de la Labour Representation League ; prit position contre la Commune de Paris en 1871, ainsi que
contre l'Adresse de l'Internationale sur la Guerre civile en France ;
quitta l'Internationale, devint ensuite libŽral.
MACDONALD Alexander,
1821-1881 : chef rŽformiste des syndicats anglais ; secrŽtaire du
syndicat national des mineurs ; Žlu au Parlement en 1874, pratiqua la
politique du parti libŽral.
MACDONNEL J.
Patrick, 1847-1906 chef ouvrier irlandais, socialiste et Fenian ; membre
du Conseil gŽnŽral et secrŽtaire-correspondant pour l'Irlande
(1871-1872) ; dŽlŽguŽ ˆ la confŽrence de Londres (1871) et au congrs de
La Haye (1872) ; Žmigra en 1872 aux ƒtats-Unis o il prit une part active
au mouvement ouvrier amŽricain.
MAHON John
Lincoln, 1865-1933 : mŽcanicien ; ŽlŽment marquant du mouvement
ouvrier anglais ; membre du comitŽ exŽcutif de la Social Democratic
Federation (1884) ; ˆ partir de dŽcembre 1884,
membre de la Socialist League, dont il devient
le secrŽtaire en 1885 ; l'un des organisateurs de la North of England
Socialist Federation (1887) ; auteur de
l'ouvrage A Labour Programm (1888).
MALON Beno”t,
1841-1893 : teinturier, publiciste ; socialiste petit-bourgeois, l'un
des chefs des sections parisiennes de l'A.I.T. ; dŽlŽguŽ au congrs de
Genve (1866) ; membre du comitŽ central de la Garde nationale et de la
Commune de Paris, membre des Services publics ; dŽputŽ ˆ l'AssemblŽe
nationale de 1871, dŽmissionna de son mandat ; aprs la chute de la
Commune, Žmigra en Italie, puis en Suisse o il se joignit aux
bakouninistes ; plus tard, l'un des dirigeants et idŽologues des
possibilistes ; aprs son retour en France, il adhŽra au parti ouvrier,
s'allia un moment avec Brousse, puis devint Ç socialiste indŽpendant È ;
crŽa la Revue socialiste.
MALTHUS Thomas
Robert, 1766-1834 : pasteur anglais, Žconomiste, considŽrŽ comme
l'idŽologue de l'aristocratie foncire embourgeoisŽe ; apologiste du
systme capitaliste, dŽveloppa la thŽorie de la population qui justifie la
misre des travailleurs par une loi naturelle.
MARAT Jean-Paul,
1743-1793 publiciste franais ; l'un des dirigeants les plus importants du
Club des Jacobins au cours de la rŽvolution franaise ; directeur du
journal L'Ami du peuple.
MARCHAND
Louis : bakouniniste franais ; envoyŽ ˆ Bordeaux par la Commune de
Paris ; aprs la chute de la Commune, Žmigra en Suisse, o il devint le
secrŽtaire de l'Association des ŽmigrŽs et collabora au journal La
RŽvolution sociale ; fut exclu de l'A.I.T. ˆ
la demande de la section de Bordeaux.
MARIE DE
SAINT-GEORGES, Alexandre-Thomas, 1795-1870 : avocat et homme politique,
rŽpublicain bourgeois ; en 1848, ministre des Travaux publics dans le
gouvernement provisoire ; membre de la commission exŽcutive, prŽsident de
l'AssemblŽe nationale constituante et ministre de la Justice dans le
gouvernement Cavaignac.
MARRAST Armand,
1801-1852 : homme politique et publiciste ; l'un des chefs des
rŽpublicains bourgeois ; rŽdacteur en chef du journal Le National ; en 1848, membre du gouvernement provisoire et maire de
Paris ; prŽsident de l'AssemblŽe nationale constituante.
MARSELAU Nicolˆ
Alonso : anarchiste espagnol, l'un des dirigeants de l'organisation
espagnole de l'Alliance de la dŽmocratie socialiste ; directeur du journal
La Razon de SŽville (1871-1872) ; dŽlŽguŽ
au congrs de La Haye de 1872 ; exclu de l'A.I.T. par dŽcision du Conseil
gŽnŽral du 30 mai 1873.
MARTIN
Constant : rŽvolutionnaire de tendance blanquiste ; participa ˆ la
Commune de Paris ; secrŽtaire du C.C. du XXe arrondissement
durant le sige de Paris ; aprs la chute de la Commune, Žmigra ˆ
Londres ; Žlu au Conseil gŽnŽral de l'A.I.T. (1871-1872), dŽlŽguŽ ˆ la
confŽrence de Londres (1871).
MARX-AVELING
Eleanor (Tussy), 1855-1898 : fille cadette de Karl et de Jenny Marx ;
trs active dans le mouvement ouvrier anglais et international ;
journaliste et Žcrivain, publia des Ïuvres de Marx aprs la mort de
celui-ci ; membre de la Social Democratic Federation (1884) ; en 1889, organisa des manifestations de masse des ouvriers
non qualifiŽs, ainsi que les syndicats des gaziers et des dockers de Londres.
MARX Jenny, nŽe
von Westphalen, 1814-1881 : Žpousa Marx en 1843 dont elle fut la compagne
de vie et de lutte.
MARX Jenny,
1844-1883 : fille a”nŽe de Marx, journaliste ; joua un r™le important
dans la lutte du peuple irlandais pour son indŽpendance ; compagne de
Charles Longuet ˆ partir de 1872.
MARX Karl,
1818-1883.
MARX Laura,
1845-1911 : seconde fille de Karl et Jenny Marx ; trs active dans le
mouvement ouvrier franais, compagne de Paul Lafargue ˆ partir de 1868.
MAURICE
ZŽvy : membre du Conseil gŽnŽral de l'A.I.T. (1866-1872) ;
secrŽtaire-correspondant pour la Hongrie (1870-1871).
MAYER Hermann,
1821-1875 : nŽgociant, socialiste, reprŽsentant du mouvement ouvrier
allemand et amŽricain ; participa ˆ la rŽvolution de 1848-1849 en
Allemagne, puis Žmigra aux ƒtats-Unis en 1852, et se mit ˆ la pointe de la
lutte pour la libŽration des noirs dans l'ƒtat d'Alabama ; participa ˆ la
crŽation des sections de l'A.I.T. de Saint-Louis ; trs liŽ avec
Weydemeyer.
MAYER Karl,
1819-1889 : dŽmocrate petit-bourgeois ; membre de l'AssemblŽe
nationale (1848-1849) ; Žmigra en Suisse ; dans les annŽes 1860,
rŽdacteur du Beobachter de Stuttgart.
MAZZINI
Giuseppe, 1805-1872 : rŽvolutionnaire dŽmocrate bourgeois ; l'un des
chefs du mouvement de libŽration nationale italien ; en 1849, chef du
gouvernement provisoire de la RŽpublique romaine ; fonda en 1850 le comitŽ
central de la DŽmocratie europŽenne ˆ Londres ;
s'effora en 1864 de faire passer l'A.I.T. sous son influence.
MEHRING Franz,
1846-1919 : ancien officier, historien et publiciste ; aprs avoir
ŽtŽ dŽmocrate radical, adhŽra au mouvement marxiste vers 1885, et devint l'un
des dirigeants du mouvement ouvrier allemand ; auteur de plusieurs
ouvrages d'histoire de l'Allemagne et de la social-dŽmocratie allemande, ainsi
que d'une biographie de Marx ; collabora ˆ la Neue Zeit ; fut l'un des dirigeants et des thŽoriciens, avec Rosa
Luxemburg et K. Liebknecht, de l'aile gauche de la social-dŽmocratie ;
aprs 1914, dŽfendit une politique de classe rŽvolutionnaire et mena la lutte
contre la politique de l'union sacrŽe de la socialdŽmocratie allemande ;
adhŽra au mouvement spartakiste en 1918.
MEISSNER Otto
Karl, 1819-1902 : Žditeur de Hambourg, publia Le Capital et plusieurs autres ouvrages de Marx-Engels.
MESA Y LEOMPART
JosŽ, 1840-1904 : typographe, socialiste espagnol ; fut l'un des
premiers propagateurs du marxisme en Espagne ; participa ˆ la fondation
des sections de l'A.I.T. en Espagne ; membre du Conseil fŽdŽral espagnol
(1871-1872), ainsi que de la Nouvelle FŽdŽration de Madrid (1872-1873),
rŽdacteur de La Emancipaci—n (1871-1873) ;
lutta activement contre l'anarchisme ; en 1879, participa ˆ la fondation
du Parti socialiste ouvrier d'Espagne ; traduisit plusieurs ouvrages de
Marx-Engels en espagnol.
MEYEN Edward,
1812-1870 : publiciste, jeune-hŽgŽlien, dŽmocrate petit-bourgeois ;
Žmigra en Angleterre, aprs la rŽvolution de 1848-1849 ; devint plus tard
national-libŽral.
MEYER Siegfried,
nŽ vers 1840-1872 : ingŽnieur des mines ; socialiste de tendance
marxiste ; membre de la commune berlinoise de l'Association gŽnŽrale
des ouvriers allemands, fit partie de l'opposition
prolŽtarienne et entra en correspondance avec Marx ; participa ˆ la
fondation de la section berlinoise de l'A.I.T. ; publia le Manifeste
communiste ˆ ses frais en 1866 ; Žmigra en
1866 aux ƒtats-Unis ; adhŽra au Club des communistes allemands de New York et fut l'un des organisateurs des sections de l'A.I.T.
aux ƒtats-Unis.
MILNER
George : tailleur, de nationalitŽ irlandaise ; partagea les
conceptions du chartiste O'Brien, membre du comitŽ exŽcutif de la Land and
Labour League et du Conseil gŽnŽral de l'A.I.T.
(1868-1872) ; dŽlŽguŽ ˆ la confŽrence de Londres (1871), membre du Conseil
fŽdŽral britannique ˆ partir de l'automne 1872 ; prit position contre
l'aile rŽformiste de ce Conseil.
MIQUEL Johannes,
1828-1901 : avocat, participa ˆ la rŽvolution de 1848-1849 ; membre
de la Ligue des communistes jusqu'en 1852, passa ensuite du c™tŽ de la bourgeoisie ;
participa ˆ la fondation du parti national en 1859 ; maire d'OsnabrŸck
(1865-1870, 1876-1880), l'un des dirigeants les plus influents du parti
national-libŽral, membre de la Dite prussienne, du Reichstag de l'Allemagne du
Nord et de l'Allemagne ; secrŽtaire de Bismarck, fit parvenir des
informations confidentielles ˆ Marx, notamment ˆ propos des nŽgociations
Favre-Bismarck.
MOLL Joseph,
1812-1849 : horloger originaire de Cologne ; l'un des chefs de la Ligue
des Justes et de l'Association pour la formation
des ouvriers allemands de Londres ; membre du
Conseil central de la Ligue des communistes ; de juillet ˆ septembre 1848,
prŽsident de l'Union ouvrire de Cologne ;
membre du comitŽ de district rhŽnan des dŽmocrates et du comitŽ de sžretŽ de Cologne ;
en 1849 participa au soulvement de Bade et du Palatinat ;, fut tuŽ lors
de l'engagement de Murg.
MORA Francisco,
1842-1924 : cordonnier, ŽlŽment marquant du mouvement ouvrier espagnol et
international ; l'un des organisateurs des sections de l'A.I.T. en Espagne
et au Portugal ; membre du comitŽ fŽdŽral espagnol (1870-1872), rŽdacteur
du journal La Emancipaci—n (1871-1873) et de la
Nouvelle fŽdŽration de Madrid (1872-1873) ; lutta activement contre les
influences anarchistes, et resta en correspondance suivie avec
Marx-Engels ; en 1879, organisa le parti ouvrier socialiste d'Espagne.
MORAGO Gonz‡les
Tom‡s : anarchiste espagnol, graveur ; l'un des fondateurs de
l'Alliance en Espagne, dirigea l'Alliance secrte de la dŽmocratie socialiste
et du Conseil fŽdŽral espagnol de l'A.I.T. (1870-1871) ; dŽlŽguŽ au
congrs de La Haye (1872), fut expulsŽ de l'Internationale par dŽcision du
Conseil gŽnŽral le 10 mai 1873.
MORLEY Samuel,
1809-1886 : fabricant et homme politique anglais, libŽral ; dans les
annŽes 1860, membre de l'ExŽcutif de la Reform League ; membre du Parlement (1865, 1868-1885) ; directeur du
Bee-Hive ˆ partir de 1869 ; reprŽsentant
typique de la bourgeoisie radicale anglaise qui s'effora d'influencer dans le
sens bourgeois le mouvement ouvrier.
MOST Johann
Joseph, 1846-1906 : relieur, rŽdacteur, social-dŽmocrate, puis
anarchiste ; adhŽra en 1871 au parti ouvrier social-dŽmocrate ;
dŽputŽ au Reichstag (1874-1878) ; rŽdacteur de la Berliner Freie Presse (1876-1878) ; aprs son expulsion de Berlin, Žmigra ˆ Londres
en 1878 ; Žditeur et journaliste ˆ la Freiheit ˆ partir de 1879 ; exclu pour anarchisme du Parti ouvrier
social-dŽmocrate (1880) ; Žmigra en 1882 aux ƒtats-Unis, o il continua ˆ
propager l'anarchie.
MOTTERSHEAD
Thomas, nŽ vers 1825-1884 : tisserand, membre du Conseil gŽnŽral de
l'A.I.T. (1869-1872) ; secrŽtaire-correspondant pour le Danemark
(1871-1872) ; dŽlŽguŽ ˆ la confŽrence de Londres (1871) et au congrs de
La Haye (1872) ; aprs le congrs de La Haye soutint l'aile rŽformiste contre
la ligne de Marx au Conseil gŽnŽral et au Conseil fŽdŽral ; fut exclu de
l'A.I.T. par dŽcision du 30 mai 1873 du Conseil gŽnŽral.
M†HLBERCER
Arthur, 1847-1907 : mŽdecin, publiciste petit-bourgeois de tendance
proudhonienne ; auteur d'une sŽrie d'articles publiŽs anonymement sur La
Question du logement, dont Engels fit une vive
critique.
MULLER :
membre de l'Union ouvrire ˆ Wšrringen prs de Cologne,
1848.
M†NZER (M†NTZER)
Thomas, nŽ vers 1490-1525 : rŽvolutionnaire, chef et idŽologue du camp
paysan-plŽbŽien durant la RŽforme et la guerre des paysans ‑ que Marx
appelle Ç la rŽvolution philosophique È de l'Allemagne, ˆ la
diffŽrence de la rŽvolution Žconomique en Angleterre et de la rŽvolution
politique en France. Il propagea l'idŽe, prŽsentŽe sous forme mystique, d'un
communisme Žgalitaire ; cette Ç figure grandiose È de la guerre
des paysans fut ˆ la tte de la lutte pour le renversement du pouvoir des
princes et de la noblesse, et prit la tte Ç du mouvement de la classe qui
est plus ou moins la devancire du prolŽtariat moderne È (Engels).
NADEJDE Ion
(Jean), 1854-1928 : social-dŽmocrate roumain, professeur ˆ l'universitŽ de
Jassy ; rŽdacteur en chef de la Revista Sociala ; traduisit L'Origine de la famille
d'Engels ; passa ˆ l'opportunisme dans les annŽes 1890 ; adhŽra au
Parti national-libŽral en 1899, et devint un adversaire du mouvement ouvrier.
NAPOLƒON Ier,
Bonaparte, 1769-1821 : empereur des Franais (1804-1814 et 1815).
NAPOLƒON III,
Louis Bonaparte, 1808-1873 : neveu de NapolŽon Ier ; prŽsident
de la Seconde RŽpublique (1848-1851) ; empereur des Franais (1852-1870).
NETCHAIEV Serge,
1847-1882 : conspirateur et rŽvolutionnaire russe ; participa au
mouvement Žtudiant ˆ Saint-PŽtersbourg, de 1868 ˆ 1869 ; lors de son
sŽjour en Suisse, collabora Žtroitement avec Bakounine ; crŽa en 1869 une
sociŽtŽ secrte appelŽe RŽtribution du Peuple,
fut extradŽ de Suisse par les autoritŽs fŽdŽrales pour tre livrŽ au
gouvernement russe, mourut en prison.
NIEUWENHUIS
Ferdinand Domela, 1846-1919 : reprŽsentant du mouvement ouvrier
hollandais, fut d'abord pasteur ; participa ˆ la fondation de la Ligue
social-dŽmocrate et plus tard du Parti ouvrier social-dŽmocrate de
Hollande ; Žlu au Parlement (1888-1891) ; participa aux congrs de
l'Internationale ouvrire socialiste (1889, 1891 et 1893), vira ˆ l'anarchisme
aprs avoir dŽfendu des positions ultra-gauchistes.
NOBILING Karl
Eduard, 1848-1878 anarchiste ; le 2 juin 1878, fut l'auteur de l'attentat
contre Guillaume 1er qui servit de prŽtexte ˆ Bismarck pour
promulguer la loi anti-socialiste.
NOTHJUNG Peter,
1821-1866 : tailleur, membre de la Commune de Cologne, de la Ligue des
communistes et du comitŽ de l'Union ouvrire de
Cologne ; l'un des accusŽs du procs des
communistes de 1852, fut condamnŽ ˆ six ans de forteresse ; plŽnipotentiaire
de l'Association gŽnŽrale des ouvriers allemands
de Breslau (1863-1866).
O'BRIEN James
(BRONTERRE), 1802-1864 : publiciste, l'un des dirigeants du mouvement
chartiste anglais ; dans les annŽes 1830, rŽdacteur du journal The Poor
Man's Guardian ; auteur de projets de rŽforme
sociale ; en 1849, fonda la National Reform League.
O'BRIEN
Michael : Fenian irlandais, exŽcutŽ en 1867 pour sa participation ˆ la
libŽration des chefs fenians Kelly et Deasy.
O'CONNOR Feargus
Edward, 1794-1855 : l'un des dirigeants de l'aile gauche du
chartisme ; fondateur et Žditeur de The Northern Star, devint rŽformiste aprs 1848.
ODGER George,
1820-1877 : cordonnier, dirigeant syndicaliste anglais ; participa en
1862 ˆ la fondation du Conseil des syndicats de Londres, dont il fut secrŽtaire
de 1862 ˆ 1872 ; membre de la British National League for the
Independence of Poland, de la Land and Labour
League et de la Labour Representatiou League ; participa ˆ l'assemblŽe inaugurale de l'A.I.T. du 28
septembre 1864 ˆ St.Martin's Hall ; membre du Conseil gŽnŽral (1864-1871)
et prŽsident du Conseil gŽnŽral (1864-1867) ; dŽlŽguŽ ˆ la confŽrence de
Londres (1865) et du congrs de Genve (1866) ; membre du comitŽ exŽcutif
de la Reform League : durant la bataille
pour la rŽforme Žlectorale, mena une politique de compromis ; en 1871 prit
position contre la Commune de Paris, ainsi que l'Adresse sur la Guerre
civile en France, et quitta le Conseil
gŽnŽral ; entreprit par la suite une campagne de diffamation contre la
direction de l'A.I.T. et les membres de la Commune.
O'SHEA
Henry : libŽral irlandais, dŽfendit la cause des Fenians emprisonnŽs en
1869.
OUTINE Nicolas
Isaacovitch, 1845-1883 : rŽvolutionnaire russe ; participa au
mouvement Žtudiant ; membre actif de l'organisation populiste Zemlia i
Volia ; Žmigra en 1863 en Angleterre, puis en
Suisse ; l'un des organisateurs de la section russe de l'A.I.T. ;
collabora au journal Narodno•e Dielo
(1868-1870), ˆ L'ƒgalitŽ (1870-1871) ; combattit
Bakounine et ses partisans ; dŽlŽguŽ ˆ la confŽrence de Londres de
l'A.I.T., et se retira quelques annŽes plus tard du mouvement rŽvolutionnaire.
OWEN Robert,
1771-1858 : socialiste utopique anglais, promoteur du syndicalisme, membre
de la Labour Representation League, directeur du
Potteries Examiner.
PARNELL Charles
Stewart, 1846-1891 : homme politique et homme d'ƒtat irlandais ;
nationaliste bourgeois ; Žlu au Parlement en 1875 ; aprs 1877, ˆ la
tte des partisans de l'autonomie administrative de l'Irlande (Home Rule) ; participa ˆ la fondation en 1879 de la Irish Land League qu'il dirigea de 1880 ˆ 1881.
PARNELL
James : tisserand, membre du Conseil gŽnŽral de l'A.I.T. (1869-1870).
PENSE Edward R.,
1857-1955 : socialiste anglais, participa ˆ la fondation de la Fabian
Society dont il fut le secrŽtaire
(1884-1912) ; participa ˆ la fondation du Labour Party.
PERRET
Henri : graveur, l'un des dirigeants de l'A.I.T. en Suisse ; membre
de l'Alliance de la dŽmocratie socialiste (1868
et 1869) ; secrŽtaire du comitŽ fŽdŽral romand (1868-1873) ;
collabora ˆ L'ƒgalitŽ ; dŽlŽguŽ ˆ tous les
congrs de l'A.I.T. ; rompit en 1869 avec les bakouninistes ; au
congrs de La Haye adopta une politique de conciliation.
PERRON
Charles-Eugne, 1837-1919 : ŽlŽment actif du mouvement ouvrier suisse,
peintre en Žmail, puis cartographe ; de tendance bakouniniste, participa
comme dŽlŽguŽ aux congrs de Lausanne (1867) et de Bruxelles (1868) de
l'A.I.T. ; membre du bureau central de l'Alliance de la dŽmocratie
socialiste ; directeur de La SolidaritŽ, l'un des journaux de la FŽdŽration jurassienne ; cessa, aprs
1873, d'tre actif au sein du mouvement ouvrier.
PF€ENDER Karl,
nŽ vers 1818-1876 : peintre miniaturiste, membre de la Ligue des Justes et de l'Association pour la formation des ouvriers allemands de Londres, membre du Conseil central de la Ligue des
communistes et du Conseil central de l'A.I.T.
(1864-1867 et 1870-1872) ; ami et compagnon de lutte de Marx-Engels.
PHILIPS Lion,
mort en 1866 : nŽgociant hollandais, oncle du c™tŽ maternel de Karl Marx.
PICARD
Albert : juriste belge, avocat ˆ la cour d'Appel de Bruxelles, secrŽtaire
de l'Association dŽmocratique.
PIEPER Wilhelm,
nŽ vers 1826 : philologue et journaliste ; membre de la Ligue des
communistes ; vŽcut en Žmigration ˆ Londres, trs proche de Marx-Engels au
cours des annŽes 1850.
PINDAR
Edouard : ŽmigrŽ russe, vŽcut au milieu du XIXe sicle en
Angleterre ; ami proche de Marx-Engels.
PINDY
Jean-Louis, 1840-1917 : menuisier, de tendance proudhonienne ;
dŽlŽguŽ aux congrs de Bruxelles (1868) et de B‰le (1869) ; organisa une
section de l'Internationale ˆ Brest, en septembre 1869 ; membre du Conseil
fŽdŽral de Paris ; accusŽ au troisime procs de l'Internationale ˆ Paris
(1870), condamnŽ ˆ l'emprisonnement ; membre de la Commune, Žmigra ensuite
en Suisse et se joignit aux bakouninistes.
PLEKHANOV
Georghi Valentinovitch, 1856-1918 : Žminent reprŽsentant du mouvement
ouvrier russe et international ; principal propagateur du marxisme en
Russie, s'attacha ˆ son aspect philosophique avec plus ou moins de
bonheur ; Žmigra en 1880 en Suisse ; d'abord populiste, devint
ensuite marxiste ; en 1883, fonda le groupe LibŽration du travail, de tendance nettement marxiste ; dŽlŽguŽ au congrs de
l'Internationale ouvrire socialiste en 1889, etc. ; lutta durant les
annŽes 1880 contre le mouvement populiste et contre l'opportunisme, puis le rŽvisionnisme
dans l'Internationale ; mais rejoignit plus tard les mencheviks et devint
social-chauvin durant la guerre de 1914-1918.
POTTER George,
1832-1893 : charpentier, l'un des dirigeants des syndicats anglais ;
membre du Conseil des syndicats de Londres et de la FŽdŽration syndicale des
ouvriers du b‰timent ; Ždita le Bee-Hive,
et suivit une politique de compromis avec la bourgeoisie libŽrale.
POTTIER Eugne,
1816-1887 : chansonnier, auteur des paroles de L'Internationale ;
membre de la Commune, Žmigra ensuite en Angleterre, puis aux ƒtats-Unis ;
rentra en France aprs l'amnistie.
PROUDHON
Pierre-Joseph, 1809-1865 : publiciste, sociologue et Žconomiste ;
auteur de Qu'est-ce que la propriŽtŽ ?
(1840) ; idŽologue de la petite bourgeoisie, son systme socialiste Žtant
orientŽ vers le retour ˆ la production individuelle, artisanale et ˆ la
coopŽration ; l'un des fondateurs de l'anarchisme ; en 1848, dŽputŽ
de l'AssemblŽe nationale constituante, o il intervint courageusement ;
tout en rendant hommage ˆ ses mŽrites occasionnels, Marx a fait une critique
sŽvre des doctrines Žconomiques de Proudhon.
PYAT FŽlix,
1810-1889 : journaliste, dramaturge et homme politique de tendance
petite-bourgeoise dŽmocratique ; participa ˆ la rŽvolution de 1848-1849
dans le groupe de La Montagne ; dut se
rŽfugier en Suisse aprs la manifestation du 13 juin 1849 ; puis il Žmigra
en Belgique et en Angleterre ; adversaire d'une organisation autonome de
la classe ouvrire, mena des annŽes durant une campagne de diffamation contre
l'A.I.T. et
Marx, en utilisant la section franaise de Londres ; revint en France en
1869, y fonda Le Combat, puis Le Vengeur ; dŽputŽ de l'AssemblŽe nationale (1871), participa ˆ la
Commune, puis il Žmigra en Angleterre ; revenu en France aprs lÕamnistie,
il fut Žlu dŽputŽ des Bouches-du-Rh™ne, et Ždita le journal La Commune de septembre ˆ novembre 1880.
QUARCK Max,
1860-1930 : (Freiwald ThŸringer) : avocat et publiciste ;
social-dŽmocrate de droite ; social-chauvin au cours de la Premire Guerre
mondiale.
QUELCH Harry,
1858-1913 : Žminent reprŽsentant du mouvement ouvrier anglais, ; l'un
des dirigeants des nouveaux syndicats regroupant les ouvriers sans qualification
ainsi que de l'aile gauche socialiste ; directeur de La Justice et de la Twentieth Century Press ;
lutta contre l'opportunisme et la politique libŽrale dans le mouvement ouvrier
anglais, et dŽfendit les courants de gauche dans les partis de la IIe
Internationale ; dŽlŽguŽ aux congrs de l'Internationale socialiste ouvrire.
RACKOW Heinrich,
mort en 1916 : libraire, membre de l'Association gŽnŽrale des ouvriers
allemands, chargŽ de l'expŽdition du Neue Social-demokrat ; expulsŽ de Berlin en 1878, Žmigra ˆ Londres ; membre de
lÕAssociation communiste pour la formation
des ouvriers allemands ˆ Londres.
RAMM
Hermann : social-dŽmocrate ; collabora au Volksstaat en 1875 et ; plus tard, au VorwŠrts.
RANVIER Gabriel,
1828-1879 peintre en dŽcors, rŽvolutionnaire de tendance blanquiste ;
participa ˆ la Commune, fut membre de la commission de la guerre et du comitŽ
de SžretŽ publique ; Žmigra en Angleterre aprs la chute de la
Commune ; membre du Conseil gŽnŽral de lÕA.I.T. (1871-1872), dŽlŽguŽ au
congrs de La Haye ; quitta l'Internationale pour protester contre le
transfert du Conseil gŽnŽral ˆ New York.
RAVEAUX Franz,
1810-1851 : marchand de tabac ˆ Cologne, dŽmocrate petit-bourgeois ;
en 1848 membre du prŽparlement et l'un des chefs du centre gauche ˆ l'AssemblŽe
nationale de Francfort ; ambassadeur de l'Empire en Suisse ; en 1849
membre de la rŽgence provisoire de l'Empire et du gouvernement provisoire de
Bade ; Žmigra aprs l'Žcrasement du soulvement de Bade et du Palatinat.
REICHHELM :
dŽmocrate de Cologne ; membre du comitŽ de sŽcuritŽ de Cologne en 1848.
REIFF Wilhelm
Joseph, nŽ vers 1824 : membre de la Ligue des communistes et de l'Union
ouvrire de Cologne, puis secrŽtaire de l'Association pour la formation des
ouvriers ; exclu de la Ligue des communistes en 1850 ; figura parmi
les accusŽs du procs de Cologne de 1852, condamnŽ ˆ cinq ans de forteresse.
REMY
Theodor : dŽmocrate allemand et socialiste ; fit partie des
francs-tireurs de Garibaldi en Italie (1860) ; membre du comitŽ central de
l'A.I.T. (1868-1870), subit durant une pŽriode l'influence de Bakounine.
RICARDO David,
1772-1823 Žconomiste anglais ; son Ïuvre reprŽsente le sommet de
l'Žconomie politique bourgeoise classique.
RICHARD Albert,
1846-1925 : journaliste, l'un des chefs de la section lyonnaise de
l'A.I.T. ; membre de l'Alliance secrte de la dŽmocratie
socialiste ; participa au soulvement de Lyon
en 1870 ; aprs la chute de la Commune, dŽfendit des positions bonapartistes ;
dans les annŽes 1880, se joignit aux allemanistes, un courant opportuniste du
mouvement ouvrier franais.
RICHTER Karl,
1804-1869 : professeur de thŽologie ˆ Pelpin (Prusse orientale) ; en
1848, dŽputŽ ˆ l'AssemblŽe nationale prussienne (aile gauche).
RILEY William
Harrison, nŽ en 1835 : journaliste, rŽpublicain, socialiste, rŽdacteur et
Žditeur du journal The International Herald ;
membre du Conseil fŽdŽral de l'A.I.T. (1872-1873), il y prit position contre
l'aile rŽformiste.
ROACH
John : reprŽsentant du mouvement ouvrier anglais ; membre du Conseil
gŽnŽral de l'A.I.T. (1871-1872) ; dŽlŽguŽ au congrs de La Haye et
secrŽtaire correspondant du Conseil fŽdŽral britannique, au sein duquel il
appuyait les rŽformistes ; il s'opposa aux dŽcisions du congrs de La
Haye, et fut exclu de l'A.I.T. par dŽcision du Conseil gŽnŽral, le 30 mai 1873.
ROBESPIERRE
Maximilien-Marie-Isodore DE, 1758-1794 : chef des Jacobins et du
gouvernement rŽvolutionnaire de 1793 ˆ 1794.
ROBIN Paul nŽ en
1837 : instituteur, partisan de Bakounine ; ˆ partir de 1869, l'un
des chefs de l'Alliance de la dŽmocratie socialiste ; membre du Conseil
gŽnŽral (1870-1871) ; dŽlŽguŽ au congrs de B‰le (1869) et ˆ la confŽrence
de Londres (1871) ; expulsŽ de l'A.I.T. en octobre 1871.
ROCHAT Charles,
nŽ en 1844 : ŽlŽment trs actif du mouvement ouvrier franais ;
membre du Conseil fŽdŽral parisien de l'A.I.T. ; participa ˆ la Commune de
Paris ; membre du Conseil gŽnŽral et secrŽtaire-correspondant pour la
Hollande (1871-1872) ; dŽlŽguŽ ˆ la confŽrence de Londres de 1871.
ROCHEFORT
Victor-Henri, marquis de Rochefort-Luay, 1830-1913 : homme politique,
Žcrivain et polŽmiste cŽlbre ; rŽpublicain de gauche, fonda sous l'Empire
La Lanterne (1868-1869), puis La Marseillaise
(1869-1870), ˆ laquelle collabora la fille de Marx,
Jenny ; membre du gouvernement de la DŽfense nationale, dŽmissionna aprs
les Žmeutes du 31 octobre qui prŽparrent la Commune ; journaliste sous la
Commune, condamnŽ ˆ la dŽportation, parvient ˆ s'Žvader ; aprs
l'amnistie, fonda L'Intransigeant, soutint
d'abord les socialistes, puis le boulangisme, ce qui lui valut un nouvel exil.
RODBERTUS
(-JACESTZOW), Johann Karl, 1805-1875 : grand propriŽtaire foncier
prussien, Žconomiste et idŽologue des hobereaux embourgeoisŽs ; de 1848 ˆ
1849, chef du centre gauche ˆ lÕAssemblŽe nationale prussienne ; thŽoricien
du Ç socialisme d'ƒtat È des hobereaux prussiens (repris par
Bismarck).
ROESGEN Charles,
employŽ de la firme Ermen & Engels de Manchester.
ROGIER
Charles-Latour, 1800-1885 homme d'ƒtat belge, libŽral modŽrŽ ; prŽsident
du Conseil et ministre de lÕIntŽrieur (1847-1852).
RONGE Johannes,
1813-1887 : prtre, fondateur et dirigeant du catholicisme allemand,
courant qui voulait adapter le catholicisme aux besoins de la bourgeoisie
allemande ; dŽmocrate petit-bourgeois, prit part ˆ la rŽvolution de 1848-1849,
puis Žmigra en Angleterre.
R…SER Peter
Gerhard, 1814-1865 : cigarier ˆ Cologne ; en 1848-1849,
vice-prŽsident de l'Union ouvrire de
Cologne ; l'un des accusŽs du procs des communistes de Cologne en 1852,
fut condamnŽ ˆ six ans de forteresse ; passa plus tard au lassallŽanisme.
RUGE Arnold,
1802-1880 : publiciste radical, jeune hŽgŽlien, dŽmocrate
petit-bourgeois ; en 1844, Ždita, avec Marx, les Annales franco-allemandes ; en 1848, dŽputŽ ˆ l'AssemblŽe nationale de Francfort (aile
gauche) ; l'un des chefs de l'Žmigration petite-bourgeoise ˆ Londres dans
les annŽes 1850 ; devint national-libŽral aprs 1866.
SAEDT Otto
Joseph Arnold, 1816-1886 : fonctionnaire prussien de la Justice ;
procureur gŽnŽral ˆ Cologne en 1848, puis au procs des communistes de 1852.
SAINT-CLAIR E.
P. : reprŽsentant du mouvement ouvrier amŽricain, de souche
irlandaise ; fut Žlu au Conseil gŽnŽral par le congrs de La Haye en 1872.
SAINT-SIMON
Claude-Henri de Rouvray, comte de, 1760-1825 socialiste utopiste
franais ; s'enrichit en spŽculant sur les biens nationaux, mais se ruina
vers 1800 ; il dŽveloppa alors son systme qu'il Žlabore depuis la Lettre
d'un habitant de Genve (1802) jusqu'au CatŽchisme
des Industriels (1823-1824).
SAUVA
Arsne : tailleur, socialiste de l'Žcole de Cabet, dirigea les colonies
icariennes aux ƒtats-Unis ; participa ˆ la Commune de Paris, puis Žmigra
aux ƒtats-Unis ; dŽlŽguŽ au congrs de La Haye, soutint la minoritŽ
anarchiste ; prit une part active au mouvement socialiste des ƒtats-Unis
dans les annŽes 1870.
SCHAPPER Karl,
1812-1870 : l'un des dirigeants de la Ligue des Justes et de l'Association pour la formation des ouvriers allemands de Londres ; membre du Conseil central de la Ligue des
communistes ; participa ˆ la rŽvolution de 1848-1849 ; lors de la
scission de la Ligue en 1850, prit avec Willich la tte de la fraction hostile
ˆ Marx ; en 1856, se rapprocha de Marx ; en 1865, membre du Conseil
central de l'A.I.T. et dŽlŽguŽ ˆ la confŽrence de Londres.
SCHERZER
Andreas, 1807-1879 : tailleur, membre de la commune parisienne de la Ligue
des communistes ; aprs la scission de 1850, rejoignit la fraction
Willich-Schapper ; fit partie des accusŽs du procs de 1852 relatif au
prŽtendu complot franco-allemand ; Žmigra ensuite en Angleterre ; l'un
des chefs de l'Association pour la formation des ouvriers allemands de Londres ; directeur de la Neue Zeit et collaborateur de l'hebdomadaire Das Volk.
SCHILLY Victor,
1810-1875 : avocat, dŽmocrate ; participa ˆ lÕinsurrection de Bade et
du Palatinat en 1849, puis Žmigra en France ; membre de l'A.I.T.
SCHL…FFEL
Friedrich Wilhelm, 1800-1870 : fabricant silŽsien, dŽmocrate ; dŽputŽ
en 1848 de l'AssemblŽe nationale de Francfort (aile gauche) ; participa en
1849 au soulvement de Bade et du Palatinat, puis Žmigra en Suisse et aux
ƒtats-Unis.
SCHL†TER
Hermann, mort en 1919 : ŽlŽment marquant du mouvement ouvrier amŽricain et
international ; dans les annŽes 1880, directeur de la maison d'Ždition
social-dŽmocrate ˆ Zurich, puis l'un des organisateurs des archives de la
social-dŽmocratie allemande ; expulsŽ de Suisse en 1888, Žmigra aux
ƒtats-Unis, o il prit une part active au mouvement ouvrier des
ƒtats-Unis ; auteur d'ouvrages sur l'histoire du mouvement ouvrier
amŽricain et anglais ; correspondit longtemps avec Engels.
SCHMIDT Conrad,
1863-1932 : Žconomiste et philosophe, correspondant dÕEngels ;
rŽdacteur du VorwŠrts, fit partie du groupe opportuniste
de gauche des Ç Jeunes È ; rŽdigea en 1890 la Berliner Volkstribun ; rejoignit plus tard la tendance rŽvisionniste et fut
rŽdacteur des Sozialistiche Monatshefte.
SCHMITZ
Th. : secrŽtaire privŽ ˆ Cologne, tŽmoin ˆ dŽcharge au procs des
communistes de Cologne en 1852.
SCHNAPPHANSKI
cf. LICHNOWSKI Felix Maria : personnage caricatural de la satire de
Heinrich Heine, Atta Troll, ou de l'ouvrage de
Georg Weerth, Leben und Taten des berŸhmten Ritters Schnapphahnski.
SCHNEIDER II,
Karl : avocat de Cologne ; dŽmocrate petit-bourgeois ; en 1848,
prŽsident de la SociŽtŽ dŽmocratique de Cologne et membre du ComitŽ de district
des dŽmocrates et du comitŽ de sŽcuritŽ de Cologne ; en 1849, dŽfenseur de
Marx-Engels aux procs contre La Nouvelle Gazette rhŽnane ; en 1852, dŽfenseur au procs des communistes de Cologne en
1852 ; cessa plus tard toute activitŽ politique.
SCHRAMM Conrad,
nŽ vers 1822-1858 : membre de la Ligue des communistes, participa ˆ la rŽvolution de 1848-1849. ƒditeur de la Kieler
Demokratisches Wochenblatt, Žmigra ˆ Londres aprs
1849 ; directeur responsable de La Nouvelle Gazette rhŽnane. Revue Žconomique et politique ;
membre de l'Association pour la formation des ouvriers communistes de Londres ; resta avec Marx-Engels, lors de la scission de la
Ligue des communistes ; ami et compagnon de
lutte de Marx-Engels.
SCHRAMM Karl
August : social-dŽmocrate de tendance rŽformiste ; rŽdacteur du Jahrbuch
fŸr Sozialwissenschaft und Sozialpolitik, quitta le
parti dans les annŽes 1880.
SCHULTE :
dŽmocrate de Hitdorf prs de Cologne.
SCHULTZE-DELITZSCH
Franz Hermann : Žconomiste et homme politique petit-bourgeois ;
partisan de l'unitŽ allemande sous l'hŽgŽmonie de la Prusse ; cofondateur
du parti national ; dans les annŽes 1860, l'un des chefs du Parti du
progrs ; il tenta de dŽvier les ouvriers du combat rŽvolutionnaire en
pr™nant l'organisation de coopŽratives.
SCHURZ Karl,
1829-1906 : dŽmocrate petit-bourgeois, participa au soulvement de Bade et
du Palatinat en 1849 ; libŽra Kinkel de prison en 1850 ; Žmigra en
Suisse, puis aux ƒtats-Unis en 1852 ; participa ˆ la guerre civile aux
c™tŽs des Nordistes ; plus tard ambassadeur des ƒtats-Unis en Espagne,
puis sŽnateur et ministre de l'IntŽrieur.
SCHWEITZER
Johann Baptist von, 1834-1875 avocat, puis journaliste et Žcrivain ;
copropriŽtaire et directeur du Social-demokrat
(1864-1867), et ˆ partir de 1868 propriŽtaire unique ; se rallia vers 1862
au lassallŽanisme ; en 1863 membre, de 1867-1871 prŽsident de l'Association
gŽnŽrale des ouvriers allemands ; il soutint
de plus en plus ouvertement la politique de Bismarck d'unification de l'Allemagne
sous l'hŽgŽmonie de la Prusse ; freina la jonction du mouvement ouvrier
allemand avec l'Internationale et la rŽalisation de l'unitŽ du mouvement
ouvrier allemand sur la base du communisme scientifique ; aprs avoir ŽtŽ
dŽmasquŽ comme agent de Bismarck, fut exclu en 1872 de l'Association
gŽnŽrale des ouvriers allemands.
SCHWITZGUEBEL
AdhŽmar, 1844-1895 : graveur, disciple suisse de Bakounine ; membre
de l'A.I.T. ; l'un des chefs de l'Alliance de la dŽmocratie socialiste et
de la Section jurassienne ; dŽlŽguŽ au congrs de La Haye ; fut exclu
de l'A.I.T. en 1873 par dŽcision du Conseil gŽnŽral.
SECKENDORFF
August Heinrich Eduard Friedrich, Freiherr von, 1807-1885 : juriste
prussien, fonctionnaire de la justice ; de 1849 ˆ 1851, dŽputŽ de la
seconde Chambre (centre) ; chargŽ de l'accusation au procs des
communistes de Cologne.
SEIFFERT
Rudolph, 1826-1886 : social-dŽmocrate, membre de la rŽdaction du Volksstaat, l'un des organisateurs de l'Association des travailleurs du bois.
SEILER
Sebastian, nŽ vers 1810-1890 : publiciste ; au dŽbut des annŽes 1840,
disciple de Weitling en Suisse ; rejoignit Marx et Engels en 1846 et
devint membre du comitŽ de correspondance communiste ; membre de la Ligue
des communistes ; de 1848 ˆ 1849, stŽnographe
ˆ l'AssemblŽe nationale franaise ; Žmigra en 1856 aux ƒtats-Unis, ou il
fut journaliste et instituteur ; participa activement au mouvement socialiste
amŽricain.
SERRAILLIER
Auguste, nŽ en 1840 : ouvrier formier en chaussures, compagnon de lutte de
Marx-Engels, membre du Conseil gŽnŽral de l'A.I.T. (1869-1872) ;
secrŽtaire-correspondant pour la Belgique (1870) et pour la France
(1871-1872) ; fut envoyŽ en septembre 1870, aprs la chute de l'Empire, ˆ
Paris, comme Žmissaire du Conseil gŽnŽral ; participa ˆ la Commune de
Paris et ˆ l'activitŽ de la commission du Travail et de l'ƒchange ;
condamnŽ ˆ mort par contumace ; dŽlŽguŽ ˆ la confŽrence de Londres (1871)
et au congrs de La Haye (1872) ; membre du Conseil fŽdŽral britannique
(1873-1874).
SHAW Robert, nŽ
vers 1869 : peintre, propagandiste des idŽes de l'A.I.T. dans les
syndicats anglais ; participa ˆ la fondation de l'A.I.T., membre du
Conseil gŽnŽral (1864-1869), dont il fut le trŽsorier (1867-1869),correspondant
pour l'AmŽrique.
SHIPTON George,
1839-1911 : fondateur et secrŽtaire de la fŽdŽration syndicale des
peintres en b‰timent et des dŽcorateurs ; secrŽtaire du Conseil des
syndicats londoniens (1872-1896) ; directeur du Labour Standard.
SIEBEL Karl,
1836-1868 : pote rhŽnan, contribua beaucoup ˆ la propagation des Ïuvres
de Marx-Engels, notamment du premier volume du Capital ; parent ŽloignŽ d'Engels.
SINGER Paul,
1844-1911 : reprŽsentant marquant de la social-dŽmocratie allemande ;
commena par soutenir financirement le parti durant les annŽes 1870, puis y
adhŽra au dŽbut de la loi antisocialiste ; expulsŽ de Berlin en
1886 ; membre de l'exŽcutif ˆ partir de 1887, prŽsida le parti, avec
Bebel, ˆ partir de 1890 ; dŽputŽ au Reichstag (1884-1911), lutta contre le
rŽvisionnisme et l'opportunisme.
SONNEMANN
LŽopold, 1831-1909 : Žditeur de journaux et homme politique, dŽmocrate
petit-bourgeois ; fonda en 1856 la Frankfurter Handels-Zeitung, participa ˆ la fondation du Parti national (1859) ; membre du
comitŽ permanent de la fŽdŽration des sociŽtŽs ouvrires allemandes et du Parti
populaire ; s'employa sans succs ˆ tenir les ouvriers sous l'influence de
la bourgeoisie ; prit position contre l'unification de lÕAllemagne sous
l'hŽgŽmonie prussienne, dŽputŽ au Reichstag (1871-1876, 1878-1884).
SORGE Friedrich
Adolf, 1828-1906 : communiste allemand, compagnon de lutte de Marx-Engels,
participa au soulvement de Bade et du Palatinat en 1849 ; ŽmigrŽ aux
ƒtats-Unis, il y joua un grand r™le dans le mouvement ouvrier, organisant
notamment les sections de l'A.I.T. ; membre du Club des communistes
allemands de Cologne ; participa ˆ la
fondation de la section n¡ 1 de New York et environs ; aprs la
dissolution de celle-ci, participa ˆ la fondation de l'Association gŽnŽrale
des ouvriers allemands de New York (1869) qui entra
ˆ la National Labor Union comme Labor Union n¡ 5
de New York ; participa ˆ la fondation du comitŽ central nord-amŽricain de
l'A.I.T. (1870) ; dŽlŽguŽ au congrs de La Haye ; Žlu secrŽtaire
gŽnŽral du Conseil gŽnŽral aprs son transfert ˆ New York ; entretint une
correspondance suivie avec Marx-Engels, dont il fut l'ami fidle.
SPEYER Carl, nŽ
en 1845 : ŽbŽniste ; secrŽtaire de l'Association pour la formation
des ouvriers allemands durant les annŽes
1860 ; membre de l'A.I.T. ; Žmigra aux ƒtats-Unis en 1870, et
correspondit rŽgulirement avec Marx-Engels ; ˆ partir de 1872, membre du
Conseil gŽnŽral transfŽrŽ ˆ New York.
SPLINGARD
Roach : dŽlŽguŽ belge au congrs de l'A.I.T. de La Haye, fit partie de la
commission d'enqute sur l'activitŽ de l'Alliance de la dŽmocratie
socialiste ; anarchiste, fut exclu de l'A.I.T.
par dŽcision du Conseil gŽnŽral du 30 mai 1873.
STEFFEN
Wilhelm : ancien officier prussien, tŽmoin ˆ dŽcharge au procs des
communistes de Cologne en 1852 ; Žmigra en 1853 en Angleterre, puis aux
ƒtats-Unis ; proche de Marx-Engels au cours des annŽes 1850.
STEIN Julius,
1813-1883 : instituteur ˆ Breslau, publiciste dŽmocrate ; en 1848,
dŽputŽ ˆ l'AssemblŽe nationale prussienne (aile gauche), prŽsident du Club
dŽmocratique de Berlin, plus tard rŽdacteur en chef
de la Breslauer Zeitung.
STEPNEY Cowell
William Frederick, 1820-1872 : membre de la Reform League et du Conseil gŽnŽral de
l'A.I.T.
(1866-1872) dont il fut le trŽsorier (1868-1870) ; dŽlŽguŽ aux congrs de
Bruxelles (1868), de B‰le (1869) et ˆ la confŽrence de Londres (1871), membre
du Conseil fŽdŽral britannique (1872).
STIEBER Wilhelm,
1818-1882 : officier de police ˆ partir de
1851 ;
dirigea la police politique prussienne (1852-1860) ; organisa les faux qui
servirent de pices ˆ charge contre les communistes du procs de Cologne de
1852, comme principal accusateur ; en 1866, durant la guerre
austro-prussienne, et en 1870-1871, durant la guerre franco-prussienne, il fut
chef de la police militaire ainsi que du service d'espionnage et de
contre-espionnage.
STUMPF Paul, nŽ
vers 1827-1913 : ouvrier mŽcanicien, puis
marchand, ami de
Marx-Engels ; en 1847, membre de l'Association des travailleurs
allemands de Bruxelles et de la Ligue des
communistes ; participa ˆ la rŽvolution de
1848-1849 en Allemagne, fonda et dirigea la section de Mayence de l'Union
ouvrire ; dŽlŽguŽ au congrs de Lausanne de
1867 ; membre du parti social-dŽmocrate ouvrier ds 1869.
SYLVIS William,
1828-1869 : ouvrier fondeur ; en 1859, participa ˆ la fondation de
l'Union internationale des fondeurs de fer, dont il devint le prŽsident
(1863-1869) ; participa ˆ la guerre civile amŽricaine (1861-1865) au c™tŽ
des Nordistes ; en 1866, participa ˆ la fondation de la National Labor
Union aux ƒtats-Unis, dont il fut le prŽsident
(1868-1869) ; intervint pour l'affiliation ˆ l'A.I.T.
TCHERNYCHEVSKI
Nicola• Gavrilovitch, 1828-1889 : dŽmocrate rŽvolutionnaire :
romancier et critique russe, dont le roman Que faire ?, Žcrit en prison, fut longtemps l'ouvrage de base de la jeunesse
rŽvolutionnaire russe. DŽportŽ en SibŽrie pour ses idŽes libŽrales puis mis en
rŽsidence surveillŽe ; reprŽsentant Žminent de la littŽrature et de la
philosophie rŽvolutionnaire russe.
TEDESCO Victor,
1821-1897 : avocat belge, dŽmocrate rŽvolutionnaire et socialiste ;
participa en 1847 ˆ la fondation de l'Association dŽmocratique ˆ Bruxelles ; liŽ Žtroitement ˆ Marx-Engels ; condamnŽ ˆ
mort lors du procs de Cologne, appelŽ Risquons-Tout, fut Ç graciŽ È
et sa peine commuŽe en trente ans de prison ; libŽrŽ en 1854.
TELLERING
(MULLER-TELLERING) Eduard von, nŽ vers 1808 juriste et publiciste, dŽmocrate
petit-bourgeois ; en 1848-1849, collabora ˆ La Nouvelle Gazette rhŽnane, puis Žmigra en Angleterre, o il attaqua Marx-Engels dans la
presse ; Žmigra en 1852 aux ƒtats-Unis.
THEISZ
Albert-FrŽdŽric-FŽlix, 1839-1880 : graveur, membre de l'Internationale,
inculpŽ dans le troisime procs de l'Internationale (1870) ; de tendance
proudhonienne ; membre de la Commune, condamnŽ ˆ mort, se rŽfugia ˆ
Londres ; membre du Conseil gŽnŽral de l'A.I.T., dont il fut le trŽsorier
(1871) ; revenu en France aprs l'amnistie, adhŽra ˆ l'Alliance
dŽmocratique rŽpublicaine avec Longuet.
THIERS Adolphe,
1797-1877 : historien et homme d'ƒtat franais ; orlŽaniste ;
ministre de l'IntŽrieur (1832-1834), prŽsident du Conseil (1836-1840) ;
prŽsident de la RŽpublique (1871-1873) ; bourreau de la Commune de Paris.
THOMPSON Thomas
Perronet, 1783-1869 : homme politique anglais et Žconomiste
vulgaire ; partisan du libre-Žchange.
TOLAIN
Henri-Louis, 1828-1897 : graveur, proudhonien de droite ; membre de
l'A.I.T. ds le dŽbut ; il assista ˆ l'AssemblŽe inaugurale du 28
septembre ˆ St Martin's Hall ; l'un des chefs de la section parisienne de
l'Internationale ; dŽlŽguŽ ˆ la confŽrence de Londres (1865) et aux
congrs de Genve (1866), de Lausanne (1867), de Bruxelles (1868) et de B‰le
(1869) ; dŽputŽ ˆ l'AssemblŽe nationale de 1871, o il siŽgea durant la
Commune, passant directement aux Versaillais ; fut exclu pour cette raison
de l'Internationale en 1871.
T…LCKE Karl
Wilhelm, 1817-1893 avocat ; participa ˆ la rŽvolution de 1848-1849 ;
lassallŽen, adhŽra en 1864 ˆ l'Association gŽnŽrale des ouvriers allemands, dont il fut prŽsident (1865-1866) et membre du comitŽ exŽcutif
(1865-1874) ; collaborateur direct de J. B. von Schweitzer, dont il appuya
la politique anti-ouvrire.
TOMAS Francisco,
nŽ vers 1850-1903 : maon, membre du Conseil fŽdŽral espagnol de l'A.I.T.
(1872-1873), l'un des chefs de l'organisation anarchiste en Espagne ; fut
exclu de l'A.I.T. par dŽcision du Conseil gŽnŽral, le 30 mai 1873.
TOWNSHEND
William : ouvrier anglais, membre du Conseil gŽnŽral de l'A.I.T.
(1869-1872) ; participa au mouvement socialiste anglais dans les annŽes
1880.
TRIER Gerson, nŽ
en 1851 : instituteur danois ; l'un des chefs de la minoritŽ rŽvolutionnaire
du parti social-dŽmocrate du Danemark ; lutta contre la politique
rŽformiste de l'aile opportuniste du parti ; traduisit plusieurs ouvrages
d'Engels en danois.
TRIDON
Edme-Marie-Gustave, 1841-1871 : homme politique et publiciste ; de
tendance blanquiste, dŽputŽ ˆ l'AssemblŽe nationale de 1871 ; membre de la
Commune, Žmigra aprs sa chute en Belgique.
TRISTAN Flora,
1803-1844 : figure Žminente d'une phase progressive du mouvement ouvrier
franais ; dŽfendit les droits de la femme et de l'ouvrire ;
quittant la grande bourgeoisie, partagea la vie et le travail des ouvrires, et
proposa l'unification de la classe ouvrire sur la base d'un parti regroupant
les travailleurs et dŽfendant leurs droits face ˆ toutes les autres classes de
la nation ; mourut au cours d'un tour de France pour son agitation.
VAILLANT
ƒdouard, 1840-1915 : mŽdecin, ingŽnieur, docteur s sciences ;
blanquiste ; membre de l'Internationale, dŽlŽguŽ au congrs de Lausanne
(1867), ˆ la confŽrence de Londres (1871) et au congrs de La Haye
(1872) ; membre de la Commune, condamnŽ ˆ mort ; rŽfugiŽ ˆ Londres,
il se rapprocha d'abord de Marx-Engels, puis rompit avec l'Internationale aprs
le congrs de La Haye, pour protester contre le transfert du Conseil gŽnŽral ˆ
New York et la mise en veilleuse de l'Internationale ; il s'intŽressa
nŽanmoins aux idŽes de Marx-Engels ; rentrŽ aprs l'amnistie ˆ Paris, il
fonda le ComitŽ rŽvolutionnaire central ; vice-prŽsident du congrs de
l'Internationale ouvrire socialiste (1889) ; conseiller municipal de
Paris en 1884, puis dŽputŽ ˆ partir de 1893 ; se rapprocha de Guesde au
moment de l'entrŽe de Millerand au gouvernement Waldeck-Rousseau (1899) ;
participa ˆ la fondation du parti socialiste en France (1901), subit fortement
l'influence de Jaurs, mais tomba dans le social-chauvinisme en 1914.
VARLIN
Louis-Eugne, 1839-1871 : relieur, proudhonien de gauche, l'un des
dirigeants franais les plus marquants de l'Žpoque de la Ire Internationale ;
organisa les sections de l'A.I.T. en France ; dŽlŽguŽ ˆ la confŽrence de
Londres (1865), aux congrs de Genve (1866) et de B‰le (1869) ; rŽalisa
en 1869 l'union des associations syndicales, jetant les bases d'une solidaritŽ
ouvrire ; membre de la Garde nationale il est Žlu membre de la Commune
par les VIe, XIIe et XVIIe arrondissements ;
membre de la commission des Finances ; fit preuve de grandes qualitŽs
d'organisation et d'un grand courage au combat ; fusillŽ par les
Versaillais, le 28-5-1871.
VERMERSCH
Eugne, 1845-1878 journaliste, petit-bourgeois Ždita durant la Commune le
journal Le Pre Duchesne, aprs la chute de la
Commune Žmigra en Angleterre o il publia le journal Qui Vive !, dans lequel il attaqua, entre autres, le Conseil gŽnŽral de
l'A.I.T.
VESINIER Pierre,
1826-1902 : publiciste petit-bourgeois ; l'un des organisateurs de la
branche franaise de Londres ; dŽlŽguŽ ˆ la confŽrence de Londres (1865),
fut exclu, pour diffamation, du Conseil central en 1866, et de l'A.I.T. en
1867 ; Žlu, le 16 avril, membre de la Commune pour le 1er
arrondissement membre de la Commission des Services publics, nommŽ ˆ la
direction du Journal officiel ; condamnŽ ˆ
mort par contumace, se rŽfugia ˆ Londres ; secrŽtaire de la Section
franaise de 1871 ; membre du Conseil fŽdŽraliste universel, poursuivit
ses attaques contre le Conseil gŽnŽral de l'A.I.T. et Marx-Engels.
VICTOR-EMMANUEL
II, 1820-1878 : duc de Savoie, roi de Sardaigne (1849-1861) ; roi
d'Italie (1861-1878).
VIERECK Louis,
1851-1921 : Žditeur, juriste et journaliste ; social-dŽmocrate dŽputŽ
au Reichstag (1884-1887) ; l'un des dirigeants les plus en vue de l'aile
droite de la fraction parlementaire de la social-dŽmocratie allemande ;
fut dŽchargŽ de toutes ses fonctions par dŽcision du congrs de Saint-Gallien
de 1887 ; se dŽtourna ensuite de la social-dŽmocratie et Žmigra aux
ƒtats-Unis en 1890.
VILMOT (de son
vrai nom : VILMART Raymond) : rŽvolutionnaire franais, participa ˆ
la Commune ; dŽlŽguŽ des sections de Bordeaux au congrs de La Haye
(1872) ; Žmigra en 1873 ˆ Buenos Aires, o il propagea les principes de
l'Internationale.
VOGEL VON
FALCKENSTEIN Eduard, 1797-1885 : gŽnŽral prussien ; dŽputŽ du parti
conservateur au parlement de l'Allemagne du Nord (1867-1871) ; durant la
guerre franco-prussienne gouverneur gŽnŽral des c™tes allemandes, fut ˆ lÕorigine
de l'arrestation du comitŽ de Brunswick du parti social-dŽmocrate allemand.
VOGT August, nŽ
vers 1830-1833 : cordonnier, partisan de Marx-Engels ; membre de la
Ligue des communistes, participa ˆ la rŽvolution de 1848-1849 ; membre de
la commune berlinoise de l'Association gŽnŽrale des ouvriers allemands il y dirigea l'opposition prolŽtarienne ; membre de la section
berlinoise de l'A.I.T. ; Žmigra aux ƒtats-Unis en 1867, membre du Club des
communistes allemands de New York ; participa ˆ la fondation des sections
de l'A.I.T. aux ƒtats-Unis, secrŽtaire-correspondant pour l'AmŽrique.
VOGT Karl,
1817-1895 : naturaliste, matŽrialiste vulgaire, dŽmocrate
petit-bourgeois ; membre de l'AssemblŽe nationale de Francfort (aile
gauche) ; en juin 1849, l'un des cinq rŽgents d'Empire ; en 1849,
Žmigra en Suisse o il prit un poste de professeur ˆ Genve ; devint un
agent stipendiŽ de NapolŽon III durant les annŽes 1850 ; l'un des ennemis
les plus acharnŽs du mouvement rŽvolutionnaire et communiste.
VOLLMAR Georg
Heinrich von, 1850-1922 ancien officier bavarois ; social-dŽmocrate,
rŽdacteur du Dresdner Volksbote (1877) et du Sozial-demokrat (1879-1880), dŽputŽ au Reichstag (1881-1887 et 1890-1918) et de la
Dite bavaroise (1893-1918) ; ˆ partir des annŽes 1890, l'un des
porte-parole les plus influents de l'opportunisme dans la social-dŽmocratie
allemande ; social-chauvin durant la Premire Guerre mondiale.
WACHTER
Karl : conseiller rŽfŽrendaire ˆ Cologne ; dŽmocrate
petit-bourgeois ; en 1848, commandant de la Garde civile et membre du
comitŽ de sŽcuritŽ de Cologne.
WALLAU Karl,
1823-1877 : typographe ˆ la Deutsche BrŸsseler Zeitung ; en 1848, prŽsident de l'Association de formation des ouvriers
de Mayence ; plus tard bourgmestre de Mayence.
WALRAFF :
dŽmocrate de Frechen, prs de Cologne.
WALTON Alfred
A., nŽ en 1816 : architecte ; membre de la Reform League, prŽsident de la National Reform League ; membre du Conseil gŽnŽral de l'A.I.T. (1867-1870), dŽlŽguŽ au
congrs de Lausanne (1867).
WARD Osborne
reprŽsentant du mouvement ouvrier amŽricain ; membre de la section de
l'A.I.T., de Brooklyn : influencŽ par les rŽformateurs bourgeois, fut Žlu
au Conseil gŽnŽral par le congrs de La Haye (1872).
WEBB Sidney
James, baron Passfield, 1859-1947 : homme politique, fondateur de la Fabian
Society ; en commun avec sa femme, BŽatrice,
Žcrivit divers ouvrages d'Žconomie bourgeoise et de rŽformes sociales, afin de
dŽmontrer que la question ouvrire pouvait tre rŽsolue dans les conditions du
capitalisme.
WEBER :
juriste prussien ; en 1860, avocat de Marx dans son procs contre la National-Zeitung de Berlin.
WEBER
Georg : mŽdecin de Cologne ; collabora au VorwŠrts (1844) ; secrŽtaire pour l'Allemagne du Nord du ComitŽ de correspondance
communiste ; Marx lui rendit visite le 5-7-1871 aprs vingt-cinq ans de
sŽparation.
WEERTH Georg,
1822-1856 : nŽgociant, pote et publiciste ; en 1843, Žmigra en
Angleterre ; fit connaissance d'Engels en 1843 et restera toujours son
ami, dŽfendant dans ses Žcrits les idŽes du socialisme ; fit partie du
conseil directeur de l'Association dŽmocratique de Bruxelles en 1847 ;
aprs un voyage ˆ Bruxelles o il fit la connaissance de Marx, auquel il resta
toujours liŽ, il adhŽra ˆ la Ligue des communistes ; en 1848-1849, rŽdigea le feuilleton de La Nouvelle Gazette
rhŽnane ; s'installa en ŽtŽ 1849 ˆ Paris, o
il se lia avec Heine ; devint voyageur de commerce en 1850, mourut le 30
juillet 1856 ˆ La Havane.
WEITLING Wilhelm
1808-1871 : compagnon tailleur de Magdebourg ; en 1835, membre de la Ligue
des Proscrits ˆ Paris ; ˆ partir de 1837,
dirigeant et thŽoricien de la Ligue des Justes ;
le plus important reprŽsentant du communisme ouvrier utopique ; de 1840 ˆ
1843 dŽveloppa une activitŽ rŽvolutionnaire en Suisse ; aprs 1844, sa
thŽorie ne correspondit plus aux besoins du mouvement ouvrier ; chercha ˆ
relancer ses idŽes ˆ Londres en 1845 avec les chefs de la Ligue des Justes, et au dŽbut 1846 avec le comitŽ de correspondance communiste de
Bruxelles ; se rendit, de 1846 ˆ 1848, aux ƒtats-Unis ; dŽveloppa
durant la rŽvolution de 1848 ˆ 1849 des idŽes anarchistes ˆ Hambourg et ˆ
Berlin ; fin 1849, reprit son activitŽ dans le mouvement ouvrier
amŽricain, mais tomba dans le sectarisme teintŽ plus ou moins de religiositŽ ;
ˆ la fin de sa vie, se rapprocha de l'Internationale.
WERMUTH :
directeur de la police ˆ Hanovre ; tŽmoin ˆ charge au procs des
communistes de Cologne (1852) ; rŽdigea, avec Stieber, les Conjurations
communistes du XIXe sicle.
WEST
William : radical bourgeois amŽricain ; membre du comitŽ central de
la FŽdŽration nord-amŽricaine de l'A.I.T. ; secrŽtaire de la section 12 de
New York, qui fut exclue de l'Internationale par le congrs de La Haye (1872).
WESTON
John : charpentier, entrepreneur, disciple d'Owen ; participa ˆ
l'assemblŽe inaugurale de l'A.I.T. le 28 septembre 1864 ; membre actif du
Conseil gŽnŽral (1864-1872) ; dŽlŽguŽ ˆ la confŽrence de Londres
(1865) ; membre du comitŽ exŽcutif de la Reform League, l'un des dirigeants de la Land and Labour League ; membre du Conseil fŽdŽral britannique.
WEYDEMEYER
Joseph, 1818-1866 : ŽlŽment marquant du mouvement ouvrier allemand et
amŽricain ; vers 1845, influencŽ par le socialisme Ç vrai È,
passa ensuite, gr‰ce ˆ Marx-Engels, sur les positions du communisme
scientifique ; de 1848 ˆ 1851, chef du district de Francfort de la Ligue
des communistes ; participa ˆ la rŽvolution de 1848-1849, l'un des
rŽdacteurs responsables de la Neue Deutsche Zeitung (1849-1850) ; Žmigra en 1851 aux ƒtats-Unis, fit la guerre
civile aux c™tŽs des Nordistes comme colonel ; fut l'un des premiers propagateurs
du marxisme aux ƒtats-Unis ; il Žtait lui-mme extraordinairement familier
avec la thŽorie marxiste ; resta toujours l'ami et le compagnon de lutte
de Marx-Engels.
WEYLL
BartholomŽe : juriste de Cologne ; en 1848, membre de la SociŽtŽ
dŽmocratique et du ComitŽ de sŽcuritŽ de Cologne ; participa au second
congrs des dŽmocrates ˆ Berlin.
WHEELER
George : ŽlŽment marquant du mouvement ouvrier anglais ; participa ˆ
l'assemblŽe inaugurale de l'A.I.T. ; membre du Conseil gŽnŽral
(1864-1867), dont il fut le trŽsorier (1864-1865, 1865-1868) ; participa ˆ
la confŽrence de Londres (1865), membre du comitŽ exŽcutif de la Reform
League.
WIEDE
Franz : journaliste, directeur et rŽdacteur de la revue Die Neue
Gesellschaft ˆ Zurich ; collaborateur de la Zukunft.
WILLIAMS Charles
Owen : stucateur ; syndicaliste anglais, membre du Conseil gŽnŽral de
l'A.I.T. (1868-1869).
WILLICH August,
1810-1878 : lieutenant prussien, quitta l'armŽe ˆ cause de ses convictions
politiques ; membre de la Ligue des communistes ; en 1849, chef d'un corps-franc durant le soulvement de Bade et du
Palatinat ; prit la tte, avec Schapper, de la fraction scissionniste de
la Ligue des communistes en 1850 ; en 1853,
Žmigra aux ƒtats-Unis ; devint gŽnŽral des Nordistes durant la guerre
civile (1861-1865).
WILSON John
Havelock, 1858-1929 : syndicaliste, organisateur et secrŽtaire du syndicat
des marins et des mŽcaniciens ˆ partir de 1887 ; dŽputŽ aprs 1892,
dŽfendit une politique de collaboration avec la bourgeoisie, social-chauvin
durant la Premire Guerre mondiale.
WISCHNEWETZSKY
Florence : cf. Kelley-Wischnewetzsky.
WOLF(F)
Ferdinand, 1812-1895 : journaliste, membre de la Ligue des
communistes ; de 1848 ˆ 1849, l'un des
rŽdacteurs de La Nouvelle Gazette rhŽnane ;
Žmigra ensuite ˆ Paris, puis ˆ Londres ; prit parti pour Marx-Engels lors
de la scission de 1850 ; se retira plus tard de la vie politique.
WOLFF
Luigi : major italien, partisan de Mazzini ; membre de l'Associazione
di Mutuo Progresso, une organisation d'ouvriers italiens
ˆ Londres ; participa ˆ l'assemblŽe inaugurale de l'A.I.T. en 1864, et fut
Žlu au Conseil central de l'A. I. T (1864-1865) ; dŽlŽguŽ ˆ la confŽrence
de Londres (1865) ; en 1871, dŽmasquŽ comme agent de la police
bonapartiste.
WOLFF Wilhelm (Lupus), 1809-1864 : instituteur, fils d'un petit paysan silŽsien
libre ; ds 1831 politiquement actif dans les associations radicales
d'Žtudiants ; emprisonnŽ de 1834 ˆ 1836 dans les ge™les prussiennes en
raison de cette activitŽ ; Žmigra ˆ Bruxelles au printemps 1846, et devint
l'un des premiers compagnons de lutte et familier de Marx-Engels ; anima
en 1846 le comitŽ de correspondance communiste de Bruxelles ; membre de la
Ligue des Justes, participa ˆ la fondation de la
Ligue des communistes, et fit partie du Conseil
central ˆ partir de mars 1848 ; de 1848 ˆ 1849, l'un des rŽdacteurs les
plus marquants de La Nouvelle Gazette rhŽnane ;
dŽputŽ ˆ l'AssemblŽe nationale de Francfort (extrme-gauche) ; Žmigra en
juillet 1849 en Suisse, et en 1851 en Angleterre ; resta jusqu'ˆ la fin de
sa vie en contact le plus Žtroit avec Marx-Engels, dont il partagea aussi bien
les conceptions que les activitŽs. Marx lui a dŽdiŽ Le Capital.
WOODHULL
Victoria, 1838-1927 : journaliste et militante fŽministe ; elle dirigea
la section 12 de l'A.I.T. de New York qui fut suspendue par dŽcision du congrs
de La Haye.
ZASSOULITCH VŽra
Ivanovna, 1851-1919 rŽvolutionnaire russe, membre actif du mouvement populiste,
puis du mouvement social-dŽmocrate russe ; participa ˆ la fondation du
groupe LibŽration du Travail ; en exil ˆ
Genve ; rŽdactrice de l'Iskra ;
traduisit diffŽrents ouvrages de Marx en russe ; se joignit aux
mencheviks.
___________________________
Nous nÕavons pas
reproduit ici lÕindex analytique des idŽes que lÕon retrouve ˆ la fin du tome
IV, allant des pages 145 ˆ 172. JMT.
Fin du texte
[1] Cette longue citation montre combien il est vain d'essayer de retracer de manire complte et dŽfinitive l'activitŽ de parti de Marx-Engels. Cette dernire partie, qui embrasse une pŽriode et un champ d'action immenses, mŽriterait Žvidemment des dŽveloppements autrement plus amples que ceux que nous pouvons leur donner ici. Quoi qu'il en soit, notre but premier est de fournir une vision d'ensemble. Cette partie surtout montre ce qui distingue un recueil de l'exposŽ dŽtaillŽ.
Dans la partie suivante de ce recueil, nous trouvons les textes qui, ˆ partir de l'analyse Žconomique et historique du terrain sur lequel Žvoluent les diffŽrents partis d'Europe et d'AmŽrique, dŽfinissent la tactique ˆ adopter par les partis des pays dŽveloppŽs aussi bien qu'arriŽrŽs dans la stratŽgie internationale du prolŽtariat international avec la perspective du but gŽnŽral du socialisme.
Ces textes frappent en ce qu'ils dŽmontrent combien Marx-Engels relient indissolublement parti et conditions matŽrielles de la sociŽtŽ concrte, en tournant le dos ˆ toute conception absolue, hŽgŽlienne, du parti, qui sŽpare les conditions matŽrielles des conditions subjectives de l'Žmancipation du prolŽtariat, en faisant du parti une chose en soi, dŽterminŽe par elle-mme, par en haut, comme dans le stalinisme par exemple.
[2] Cf. Engels ˆ Ion Nadejde, 4 janvier 1888.
Pour la formation du parti dans un pays, le premier pas ‑ essentiel ‑ est l'adoption du programme thŽorique de base qui relie les forces organisŽes nouvelles avec les rŽvolutionnaires du monde entier, ainsi qu'avec la lutte historique du prolŽtariat de tous les pays, en coordonnant les efforts de tous vers un mme but, dans un plan stratŽgique commun, par-delˆ les conditions temporelles et locales contingentes.
Le programme thŽorique n'est rien sans sa coordination rigoureuse avec l'action pratique de chaque section rŽvolutionnaire des diffŽrents pays. Comme l'explique Engels, c'est une certaine maturation des conditions Žconomiques et sociales qui permet aussi une telle coordination programmatique de l'action politique. Le facteur volontaire d'organisation des forces rŽvolutionnaires implique toujours une base matŽrielle qui dŽtermine les possibilitŽs d'action. D'o l'importance de l'analyse scientifique du cadre Žconomique et social de la pratique rŽvolutionnaire.
[3] Aprs la Ire Internationale, Engels ne parle pas de partis organisŽs par nations ou groupŽs en une Internationale, mais tout simplement du parti europŽen.
[4] Dans le brouillon, le passage suivant est barrŽ : Ç [...] de la Russie, de l'Autriche et de la Prusse sous la souverainetŽ du tsarisme russe et ˆ son profit particulier. Cette alliance continue de subsister, mme aux temps des conflits, qui ne sont que des chamailleries de famille. Elle subsistera mme aux cas o une guerre surviendrait entre les alliŽs, car cette guerre aurait pour but de mettre de nouveau au pas la Prusse ou l'obstinŽe Autriche. Cette alliance Žtant formŽe, il en dŽcoule l'hŽgŽmonie de la Russie sur les deux autres puissances, du simple fait de la prŽpondŽrance militaire russe. Or, cette position a ŽtŽ considŽrablement renforcŽe depuis que, dans sa dŽmence, Bismarck s'est emparŽ de l'Alsace-Lorraine, poussant ainsi la France dans les bras de la Russie donc au service du tsar, ds que la Prusse osera bouger. Qui plus est, la Russie ne peut tre attaquŽe qu'ˆ partir de la Pologne, c'est dire qu'elle est pratiquement inexpugnable pour ses deux autres partenaires, ˆ moins que ceux-ci ne se risquent dans une guerre qui leur crŽera des difficultŽs ˆ eux-mmes. Pour toutes ces raisons, la Russie est, aujourd'hui comme en 1815, le noyau de la Sainte-Alliance, la grande rŽserve de la rŽaction europŽenne. È
[5] Dans le brouillon, la phrase se poursuivait : Ç [.. ] et notre parti ouvrier marchera ˆ pas de gŽant vers la rŽvolution. È
[6] Le rglement organique de 1831 dŽtermina l'ordre devant rŽgner dans les PrincipautŽs danubiennes, aprs leur occupation par les troupes russes lors de la guerre russo-turque de 1828-1829. Le pouvoir lŽgislatif revint ˆ une chambre Žlue par les propriŽtaires fonciers, et l'exŽcutif ˆ des reprŽsentants nommŽs ˆ vie par les propriŽtaires fonciers, le clergŽ et les notables des villes. L'ensemble du systme Žtait fondŽ sur le servage des paysans. Ceux-ci se soulevrent aussit™t. Les boyards firent appel aux troupes russes et turques en 1848 : la Russie et la Turquie s'assurrent, par le traitŽ de Balta-Liman du 1er mai 1849, le droit d'intervenir directement dans les PrincipautŽs danubiennes durant sept ans pour en Žliminer toute menace rŽvolutionnaire.
Le traitŽ de Bucarest (28 mai 1812) attribua la Bessarabie ˆ la Russie. Une partie de la Bessarabie fut donnŽe ˆ la Turquie, aprs la guerre de CrimŽe, et en 1878 cette partie retourna ˆ la Russie, lors du traitŽ de Berlin.
[7] Cette phrase manque dans le brouillon.
[8] Engels ˆ VŽra Zassoulitch, 23 avril 1885.
Il s'agit manifestement de l'organisation marxiste russe Osvobojedenie Tronda, crŽŽe ˆ Genve en septembre 1883 par un groupe d'ŽmigrŽs russes, anciens populistes rŽvolutionnaires. Ce groupe, dirigŽ essentiellement par PlŽkhanov et Zassoulitch, rompit dŽfinitivement avec le populisme et se fixa pour tache la diffusion du marxisme en vue de rŽsoudre les questions essentielles pour les travailleurs en Russie. Cette organisation reprŽsenta, en effet, un premier pas dans la rŽvolution russe future.
[9] Des membres du groupe Narodnia Volia (VolontŽ populaire) entreprirent ce jour-lˆ un attentat contre le tsar Alexandre II.
[10] Dans le brouillon, Engels avait complŽtŽ cette phrase comme suit : Ç Je ne dis pas en Russie, car en province, loin du centre gouvernemental, on ne saurait exŽcuter un tel coup de main. È
[11] Dans les Vorlesungen Ÿber die Geschichte der Philosophie, Hegel fait la remarque suivante en liaison avec son interprŽtation de l' Ç ironie socratique È : Ç Toute dialectique fait ressortir ce qui doit ressortir, comme devant ressortir, laisse se dŽvelopper toute seule la destruction interne : ironie gŽnŽrale du monde. È
[12] Dans le brouillon, Engels avait ajoutŽ : Ç Peut-tre en sera-t-il ainsi pour nous tous. È
[13] La situation ayant mžri considŽrablement de 1885 ˆ 1917, on ne saurait sans forcer la pensŽe d'Engels en dŽduire que l'action du parti bolchevique de LŽnine devait nŽcessairement tre de type blanquiste. Cf. ˆ ce propos L. TROTSKY, Terrorisme et Communisme, 10/18 p. 35-45, sur Ç Le rapport des forces È.
[14] Dans le brouillon, Engels avait ajoutŽ : Ç [...] par une clique de nobles ou de spŽculateurs en Bourse, qu'ils soient les bienvenus jusqu'ˆ [...] È
[15] Dans la prŽface du Manifeste (Ždition russe de 1882), Marx-Engels relient la rŽvolution russe ˆ
la rŽvolution prolŽtarienne des pays dŽveloppŽs d'Europe : Ç Si la
rŽvolution russe donne le signal d'une rŽvolution prolŽtarienne en occident, et
que toutes deux se compltent, l'actuelle propriŽtŽ collective de Russie pourra
servir de point de dŽpart pour une Žvolution communiste. È
Ils
relient ainsi la rŽvolution (double : antifŽodale puis socialiste) des
pays non dŽveloppŽs du point de vue capitaliste ˆ la rŽvolution directement
socialiste des pays dŽveloppŽs, en une stratŽgie unique, internationale, du
prolŽtariat mondial.
Le Congrs de Bakou de la IIIe Internationale reprit fidlement ce schŽma classique de la stratŽgie de lutte marxiste : cf. Manifestes, thses et rŽsolutions des quatre premiers congrs mondiaux de l'Internationale communiste, 1919‑1923, textes complets, Bibliothque communiste, rŽimpression en fac-similŽ, Maspero, 1969. Ce recueil renferme, en outre, toutes les thses sur la nature, les t‰ches et le r™le du parti dans la perspective strictement marxiste pour l'Žpoque moderne. Il complte en ce sens le prŽsent recueil de Marx-Engels.
[16] Cf. Engels ˆ Karl Kautsky. Londres, 7-15 fŽvrier 1882.
[17] Engels se rŽfre ˆ l'ouvrage paru anonymement et intitulŽ Berlin und St-Petersburg ‑ Preussische BeitrŠge zur Geschichte der Russisch-Deutschen Beziehungen, Leipzig, 1880, dont la seconde annexe Žtait consacrŽe au soulvement polonais de 1863-1864.
[18] Brouillon de la lettre
du 18 dŽcembre 1889 envoyŽe par Engels ˆ Gerson Trier.
Engels fait allusion ˆ la dŽcision du comitŽ directeur du parti danois d'exclure la fraction rŽvolutionnaire. Celle-ci crŽa sa propre organisation, sans rŽussir cependant ˆ s'imposer durablement. La fraction rŽvolutionnaire, sous la direction de Gerson Trier et de Nicolas Petersens, avait engagŽ la lutte contre l'aile rŽformiste du Parti ouvrier social-dŽmocrate du Danemark, fondŽ en 1876. Les rŽvolutionnaires se grouprent autour du journal Arbejderen et luttrent contre le rŽformisme et pour la formation d'un vŽritable parti de classe prolŽtarien.
[19] Dans cet article, Engels Žtablit la distinction entre tactique directe, frontale, ˆ suivre par le parti dans les pays de capitalisme dŽveloppŽ, et tactique indirecte, d'alliances possible avec les partis bourgeois ou petits-bourgeois encore progressistes dans les pays non encore dŽveloppŽs.
[20] Engels se rŽfre au Parti du progrs bourgeois de tendance libŽrale de gauche, fondŽ en 1861, en vue d'unifier l'Allemagne sous direction prussienne. Son aile droite se constitua en 1866, aprs la victoire de la Prusse sur l'Autriche, en Parti national-libŽral qui soutint dŽsormais Bismarck sur toutes les questions importantes. L'autre aile petite-bourgeoise dŽfendit essentiellement les intŽrts de la bourgeoisie marchande, des petites entreprises et de la petite bourgeoisie urbaine : elle fut battue sur tous les points dŽcisifs. Aprs 1871, par crainte des social-dŽmocrates, elle tempŽra son opposition au rŽgime de Bismarck et finit par fusionner avec l'aile gauche du Parti national-libŽral en 1884 pour former le Parti des libres-penseurs allemands.
[21] Venstre (Gauche) : parti dŽmocrate petit-bourgeois au Danemark, fondŽ en 1870.
[22] Allusion au conflit d'ordre constitutionnel, surgi au Danemark en 1875 entre la Gauche petite-bourgeoise, qui dŽtenait la majoritŽ au Parlement, et le Parti national-libŽral qui Žtait au gouvernement. En reprŽsailles, la Gauche refusa de voter le budget, de sorte que le gouvernement usa de mŽthodes de moins en moins dŽmocratiques et parlementaires pour se procurer les moyens budgŽtaires. La situation sociale se tendit de plus en plus, et les paysans se rŽvoltrent. Ne jurant que par les mŽthodes des parlementaires, la Gauche fut doublement stŽrile, les paysans furent durement rŽprimŽs, et le gouvernement fit ce qui lui plaisait.
[23] Allusion au courant du chartisme favorable ˆ l'utilisation de moyens rŽvolutionnaires de lutte violente, en opposition aux partisans du courant qui revendiquait les moyens pacifiques, appelŽs Ç moyens de violence morale È. Les dirigeants les plus marquants de l'aile rŽvolutionnaire furent Feargus O'Connor, George Harney, Ernest Jones.
[24] Engels fait allusion aux conflits survenus dans le comitŽ exŽcutif du Parti ouvrier socialiste d'AmŽrique du Nord en septembre 1889. Le parti se divisa et chaque fraction tint son propre congrs, lÕun ˆ Chicago fin septembre et l'autre le 12 octobre.
[25] Cf. Engels ˆ Hermann SchlŸter, Londres, 30 mars 1892.
[26] Cf. Engels ˆ Florence Kelley-Wischnewetzsky, 3 juin 1886.
Dans les extraits suivants, Engels parle du danger petit-bourgeois, mais ˆ propos du mouvement ouvrier amŽricain. Ici encore, c'est la possibilitŽ matŽrielle de devenir ou de redevenir petit-bourgeois, producteur et trafiquant ˆ son propre compte, qui empche la formation d'un parti de classe, donc d'un prolŽtariat conscient, organisŽ, rŽvolutionnaire. Les circonstances sont foncirement opposŽes ˆ celles de l'Allemagne, mais l'obstacle, l'adversaire ˆ vaincre, est le mme : les rapports petits-bourgeois existant matŽriellement et intellectuellement. La corruption ultŽrieure du mouvement ouvrier consistera ˆ maintenir vivace cet esprit bornŽ sur la base dŽsormais capitaliste : participation aux miettes du festin colonialiste ou aux surprofits impŽrialistes, notamment aux pŽriodes de prospŽritŽ du cycle industriel gŽnŽral.
[27] Cf. Engels ˆ Eduard Bernstein, 22 mai 1886.
[28] Au printemps 1886, les ouvriers amŽricains avaient lancŽ un grand mouvement en vue d'obtenir la journŽe de travail de huit heures. Le point culminant en fut la grve gŽnŽrale de plusieurs jours, commencŽe le 1er mai, dŽclenchŽe par 350 000 ouvriers des quatre coins du pays. Environ 200 000 obtinrent une rŽduction de la journŽe de travail. Ë Chicago, la police tira sur les manifestants le 3 mai, en utilisant comme prŽtexte le fait qu'une bombe avait ŽtŽ lancŽe dans un groupe de policiers. Plusieurs centaines d'ouvriers furent arrtŽs, la plupart des dirigeants ouvriers de Chicago. Tra”nŽs devant les tribunaux, ils furent condamnŽs ˆ des peines sŽvres, et quatre d'entre eux furent exŽcutŽs en novembre 1887. En souvenir de ces ŽvŽnements de Chicago, le congrs de l'Internationale socialiste dŽcida en 1889 de faire du 1er Mai la fte du Travail dans tous les pays.
[29] Dans la dialectique entre mouvement Žconomique ‑ syndicats, coopŽratives, gestion ouvrire ‑ et mouvement politique, Engels recherche ici le point d'Žquilibre le plus favorable ˆ l'Žvolution de la conscience rŽvolutionnaire du prolŽtariat. Il ne s'agit pas de nier l'un ou l'autre facteur ‑ Žconomique ou politique ‑mais de les relier solidement l'un ˆ l'autre, afin qu'aucun d'eux ne se fige et mobilise l'activitŽ ouvrire dans un sens unique : Ç Si les syndicats sont indispensables dans la guerre d'escarmouches du travail et du capital, ils sont encore plus importants comme force organisŽe pour supprimer et remplacer le systme du travail salariŽ. È (Cf. MARX-ENGELS, Le Syndicalisme, Maspero, t. I, p. 69.)
[30] Cf. Engels ˆ F. A. Sorge, 10 novembre 1894.
Le pays le plus avancŽ dŽsignant aux autres leur Žvolution ultŽrieure, le marxisme a prŽvu la faiblesse successive du mouvement amŽricain qui suivit l'Žvolution anglaise, lorsque les ƒtats-Unis, au dŽbut de ce sicle, ravirent ˆ l'Angleterre la suprŽmatie sur le marchŽ mondial et dans la production capitaliste en gŽnŽral.
LÕanalyse des conditions du mouvement anglais par Marx-Engels a donc un intŽrt non seulement pour les pays les plus avancŽs et la position de l'aristocratie ouvrire blanche, mais encore pour les pŽriodes modernes de recul du mouvement communiste et de triomphe de la contre-rŽvolution.
Aprs avoir montrŽ que l'instinct rŽvolutionnaire des masses est liŽ aux changements survenus dans la base matŽrielle de la production, notamment de la grande industrie, Engels esquisse ensuite la dŽmarche par laquelle on passe de ce stade ŽlŽmentaire de la conscience de classe ˆ un stade supŽrieur de son organisation, en mme temps qu'il dŽnonce tous les piges et obstacles sur cette voie.
[31] Le Socialist Labor Party of North America fut crŽŽ en 1876 au Congrs d'unification de Philadelphie par la conjonction des ŽlŽments marxistes de la Ire Internationale sous la direction de Sorge et de Weydemeyer, et des lassallŽens du Labor Party de l'Illinois et du Social Democratic Party. Le programme en fut, en gros, celui de la Ire Internationale, mais tout de suite les dissensions commencrent avec les lassallŽens qui contr™lrent le parti ds 1877, en condamnant le travail syndical et en orientant les ouvriers exclusivement vers la participation aux Žlections. Ce parti Žtait composŽ essentiellement d'ŽmigrŽs allemands qui avaient peu de contact avec les masses, d'o leur particularisme.
[32] Cf. Engels ˆ Karl Kautsky, 3 janvier 1895.
[33] Cf. Engels ˆ John Lincoln Mahon, 23 janvier 1887.
John Lincoln Mahon ainsi que diffŽrents dirigeants de la Socialist League fondrent en avril 1887 la North of England Socialist Federation dans le prolongement de la grande grve des mineurs de janvier ˆ mai 1887. Le plan de Mahon consistait ˆ unifier de telles organisations socialistes locales sur la base d'une plate-forme commune, ˆ l'occasion d'un congrs. Mahon voulait prŽparer ce congrs par une large agitation socialiste, que lui-mme dirigerait en ƒcosse et Donald dans le nord de l'Angleterre. Il demandait ˆ Engels d'apporter son appui actif ˆ ce projet.
[34] Comme Engels le suggre pour l'AmŽrique, le moyen le plus efficace pour gagner le prolŽtariat au socialisme, c'est de relier son mouvement et ses revendications Žconomiques au mouvement et aux mots d'ordre politiques, en l'occurrence en gagnant les syndicats ˆ la lutte pour l'abolition du salariat, c'est-ˆ-dire lÕŽlimination du mercantilisme et des rapports sociaux capital-salariat.
[35] Cf. Engels ˆ John Lincoln Mahon, 26 juillet 1887.
Le 21 juillet, Mahon avait Žcrit ˆ Engels qu'il refusait de collaborer dŽsormais avec Edward Aveling, n'ayant plus confiance en lui. Mais il ne dit mot sur les motifs de son attitude.
[36] Cf. Engels ˆ Kautsky , le 4 septembre 1892.
Les Žlections lŽgislatives anglaises de l'ŽtŽ 1892 s'achevrent par la victoire des LibŽraux. Trois candidats ouvriers furent Žlus : James Keir Hardie, John Burns et John Havelock Wilson.
[37] Edward Aveling et sa compagne, Eleanor Marx, avaient Žcrit un article sur Les Elections en Grande-Bretagne. Kautsky en avait ŽliminŽ tous les passages attaquant le sectarisme et l'opportunisme de la FŽdŽration social-dŽmocrate et de la SociŽtŽ fabienne. Dans sa lettre du 8 aožt 1892 a Engels, Kautsky prŽtendit que l'article Žtait arrivŽ en son absence et qu'il avait dž, au dernier moment, raccourcir l'article pour le faire entrer dans la revue.
[38] Dans sa lettre ˆ Bebel du 14- aožt 1892, Engels Žcrivait ˆ ce propos : Ç Les passages ci-inclus de l'article des Aveling dans la Neue Zeit ont ŽtŽ refusŽs par Kautsky. Celui-ci m'Žcrit qu'il a dž le faire pour des raisons techniques. Cela est possible, mais il partage sans doute aussi le respect bizarre de Bernstein pour les Fabians et l'intŽrt de Bax (qui est ˆ Zurich) pour la FŽdŽration social-dŽmocrate. En tout cas, les passages tÕintŽresseront : ils forment un ŽlŽment indispensable ˆ une vision d'ensemble. È
[39] Effectivement, dans les pays dŽveloppŽs, le capitalisme d'ƒtat (ce que les faux socialistes appellent le Ç socialisme d'ƒtat È) se manifeste de nos jours en grande partie au travers de la fiscalitŽ qui rgle, au moyen des taxes, avantageuses en un sens et prohibitives en un autre, l'exportation par exemple et, partant, une grande partie de la production, sans parler de la production intŽrieure, en grevant la consommation, par exemple, ou en favorisant telle branche ou telles entreprises (grandes, moyennes ou petites voire l'industrie ou l'agriculture).
[40] Dans la sŽrie d'articles sur La Doctrine sociale de l'anarchisme de Bernstein, le troisime Žtait intitulŽ Ç Proudhon et le mutualisme È (cf. Neue Zeit, 1831-1892, È Nos 45-47).
[41] Cf. Engels ˆ A. Bebel,
24 janvier 1893.
Engels fait allusion au Parti travailliste indŽpendant (Independent Labour Party), fondŽ en janvier 1893 ˆ la ConfŽrence de Bradford par la conjonction de divers courants venu des anciens et nouveaux syndicats, de la SociŽtŽ fabienne et de la FŽdŽration social-dŽmocrate.
[42] Engels fait allusion ˆ la chute du cabinet Gladstone provoquŽe par le vote commun des parlementaires irlandais, sous la direction de Charles Stewart Parnell, et des conservateurs. Les libŽraux sentirent que leur sort dŽpendait ds lors des parlementaires irlandais. Lorsque Gladstone revint au pouvoir en 1886, il fit adopter deux lois en faveur de l'Irlande : le Home Rule Bill et la loi sur lÕagriculture irlandaise. Les deux nouveaux projets de loi de Gladstone en 1893 sur le Home Rule Bill ne furent jamais adoptŽs.
[43] Henry Hyde Champion, journaliste, membre de la FŽdŽration social-dŽmocrate, dirigeant de l'Association Žlectorale travailliste des syndicats de Londres et directeur du Labour Elector, entretint durant toute une pŽriode des contacts secrets avec les Conservateurs.
[44] Cf. Engels ˆ A. Bebel, 9 fŽvrier 1893.
[45] Les radicaux-libŽraux formaient un courant au sein du parti libŽral et reprŽsentaient essentiellement la bourgeoisie industrielle. Par le truchement des radicaux qui ne formrent jamais un groupe organisŽ au Parlement, le parti libŽral rŽussit ˆ influencer les syndicats.
[46] Cf. Engels ˆ F. A. Sorge, 10 novembre 1894.
[47] Les Conservateurs obtinrent la majoritŽ en 1895, mais les candidats du Parti travailliste indŽpendant, parmi lesquels Reir Hardie, ne furent pas Žlus.
[48] Cf. Engels ˆ Johann Philipp Becker, Londres, 10 fŽvrier 1882.
[49] Engels fait allusion ˆ G. Shipton. Cf. infra, la correspondance d'Engels avec ce dernier.
[50] Cf. Engels ˆ F. A. Sorge, 8 juin 1889.
La position d'Engels ˆ propos de la crŽation de la nouvelle Internationale ne s'explique qu'en fonction de la conception matŽrialiste gŽnŽrale, qui n'a rien ˆ voir avec le fanatisme de la Ç condition subjective È, ni de la condition absolue (que Staline lui-mme a d'ailleurs reniŽe, en dissolvant la IIIe Internationale) sous la pression des rŽalitŽs matŽrielles (en Žchange du prt et bail de son alliŽ amŽricain au cours de la dernire guerre impŽrialiste).
[51] Engels ˆ F. A. Sorge, 7 octobre 1893.
Engels analyse dans ces passages le processus de formation de la conscience de classe et du parti, ˆ partir des couches profondes du prolŽtariat. Il vaut de noter que, mme en Allemagne o le parti Žtait le mieux organisŽ du monde ˆ cette Žpoque, les masses Žtaient en avance sur l'organisation, ou plus exactement l'organisation n'Žtait pas ˆ la hauteur de ses t‰ches.
Le processus de formation du parti n'est donc pas rectiligne, en fonction directe des masses prolŽtariennes. En Allemagne, de 1919 ˆ 1930, on a encore constatŽ que les masses ont manifestŽ une combativitŽ et un esprit rŽvolutionnaire exceptionnels, en retournant sans cesse au combat, taudis que la direction du parti et notamment de l'Internationale accumulait erreur sur erreur, et manquait finalement ˆ sa mission.
De fait, les masses manifestent le plus directement les contradictions de l'appareil Žconomique et politique gŽnŽral du capitalisme, et donc les bouleversements et crises de celui-ci.
Nous abordons avec ces textes l'une des questions fondamentales du marxisme, la question agraire. Elle se relie ici ˆ la question de la petite bourgeoisie, c'est-ˆ-dire aux rapports du parti prolŽtarien avec les partis petits-bourgeois et paysans, ˆ l'influence de l'idŽologie petite-bourgeoise au sein de la `classe ouvrire (la corruption ne pouvant s'effectuer par l'idŽologie proprement bourgeoise).
Le lien entre question agraire et influences petites-bourgeoises ne s'effectue pas au travers d'un simple processus idŽologique, mais par l'existence de conditions matŽrielles qui peuvent tre trs diverses, peu dŽveloppŽes, prŽcapitalistes dans un cas, dŽveloppŽes et archi-capitalistes ans un autre (comme on l'a vu dans le cas de l'AmŽrique). En ce qui concerne la critique d'Engels du programme agraire des partis franais et allemands, Cf. ENGELS, La Question paysanne en France et en Allemagne (1894), Žd. sociales, 1956.
[52] Cf. Engels ˆ Karl Kautsky, 1er juin 1893.
[53] Cf. Engels ˆ Paul Sumpf, 3 janvier 1895.
[54] Engels fait allusion au conflit au sein de la social-dŽmocratie allemande ˆ propos de la question agraire : en 1869-1870, les reprŽsentants du Parti populaire tentrent d'obtenir que le parti d'Eisenach rejette la rŽsolution du Congrs de B‰le de Internationale sur la nationalisation de la terre. Le Congrs de Stuttgart (1870) repoussa catŽgoriquement cette tentative.
[55] Lettre d'Engels ˆ Wilhelm Liebknecht, 24 octobre 1894. La lettre ˆ Bebel, ˆ laquelle Engels fait allusion, a ŽtŽ perdue comme tant d'autres.
[56] Dans une rŽunion dans la seconde circonscription berlinoise, le 14 novembre 1894, August Bebel critiqua dans une longue intervention, la position opportuniste prise par Georg von Vollmar et d'autres social-dŽmocrates bavarois, lors du congrs du parti tenu ˆ Francfort. Vollmar y avait dŽfendu la pŽrennitŽ de la petite propriŽtŽ paysanne et proposŽ des mesures pour sa sauvegarde gr‰ce ˆ une collaboration entre l'ƒtat existant et la social-dŽmocratie. La majoritŽ du congrs se laissa surprendre dans cette question prŽtendument technique. Le discours de Bebel fut publiŽ dans VorwŠrts du 16 octobre 1894 et la Critica sociale du 1er dŽcembre 1894.
[57] Engels explique ici, de manire trs simple et lumineuse, la nŽcessitŽ, mais aussi la relativitŽ parfaite, de la nŽgation de certains faits survenant ˆ l'intŽrieur du parti.
[58] Lors du second congrs de la social-dŽmocratie bavaroise du 30 septembre 1894 ˆ Munich, l'ordre du jour porta sur l'activitŽ des parlementaires social-dŽmocrates ˆ la Dite bavaroise et l'agitation parmi les paysans (les petites parcelles prŽdominent dans les rŽgions de montagne). Vollmar rŽussit ˆ rallier une majoritŽ ˆ ses idŽes. Le congrs approuva la ratification du budget d'ƒtat par la fraction parlementaire social-dŽmocrate. Il entŽrina une rŽsolution en vue de crŽer une organisation plus stricte des social-dŽmocrates bavarois sous la direction centrale de leurs reprŽsentants ˆ la Dite (c'est-ˆ-dire de parlementaires dŽsignŽs par un systme dŽmocratique-bourgeois et par des Žlecteurs et citoyens qui ne sont pas du parti !). Vollmar tentait par ce moyen de se crŽer un bastion pour sa politique opportuniste.
[59] Sobriquet de Karl Grillenberger.
[60] Au Congrs de Francfort, Vollmar avait soulignŽ la spŽcificitŽ des Ç conditions bavaroises È et Ç la manire d'tre bavaroise È en s'opposant aux camarades du Ç nord de l'Allemagne È et en ironisant sur Ç l'esprit caporaliste de la Vieille-Prusse È, etc.
[61] Dans l'article du 23 novembre 1894 la rŽdaction du VorwŠrts Žcrivait qu'elle Žtait en Ç opposition diamŽtrale È avec l'intervention de Bebel dans la deuxime circonscription de Berlin. Le 24 la rŽdaction revint pratiquement sur sa dŽclaration, en Žcrivant qu'elle n'en voulait qu'ˆ Ç la position pessimiste de Bebel sur tout le dŽroulement des dŽbats et le bas niveau intellectuel du Congrs È (sic), mais que Liebknecht Žtait Ç du mme avis que Bebel depuis un quart de sicle È sur la question agraire, et qu'ils avaient mme rŽdigŽ et signŽ en commun la rŽsolution sur la tactique ˆ adopter par les reprŽsentants parlementaires.
[62] Engels ne fait absolument aucun cas de ce que l'on appellera plus tard le monolithisme de l'organisation. Le programme thŽorique est essentiel et passe en premier quoi qu'en pensent 999 prŽtendus marxistes sur 1 000 pour qui la thŽorie n'est qu'une affaire contingente, sans force d'obligation. Pourtant, c'est lui, et non l'organisation formelle du parti, qui a raison ‑ et sans hŽsitation aucune pour Marx-Engels ‑ lorsqu'il y a conflit entre les deux. La seule question qui se pose, c'est la gravitŽ du conflit : lˆ encore c'est la thŽorie (le programme) qui dŽcide, en dernier ressort, s'il s'agit de la violation d'un principe ou non.
[63] Texte Žtabli d'aprs une copie dactylographiŽe.
[64] Cf. Engels ˆ F. A. Sorge, 4 dŽcembre 1894.
Le discours de Bebel avait soulevŽ, comme Engels l'avait prŽvu, une violente polŽmique qui agita le parti et le fit se pencher sur la question agraire. Grillenberger et Vollmar rŽpondirent par plusieurs articles dans la presse centrale aussi bien que locale. Bebel rŽpondit, ˆ son tour, par une sŽrie de quatre articles qui parurent du 28 novembre au 1er dŽcembre 1894 dans le VorwŠrts.
[65] Allusion d'Engels au second congrs de la social-dŽmocratie bavaroise, tenu ˆ Munich le 30 septembre 1894, o Vollmar et Grillenberger rŽussirent ˆ faire passer leurs vues.
[66] Cf. Engels ˆ F. A. Sorge, 12 dŽcembre 1894.
[67] Lors du prŽtendu Ç cours nouveau È du gouvernement Caprivi, successeur de Bismarck, Vollmar en profita pour suggŽrer une tactique de collaboration avec le gouvernement, sur le plan intŽrieur et extŽrieur, notamment en cas de guerre avec la Russie. Ses propositions tendaient, plus ou moins ouvertement, au rŽformisme qui s'Žtala au grand jour aprs la mort d'Engels. Ë ce moment, cependant, Vollmar n'eut que l'approbation de la presse bourgeoise, le parti le critiqua sŽvrement, et le Congrs d'Erfurt condamna ses positions.
[68] Engels fait allusion ˆ la polŽmique du VorwŠrts contre l'article de Vollmar publiŽ dans la Revue bleue parisienne de juin 1892 o il avait affirmŽ que le Congrs d'Erfurt s'Žtait rapprochŽ sur un certain nombre de points du socialisme d'ƒtat proclamŽ par Bismarck et Guillaume II. Le VorwŠrts rŽfuta les arguments de Vollmar dans ses articles des 6, 12, 21 et 22 juillet 1892.
[69] Engels fait allusion ˆ son article sur La Question paysanne en France et en Allemagne (cf. ƒd. sociales, Paris, 1956), qu'il rŽdigea pour rŽfuter l'opportunisme de Vollmar sur la question agraire lors du Congrs de Francfort. Vollmar avait utilisŽ ˆ ses fins les faiblesses du programme franais du Congrs de Nantes en prŽtendant que celui-ci avait reu l'approbation expresse dÕEngels.
[70] La seconde lettre a ŽtŽ perdue.
[71] Dans son discours, Liebknecht avait ŽvoquŽ le projet gouvernemental relatif aux modifications et adjonctions aux textes sur la rŽpression des dŽlits de presse. Ce projet prŽvoyait une peine de forteresse pour les incitations ˆ la sŽdition, mme lorsqu'elles n'Žtaient pas suivies d'effet. Le 11 mai 1895 le projet fut dŽfinitivement repoussŽ. En ce qui concerne l'insulte ˆ l'Empereur : dans la sŽance du Reichstag du 6 dŽcembre 1894, les membres de la fraction social-dŽmocrate Žtaient restŽs assis lorsque le prŽsident von Levetzow porta un vivat ˆ l'Empereur. Le 11 dŽcembre, le Chancelier zu Hohenlohe demanda que l'on engage‰t des poursuites contre Wilhelm Liebknecht. Cette proposition fut repoussŽe par 168 voix contre 58, le 15 dŽcembre.
[72] Cf. Engels ˆ W.
Liebknecht, 31 juillet 1877.
Les
textes ci-aprs traitent du rapport du parti avec la presse. Nous ne prŽtendons
pas en exposer la thŽorie, ni mme en donner une vision complte, puisque nous
ne rassemblons ici que quelques passages.
Il
appara”t ici que, face au parti formel, Marx-Engels n'entendent pas soumettre
le contenu de leur thŽorie ou de leur programme ˆ la ratification de la masse
ou des chefs du parti. Ë leurs yeux, la thŽorie et le programme dŽcoulent de
tout le mouvement de la sociŽtŽ vers le communisme, et ce n'est donc pas la
majoritŽ qui, dŽmocratiquement, les Žtablit ou les modifie ‑ pas plus
d'ailleurs que la direction du parti, voire les congrs. En se fondant, par exemple,
sur l'expŽrience malheureuse de la fusion avec les lassallŽens, Engels dŽmontrera
au contraire que tout compromis dans le programme fondamental aboutit ˆ des
crises et ˆ des maladies dans le parti. En outre, il s'en prendra aux
initiatives irrŽflŽchies et prŽcipitŽes qui rompent la continuitŽ de programme
et, d'action dans l'organisation et les masses prolŽtariennes.
Engels s'efforce naturellement de sauvegarder la presse de caractre Ç scientifique È, c'est-ˆ-dire thŽorique et programmatique, qui est l'expression du parti historique.
[73] Engels fait allusion aux dŽbats dŽgradants du Congrs de Gotha (1877) sur la question de savoir s'il fallait ou non que le parti continue la publication de l'Anti-DŸhring de Marx-Engels. Cf. aussi note 76. [Voir la 3e note plus loin. JMT.]
[74] Cf. Marx ˆ Wilhelm Blos, 10 octobre 1877.
W. Blos avait Žcrit ˆ Marx : Ç Je m'Žtonne que nos amis londoniens se fassent relativement peu entendre dans la presse, Žtant donnŽ qu'ils trouveraient d'ores et dŽjˆ chez les ouvriers allemands plus de sympathie que jamais, et que, gr‰ce ˆ notre agitation (sic), ils sont plus populaires qu'ils ne le savent sans doute. È
[75] Allusion ˆ la Ligue des communistes.
[76] Au Congrs de Gotha (27-29 mai 1877), certains dŽlŽguŽs cherchrent ˆ empcher la poursuite de la publication de l'Anti-DŸhring de Marx-Engels dans la presse du parti. Des dŽbats sordides s'ensuivirent sur les mŽrites particuliers de Marx-Engels : la Ç dette de reconnaissance du parti ˆ leur Žgard È, Ç le plus important travail scientifique produit au sein du parti È ,etc.
[77] Cf. Marx ˆ Engels, 18 juillet 1877.
[78] Dans ses lettres du 9 juillet 1877 rŽdigŽes en termes analogues, Franz Wiede avait demandŽ ˆ Marx et ˆ Engels de bien vouloir collaborer ˆ la revue Die Neue Gesellschuft, qui parut ˆ partir d'octobre ˆ Zurich. Ë ce propos, Marx dŽfinit l'idŽal ‑ irrŽalisable ‑ d'une revue Ç impartiale È, de caractre scientifique, et critique la tentative pratique de crŽation d'une telle revue, la Neue Gesellschaft.
[79] Cf. Engels ˆ Marx, 19 juillet 1877.
[80] Cf. la critique de ce courant dans la seconde partie de L'IdŽologie allemande.
[81] Cf. Engels ˆ Marx, 21
juillet 1877.
August Geib fit adopter le projet suivant au Congrs de Gotha de 1877 : Ç Le parti publiera une revue scientifique de format appropriŽ et paraissant deux fois par mois ˆ Berlin ˆ partir du 1er octobre. È La Zukunft, financŽe par Hšchberg, vit ainsi le jour comme organe thŽorique officiel du parti. Aux yeux de Marx, Ç ce premier rŽsultat de l'achat par un bourgeois de sa place dans le parti n'est pas heureux, comme c'Žtait prŽvisible È (ˆ Bracke, 23-10-1877).
[82] Cf. Engels ˆ K. Kautsky, 25 juin 1892. Engels fait allusion aux tractations menŽes par Kautsky avec l'Žditeur Dietz, en vue de la publication, en ouvrage sŽparŽ, des articles de F. A. Sorge dans la Neue Zeit sur le mouvement ouvrier amŽricain. L'Žditeur proposait que l'auteur Žlargisse quelque peu son texte afin de gagner un public plus vaste. L'affaire n'aboutit pas.
[83] Cf. Engels ˆ A. Bebel, 19 novembre 1892.
Ce congrs s'Žtait tenu du 14 au 21 novembre 1892 ˆ Berlin. La discussion porta sur les rapports de la centrale du parti et de la fraction parlementaire, sur la fte du Travail, le Congrs international de Zurich de 1893 l'utilisation du boycott et l'attitude vis-ˆ-vis du socialisme d'ƒtat. Le congrs repoussa, en outre, lÕidŽe d'un congrs international des syndicats, convoquŽ par l'aile ultra-conservatrice des syndicats anglais de Glasgow (Cf. MARX-ENGELS Le Syndicalisme, Maspero, vol. I, . 201-211), et dŽcida de participer au Congrs de Zurich de 1893. Enfin, il consacra une bonne place dans ses dŽbats ˆ la lutte contre le militarisme et la course aux armements. Les parlementaires social-dŽmocrates reurent lÕordre de voter contre les crŽdits militaires.
[84] Au cours des dŽbats du Congrs de Berlin, certains dŽlŽguŽs critiqurent le VorwŠrts. Le mŽcontentement suscitŽ par ce journal se manifesta ˆ propos d'une discussion sur le montant du traitement peru par Liebknecht, en tant que rŽdacteur en chef. Manifestement, Engels dŽfend un salaire dŽcent vis-ˆ-vis de ceux qui pr™nent un salaire minimum (de propagande pour le parti et de dŽmagogie vis-ˆ-vis des ouvriers et des foules). Cette thse est la plus rationnelle dans les limites du systme capitaliste, mais elle n'en demeure pas moins dŽlicate.
[85] Aprs avoir dŽfendu un salaire dŽcent pour ceux qui travaillaient ‑ dur sort ‑ pour le parti, Engels affirme que c'est une affaire personnelle que d'accepter un tel emploi, et que lui-mme et Marx ne l'eussent pas acceptŽ. Au reste, du point de vue thŽorique, Žtant donnŽ que Marx-Engels ont eu historiquement pour t‰che de critiquer les dŽviations du ou des partis formels (par exemple, le programme de Gotha et d'Erfurt) au nom du socialisme scientifique ou du parti historique, ils ne pouvaient Žvidemment occuper un poste de fonctionnaire rŽmunŽrŽ de ces partis : leur position de dŽfenseur du programme historique en ežt Žvidemment souffert. Les difficultŽs surviennent, comme l'indique Engels, lorsque l'organisation du parti dŽvie sur certains points, et que se pose le problme de la dŽfense du programme historique, soit d'une certaine opposition ou travail de fraction au sein du parti.
[86] En allemand, Engels utilise systŽmatiquement le terme Jebildete pour Gebildete, afin de donner un sens pŽjoratif ˆ ce terme.
[87] Le 22 novembre 1892, Bebel rŽpondit ˆ Engels : Ç On t'a informŽ de manire tout ˆ fait erronŽe ˆ propos de l'Žtatisation de la presse que tu Žvoques. Tous les journaux sans exception sont indŽpendants, mme ceux qui touchent de l'argent de notre parti. Nous n'avons jamais insistŽ pour nous mler dans leur direction, mme lˆ o c'ežt ŽtŽ nŽcessaire dans l'intŽrt du parti. È
[88] Cf. Engels ˆ Laura Lafargue, 17 janvier 1886.
[89] Cf. Engels ˆ A. Bebel, 8 mars 1892.
[90] Engels fait sans doute allusion aux passages du pamphlet de F. MEHRING, Capital et Presse ‑ Un Žpilogue au cas Lindau (1891), dans lesquels il explique les raisons de son tournant de 1876 qui s'Žtait rŽvŽlŽ au grand jour en, 1879, ˆ l'occasion du remaniement de son ouvrage sur La Social-dŽmocratie ‑ Son histoire et sa doctrine. En effet, il expliquait de faon h‰tive les raisons pour lesquelles il avait abandonnŽ sa position premire d'hostilitŽ ˆ la social-dŽmocratie. NŽanmoins, sa polŽmique contre les calomnies bourgeoises y est remarquable.
[91] Cf. Engels ˆ Victor Adler, 19 fŽvrier 1892.
[92] Cette lettre, comme tant d'autres, a ŽtŽ ŽgarŽe.
[93] Cf. Engels ˆ A. Bebel, 3 dŽcembre 1892.
[94] La Neue Zeit, revue thŽorique d'un excellent niveau, souvent prŽcieuse aujourd'hui encore du point de vue de la thŽorie ou de l'histoire du mouvement ouvrier international, voire des analyses sociales en gŽnŽral.
Le tirage de la Neue Zeit dŽclinant quelque peu, l'Žditeur J. H. W. Dietz proposa de lui donner un caractre plus populaire, en y ajoutant une partie artistique et une revue des ŽvŽnements politiques bref en rognant sur la partie thŽorique.
Pour ne heurter personne, d'o le ton modŽrŽ de sa lettre, Engels dŽfendra le caractre thŽorique et scientifique de la revue, et par lˆ son intŽrt durable.
[95] Engels ˆ Kart Kautsky, 27 aožt 1881.
[96] Cf. Engels ˆ George Shipton, 10 aožt 1881.
Comme il ressort de ces lettres au secrŽtaire du syndicat des peintres et directeur du Labour Standard, Marx-Engels entretenaient une correspondance avec la presse syndicale sur la base d'un appui effectif du parti ou de l'Internationale aux syndicats. Ils y diffusaient le programme du parti, et cessaient de le faire lorsque ce n'Žtait plus possible, sans claquer les portes dŽfinitivement. En tout cas, c'est toujours en socialistes qu'ils intervenaient.
[97] Le congrs annuel des syndicats devait avoir lieu du 12 au 17 septembre 1881, et George Shipton voulait Žviter de heurter les ŽlŽments modŽrŽs des syndicats, ce qui explique qu'il ait ŽlevŽ des objections ˆ certains articles de Kautsky ou d'Engels. Shipton comme Engels avaient donc intŽrt ˆ ce que leurs relations soient claires et, comme cela arrive toujours, c'est l'ŽlŽment le plus radical qui prend l'initiative d'une telle clarification, les modŽrŽs ayant prŽcisŽment pour politique de temporiser, de faire des compromis et de ne jamais trancher. Engels y avait cependant un intŽrt immŽdiat : Shipton passait pour ce qu'il Žtait, et ne pouvait plus se targuer de sa collaboration comme argument contre les ŽlŽments plus radicaux que lui, ŽlŽments qui partageaient prŽcisŽment les positions de Marx-Engels.
[98] Le 6 aožt 1881, le Labour Standard publia un article de Johann Georg Eccarius, sans mention d'auteur : Ç A German Opinion of English Trade Unionism È. L'auteur y cŽlŽbrait les syndicats de Hirsch et Duncker qui se proposaient d'influencer les ouvriers en un sens bourgeois et oeuvraient contre la liaison entre mouvement syndical et organisation rŽvolutionnaire de caractre politique.
[99] Cf. Engels ˆ Laura Lafargue, 7 mai 1889.
Engels Žtablit ici la prŽvision du cours historique futur ˆ partir de l'analyse politique, Žconomique et sociale du monde capitaliste, dŽterminant ainsi le cadre de l'action des partis prolŽtariens. C'est en ne se trompant pas dans son diagnostic que le parti remplit son r™le de direction rŽvolutionnaire de la lutte de classe.
L'histoire a amplement confirmŽ l'analyse d'Engels et dŽmontrŽ que, mme au cours de la phase la plus pacifique du capitalisme, il n'Žtait pas possible de parler de passage pacifique au socialisme. Pr™ner celui-ci aujourd'hui, dans un monde en proie ˆ toutes les convulsions et ˆ toutes les violences, c'est nier purement et simplement le marxisme.
[100] Dans sa lettre ˆ Paul Lafargue du 25 mars 1889, Engels explicite ce point : Ç La France ne pourra faire de rŽvolution pendant cette guerre sans jeter sa seule alliŽe, la Russie, dans les bras de Bismarck [la Commune ayant montrŽ qu'en cas de rŽvolution les belligŽrants capitalistes s'unissaient contre le prolŽtariat] et se voir ŽcrasŽe par une coalition. È
[101] Aprs avoir consacrŽ leurs efforts aux t‰ches d'organisation interne de la classe ouvrire, Marx-Engels reviennent, dans cette dernire partie, aux t‰ches pratiques qui attendent l'Internationale socialiste au sein de la sociŽtŽ capitaliste existante qu'il s'agit de rŽvolutionner. Dans ce but, ils Žtudient les forces en prŽsence et en heurt dans la sociŽtŽ rŽelle, afin de dŽterminer quel sera l'alignement des forces, le centre de gravitŽ, ainsi que le point o le parti de classe pourra placer le levier pour renverser le systme d'oppression rŽel.
En d'autres termes, Marx-Engels examinent quelle est la Ç politique extŽrieure de la classe ouvrire È, dont ils ont fait ˆ l'Internationale un devoir politique de dŽfinir les contours nets et tranchants dans l'Adresse inaugurale de l'A.I.T. de 1864. Si le parti de classe est l'organe dirigeant de la transformation socialiste du monde actuel, il lui faut conna”tre non seulement le champ des forces rŽelles, mais encore leur Žvolution dans le mouvement historique. C'est dire que le parti doit savoir tirer de l'Žtude des forces en mouvement la prŽvision de la nature et du cours du conflit entre le monde capitaliste et le communisme.
Le centre de gravitŽ du monde ˆ la fin du sicle dernier Žtant la France et l'Allemagne cela nous ramne ˆ notre propre histoire. Ce sont tout naturellement les perspectives de rŽvolution ou de guerre impŽrialiste entre ces deux pays qui ont alors dŽterminŽ fondamentalement la Ç politique extŽrieure du prolŽtariat socialiste È. Les analyses et l'action du parti marxiste Ç catastrophique È ‑ en opposition au rŽformisme gradualiste qui triomphera finalement dans le mouvement ouvrier, mais non dans les faits, ceux-ci dŽmentant, avec la boucherie impŽrialiste de 1914, toutes les visions idylliques et pacifiques de passage au socialisme ‑ portent donc sur les faits saillants et cruciaux de l'histoire universelle : les heurts gigantesques entre classes OU ƒtats, qui dŽterminent ensuite pour une ou deux gŽnŽrations l'Žvolution de la sociŽtŽ tout entire dans un sens ou dans un autre, selon que prolŽtariat ou bourgeoisie l'emportera.
Certes, c'est l'adversaire qui a fini par triompher, mais la vision de Marx-Engels a ŽtŽ confirmŽe par toute l'Žvolution historique, et les faits ont dŽmontrŽ que le succs n'est possible qu'ˆ partir de leur conception et de leurs mŽthodes rŽvolutionnaires.
[102] En se fondant sur son schŽma des stades politiques progressifs en vue de la conqute du pouvoir, Engels analyse le rŽsultat des Žlections franaises du 4 octobre 1885 dans sa lettre du 12 octobre 1885 ˆ Lafargue. Celui-ci la jugea si importante pour le parti franais qu'il la fit publier prŽcipitamment dans Le Socialiste du 17 octobre 1885 (p. 2, col. 2). En analysant les rŽsultats sur une base objective, Engels les avait, en effet, trouvŽs plus encourageants que les socialistes franais qui Žtaient dŽus pour d'autres raisons, plus immŽdiates : le rŽsultat tangible des Žlections. La supŽrioritŽ de la mŽthode marxiste appara”t ici encore, puisqu'elle situe les faits dans l'optique de classe, et les apprŽcie en fonction de l'ensemble du cours, non parlementariste, mais politique et rŽvolutionnaire, ce que l'on peut appeler la stratŽgie d'ensemble.
Engels n'est donc pas autrement troublŽ par le fait que les monarchistes avaient eu la majoritŽ des suffrages lors du premier tour des Žlections parlementaires, l'essentiel Žtant atteint : la dŽfaite des rŽpublicains bourgeois, des opportunistes.
Au premier tour des Žlections, les ŽlŽments monarchistes ‑bonapartistes et royalistes rŽactionnaires ‑ recueillirent 3 500 000 voix (contre 1 789 000 en 1881) et eurent 177 Žlus, tandis que les rŽpublicains n'en comptrent que 129.
[103] Sans doute Engels se rŽjouissait-il de voir les trois tendances monarchistes se regrouper par la force des choses, en un seul parti bourgeois de droite. On notera qu'il leur appliquerait le terme de secte lorsque, ˆ contre-courant de l'Žvolution normale, ils se divisaient artificiellement.
[104] Les rŽsultats du second tour ont nettement confirmŽ le jugement d'Engels. Le 18 octobre, les candidats rŽpublicains furent Žlus ˆ une majoritŽ Žcrasante. La Chambre des dŽputŽs se composa de 372 rŽpublicains et de 202 monarchistes.
[105] Cette lettre d'Engels a ŽtŽ publiŽe par Le Socialiste, 31 octobre 1885, p. 2, col. 3.
[106] Ce mot a sans doute ŽtŽ mal dŽchiffrŽ. Il s'agit probablement de Ç clarifier È.
[107] Cette lettre d'Engels ˆ Lafargue fut reprise et prŽsentŽe sous forme d'article sous le titre ci-dessus dans Le Socialiste, organe du parti ouvrier, le 6 novembre 1886.
De manire fondamentale, Engels y dŽcrit le rapport des forces impŽrialistes dans le monde qui s'acheminait vers la Premire Guerre mondiale. II se fonde sur toute lÕanalyse historique, politique et diplomatique des puissances officielles, dŽveloppŽe tout au long de sa vie par Marx et constituant une vŽritable thŽorie de lÕimpŽrialisme si l'on sait la rattacher aux chapitres du Capital sur l'accumulation primitive. De fait, le parti Ïuvre au sein d'un champ de forces bien dŽterminŽes, nullement neutres si l'on a en vue la t‰che fondamentale de la conqute du pouvoir. Cet article fut repris ˆ la fois en AmŽrique dans Der Sozialist et le Sozial-demokrat ainsi que dans la Revista Sociala roumaine en dŽcembre 1886.
[108] Ce premier paragraphe se trouve seulement dans la lettre d'Engels ˆ Lafargue.
[109] Le traitŽ de San Stefano mit fin ˆ la guerre russo-turque de 1877-78 et donna de tels avantages ˆ la Russie dans les Balkans que l'Angleterre et l'Autriche-Hongrie protestrent, appuyŽes secrtement par l'Allemagne. Une pression diplomatique et des menaces militaires forcrent la Russie ˆ rŽviser ce traitŽ au Congrs de Berlin (13 juin au 13 juillet 1878) ˆ son dŽtriment. Par exemple, le territoire attribuŽ ˆ la Bulgarie autonome fut rŽduit de plus de la moitiŽ. La province mŽridionale devint la province autonome de RumŽlie orientale qui demeura sous l'influence de la Turquie. Le territoire du MontŽnŽgro fut aussi considŽrablement rŽduit. Cependant la partie de la Bessarabie enlevŽe ˆ la Russie en 1856 et reprise par elle ˆ San Stefano lui resta ; de mme, l'annexion de la Bosnie et de la Herzegovine par l'Autriche-Hongrie fut sanctionnŽe par la paix de Berlin. La veille du Congrs, l'Angleterre s'Žtait emparŽe de Chypre. Engels a donc connu, dans ses grandes lignes, le dernier alignement des forces impŽrialistes avant la premire grande guerre mondiale.
[110] Dans sa lettre ˆ Lafargue, Engels avait Žcrit Ç pas moins que les Russes È ˆ la place de Ç ainsi que les Russes È.
[111] Dans la lettre d'Engels, il y a Ç chauvine È ˆ la place de Ç patriotique È
[112] En parlant de la politique orientale, Engels fournit en mme temps son apprŽciation sur la politique franaise qu'il dŽveloppera notamment dans son article intitulŽ Le Socialisme en Allemagne, cf. infra.
[113] Au cours de la guerre italienne de 1859, Engels avait dŽjˆ expliquŽ de quelle manire la Russie trempait dans les affaires de la pŽninsule appenine, cf. ˆ ce propos les articles d'Engels sur Le P™ et le Rhin et La Savoie,‑ Nice et le Rhin, in MARX-ENGELS, ƒcrits militaires, pp. 332-429 ; ˆ propos de la Russie, cf. 427-428 (o Engels trace un historique de l'action russe en Italie).
[114] Dans sa lettre ˆ Lafargue, Engels avait Žcrit : Ç Les Bulgares du Nord et du Sud È au lieu des Ç Bulgares et RoumŽliotes È.
[115] Dans sa lettre ˆ Lafargue, Engels avait ŽtŽ plus prŽcis. Au lieu de Ç mais pour lui È, il avait Žcrit Ç ˆ lui et pour lui È.
[116] Engels, plus bref, achve la phrase par ces mots : Ç Celui-ci cde, ou bien ‑ rŽvolution par les slavophiles. È
[117] Ç Pas mal È ne se trouve que dans le texte de lettre d'Engels ˆ Lafargue.
[118] Ç Mme È a ŽtŽ remplacŽ par Ç davantage È È dans le texte imprimŽ.
[119] Dans le texte imprimŽ, Lafargue a remplacŽ Ç anarchie È par Ç RŽpublique È.
[120] Cette phrase manque dans la lettre d'Engels, mais elle correspond ˆ sa pensŽe, et on la trouve dŽveloppŽe, par exemple, dans MARX-ENGELS, ƒcrits militaires, p. 611 (F. Engels, Ce qui attend l'Europe, 15 janvier 1888).
[121] Dans sa lettre, Engels poursuivait : Ç Alors il y aura quelque changement de systme. È
[122] Ë la place de cette phrase, Engels avait Žcrit : Ç Pour les autres, ce sera une nouvelle tentation d'attaquer l'Allemagne qu'on croira moins forte au moment d'un changement de politique intŽrieure. È
[123] Tout le monde a pratiquement oubliŽ depuis l'horrible carnage impŽrialiste de 1939-1945 que le prolŽtariat ne doit pas simplement lutter contre la guerre ˆ cause de son horreur et des souffrances qu'elle inflige ˆ lÕhumanitŽ, sous peine de se condamner ˆ l'impuissance.
Le Ç gŽnŽral È Engels ne cesse, en effet, de souligner, tout au long de ses Žtudes militaires, le caractre de classe nŽcessaire des guerres et de la violence. La prŽsente lettre en est encore un exemple frappant : toute guerre moderne, mme si elle est conduite entre ƒtats constituŽs des classes dominantes, a un caractre de classe contre le prolŽtariat. La classe ouvrire, force dŽcisive de la production et de la vie modernes, est toujours au centre des questions cruciales de paix ou de guerre. Mais pour le voir, il faut se placer d'un point de vue de classe. LŽnine l'a fait magistralement en 1914 en, dŽclarant le conflit en cours impŽrialiste, c'est-ˆ-dire dirigŽ en premier contre la classe ouvrire internationale qui tend au socialisme.
[124] Cf. Engels ˆ Paul Lafargue, 27 juin 1893.
Dans les textes suivants, Engels prend l'initiative, au nom du parti historique, de dŽterminer la position de la classe ouvrire franaise et allemande dans le conflit qui s'annonce. Il intervient ainsi directement pour inflŽchir les tendances nationales au sein du mouvement existant, et en France, par exemple, le chauvinisme traditionnel.
Le 17 juin 1893, le comitŽ national du parti ouvrier franais lana un appel intitulŽ Ç le Conseil national du Parti ouvrier aux travailleurs de France È afin de rŽpondre ˆ une campagne des boulangistes et des anarchistes accusant les socialistes d'avoir une action antipatriotique.
C'est avec une grande modŽration qu'Engels critique ici ses camarades de parti franais, emportŽs dans la polŽmique au point de crier Ç Vive la France ! È et retombant dans leur vieille maladie : le chauvinisme. (Cf. La Commune de Paris, 10/18, p. 77 : en pleine guerre, Marx a d'autres mots pour qualifier ces aberrations chauvines, car alors il ne s'agit plus de paroles et de polŽmiques, mais de prises de position pratiques Ç Il y a, d'autre part, ces imbŽciles de Paris ! Ils m'envoient, en grande quantitŽ, leur Manifeste ridiculement chauvin, qui a suscitŽ ici, parmi les ouvriers anglais, la risŽe et l'indignation, que j'ai eu toutes les peines du monde ˆ ne pas laisser se manifester en public. È)
[125] Les nations existant, la position d'un internationaliste est d'tre Franais en Allemagne et internationaliste en France, autrement dit de nier sa propre nation lˆ o il la trouve devant lui. En termes lŽninistes, l'internationaliste lutte d'abord contre sa propre bourgeoisie.
[126] Dans le Manifeste, Marx-Engels rglent cette question une fois pour toutes : Ç On a, en outre, reprochŽ aux communistes de vouloir supprimer la PATRIE, la NATIONALITƒ. Les ouvriers n'ont pas de PATRIE. On ne peut pas leur enlever ce qu'ils n'ont pas. È On remarquera que, dans la premire phrase, il est question de patrie ET de nationalitŽ, et dans la seconde on ne pas de patrie : on ne eut donc leur enlever ce qu'ils n'ont pas. Ils combattent la nationalitŽ qui est un FAIT, car les ouvriers sont franais, italiens, etc., et ce, non seulement de par la race et la langue (encore qu'il y aurait bien des choses ˆ dire sur ces deux facteurs), mais surtout par l'appartenance physique ˆ l'un des territoires o gouverne tel ƒtat national de la bourgeoisie. Ce fait physique n'est pas sans avoir de grands effets sur la lutte de classe et mme sur la lutte internationale : la nation n'est-elle pas le ring o la bourgeoisie se heurte aux autres nations bourgeoises, et o le prolŽtariat affronte sa bourgeoisie puis le capital international ? Mais tout cela ne lui donne pas de patrie. Cf. Facteurs de race et de nation dans la thŽorie marxiste, in : Fil du Temps, n¼ 5, p. 113 et s.supprime que la patrie. Ce n'est sans doute pas par hasard. Les ouvriers n'ont
[127] D'aprs ces critres, LŽnine jugeait du poids et du r™le de la Russie dans le processus de la rŽvolution mondiale : Ç On aurait Žgalement tort de perdre de vue qu'aprs la victoire de la rŽvolution prolŽtarienne, si mme elle n'a lieu que dans un seul des pays avancŽs, il se produira, selon toute probabilitŽ, un brusque changement, ˆ savoir : la Russie redeviendra, bient™t aprs, un pays, non plus exemplaire, mais retardataire (au point de vue Ç soviŽtique È et socialiste). È Cf. LŽnine,Îuvres, 31, p 15.
La Russie soviŽtique tenait compte, par exemple, de la diffŽrence sociale entre un ouvrier et un paysan, la voix du premier valant dix fois plus que celle du second dans les consultations dŽmocratiques. De mme, l'Internationale communiste attribuait un poids spŽcifique ˆ chaque parti communiste des diffŽrents pays. Par exemple, les partis communistes d'Allemagne, de France et de Russie disposaient chacun de cinq voix au Premier Congrs de l'Internationale, contre trois au Parti communiste de Suisse, de Finlande ou de Hongrie. Dans un certain contexte, ces diffŽrences sont Ç justes È, car on ne peut faire abstraction de la force rŽelle de chaque mouvement particulier. Cependant, ces diffŽrences doivent s'attŽnuer, puis s'effacer au fur et ˆ mesure que l'Internationale se transforme en un parti mondial unique. Enfin, ces diffŽrences quantitatives ne peuvent jouer lorsqu'il s'agit de discuter de questions Ç qualitatives È, de programme ou de principe.
[128] Ici encore, Engels fait la partie belle ˆ ses interlocuteurs franais, car il Žtait peu vraisemblable que la France jou‰t ce r™le d'impulsion de la rŽvolution internationale : il ežt effectivement fallu une conjonction de faits assez extraordinaires pour cela. En fait, c'est ˆ la Russie que Marx-Engels attriburent ce r™le ds 1871 : cf. par exemple, la prŽface russe du Manifeste communiste.
[129] Dans Le R™le de la violence et de l'Žconomie dans l'instauration de l'Empire allemand moderne, Engels Žcrivait : Ç Il ne fallut pas cinq semaines pour que s'Žcroul‰t tout l'Ždifice de l'empire de NapolŽon III, si longtemps admirŽ par les philistins d'Europe. La rŽvolution du 4 septembre ne fit qu'en balayer les dŽbris, et Bismarck, qui Žtait en guerre pour fonder lÕempire de la Petite-Allemagne, se trouva un beau matin fondateur de la RŽpublique franaise. È
[130] La
thŽorie marxiste part de la rŽalitŽ, puis elle revient ˆ la rŽalitŽ dans son
action. Elle est donc toujours insŽparable des conditions matŽrielles. Sa mŽthode
se distingue foncirement de celle des anarchistes, qui agissent en vue de
rŽaliser des principes abstraits, Ç Žternels È, de morale, de
justice, d'ŽgalitŽ etc. Les mŽthodes rŽvolutionnaires du marxisme sont
insŽparables des conditions dŽterminŽes de la sociŽtŽ de classe
existante : dŽveloppement de l'industrie qui conditionne le nombre et la
qualitŽ des prolŽtaires, crise de production qui suscite la crise
rŽvolutionnaire, rapports Žconomiques qui dŽterminent les forces et les
antagonismes en prŽsence. Sans cela, la thŽorie ne serait pas reliable aux
donnŽes objectives de la rŽalitŽ.
Marx nous donne un exemple de cette liaison matŽrielle entre thŽorie et pratique historique concrte dans le passage suivant ˆ propos de l'effet de l'unification nationale (obtenue par l'Allemagne en 1871) sur le mouvement ouvrier : Ç Si les Prussiens sont victorieux, la centralisation du pouvoir d'ƒtat sera utile ˆ la centralisation de la classe ouvrire allemande (jusque-lˆ coincŽe dans les 36 ƒtats et divisŽe en autant de petits morceaux). La prŽpondŽrance allemande transfŽrera, en outre, le centre de gravitŽ du mouvement ouvrier europŽen de France en Allemagne, et l'on n'a qu'ˆ comparer le mouvement de 1866 jusqu'ˆ nos jours dans les deux pays, pour voir que, du point de vue de la thŽorie et de l'organisation, la classe ouvrire allemande l'emporte sur la franaise. Son poids accru sur le thŽ‰tre mondial signifiera aussi que notre thŽorie l'aura emportŽ sur celle de Proudhon, etc. È Il faut ne rien avoir compris au socialisme scientifique, appelŽ Ç marxisme È, pour substituer ˆ la thŽorie de classe du prolŽtariat la thŽorie individuelle de ‑Marx, et transformer la lutte sociale en lutte d'idŽes de deux personnes pour dire, comme le fait par exemple DollŽans, en commentaire ˆ ce passage de la lettre de Marx ˆ Engels du 20 juillet 1870 : Ç Sa victoire dŽfinitive sur Proudhon, voilˆ ce qui importe aux yeux d'un idŽologue dominateur È !!!
[131] Cet article d'Engels a ŽtŽ publiŽ aussi bien en allemand (dans la Neue Zeit, I, 1891-1892, n¼19) qu'en franais (dans l'Almanach du Parti ouvrier pour 1892, imprimŽ ˆ Lille).
Il constitue un avertissement contre le danger d'une guerre que la bourgeoisie internationale menace de dŽclencher pour rŽsoudre ses propres contradictions et pour prŽvenir la conqute du pouvoir par le prolŽtariat, notamment en Allemagne. Il ne semble pas que l'article d'Engels ait reu l'Žcho qu'il mŽritait dans le parti franais, puisqu'il parut ˆ Lille dans l'Almanach du parti. Pourtant, Engels avait prŽparŽ le terrain et les idŽes dans la mesure de ses moyens auprs de ses partisans les plus fidles, Bebel, Lafargue, la compagne de ce dernier, Laura Marx. ƒtant donnŽ l'ambiance de l'Žpoque, il dut mesurer ses mots pour ne choquer aucune susceptibilitŽ, et il convient de lire ce texte en tenant compte de la prudence dÕEngels. Au reste, dans l'Avertissement donnŽ en tte de l'article publiŽ dans la Neue Zeit, Engels dit lui-mme :
Ç Il va sans dire ‑ mais je le rŽpte tout de mme expressŽment une fois encore ‑ que dans cet article je ne parle qu'en mon nom propre, et nullement au nom du parti allemand. Seuls les autoritŽs, les dŽlŽguŽs et hommes de confiance Žlus de ce parti ont ce droit. Et eu outre, toute ma position acquise sur le plan international par cinquante annŽes de travail m'interdit de me prŽsenter comme reprŽsentant de tel ou tel parti socialiste national en opposition ˆ un autre parti, mme si elle ne m'interdit pas de me souvenir que je suis allemand et que je suis fier de la position que les ouvriers allemands ont su conquŽrir avant tous les autres. È
Ce n'est pas par hasard si Engels retrace l'histoire du mouvement ouvrier allemand depuis ses dŽbuts : la question de la guerre devait remettre en jeu l'existence du mouvement ouvrier tout entier. En outre, dans son Žvaluation de la politique face ˆ la guerre, l'existence d'un puissant parti ouvrier n'est pas sans peser trs lourd dans la balance.
[132] Dans le texte allemand, au lieu de Ç remuŽ le prolŽtariat allemand È il y a Ç le prolŽtariat allemand a fait de manire autonome È.
[133] Dans le texte allemand, Engels ne parle pas du parti de Bebel et de Liebknecht, mais plus simplement du nouveau parti d'Eisenach.
[134] Dans le texte allemand, Engels n'attribue pas le titre de socialistes ˆ ces deux fractions, il dit plus simplement Ç deux courants È.
[135] Dans le texte allemand, au lieu de Ç dŽputŽs bourgeois, Ç partis de l'ordre È.
[136] Il s'agit de Bebel et Liebknecht.
[137] Au lieu de Ç dŽputŽs bourgeois È, le texte allemand dit Ç dŽputŽs des partis de l'Ordre È.
[138] Dans le texte allemand, Engels Žcrit : Ç dans les districts agraires les plus rŽactionnaires È.
[139] Engels se base sur la progression des voix social-dŽmocrates aux Žlections pour dŽduire que si l'Allemagne suit un cours pacifique, la social-dŽmocratie arrivera au pouvoir. On notera que les chiffres qu'il indique ne donnent jamais la majoritŽ Žlectorale aux social-dŽmocrates. Ce n'est donc pas par la voie pacifique que les social-dŽmocrates arriveraient au pouvoir. Ce raisonnement n'est pas Žtranger ˆ Engels qui n'Žtalait jamais les chiffres sans les Žvaluer exactement.
[140] En somme, Engels propose d'utiliser ˆ plein la pŽriode de dŽveloppement pacifique qui joue en faveur des forces socialistes, et de laisser jusque-lˆ l'initiative de la violence au camp bourgeois. En tout cas, ce n'est pas de manire parlementaire, mais rŽvolutionnaire qu'Engels envisage la conqute du pouvoir.
[141] Dans le texte allemand, Engels introduit ˆ cet endroit une prŽcision intŽressante : Ç tant que durera sa force supŽrieure È. Comme on le voit, le marxisme ramne toujours les questions fondamentales ‑ celle du pouvoir, par exemple ‑ aux rapports des forces physiques, rŽelles, et non aux jeux parlementaires. Le cours historique, avec la guerre mondiale, le confirmera aussi.
[142] Cf. La Seconde adresse du Conseil gŽnŽral sur la Guerre franco-allemande prŽparŽe par Marx, in La Guerre civile en France, 1871, ƒditions sociales, 1953, p. 287.
[143] Dans le texte allemand. au lieu de Ç en vue des risques ˆ courir È, on lit Ç face ˆ de telles perspectives È.
[144] Dans le texte allemand. ce dernier membre de phrase est remplacŽ par : Ç de remplir le r™le qui lui incombe dans le dŽveloppement historique europŽen È.
[145] Cette phrase. comme l'ensemble du texte, exclut expressŽment la solution renŽgate de l'Union sacrŽe qui consiste ˆ faire front avec sa propre bourgeoisie et qui, triomphant ˆ la Premire comme ˆ la Seconde Guerre mondiale, a ruinŽ le mouvement prolŽtarien rŽvolutionnaire pour des dŽcennies.
[146] La suite de l'article en allemand d'Engels, parue plus tard, est intŽressante, du fait que l'ŽventualitŽ d'une guerre dans le rapport de forces de 1892 devait tre ŽcartŽe. En effet, il y eut provisoirement un rapprochement russe avec l'Allemagne et le conflit qui Žclata en 1914 fut ‑ comme LŽnine et quelques rares socialistes de gauche l'affirmrent aussit™t ‑ une guerre impŽrialiste dans tous les pays.
[147] En juillet 1891 la flotte franaise avait ŽtŽ reue triomphalement ˆ Cronstadt pour marquer le rapprochement survenu entre la Russie tsariste et la France. Au mme moment, les diplomates nŽgocirent un traitŽ franco-russe, qui fut signŽ en aožt 1892 et prŽvit des consultations communes en politique internationale ainsi qu'une action militaire commune en cas d'attaque de l'un des deux partenaires. Ce traitŽ prŽpara l'alliance franco-russe de 1893.